Les mnemiopsis leidyi, une espèce marine de macro-plancton connue sous le nom de “cténophore”, disposent de capacités exceptionnelles pour cicatriser leurs plaies. Une avancée potentiellement importante pour la cicatrisation et la transplantation organique.
La fusion d’animaux
C’est un autre exemple, s’il en fallait d’autres, de l’incroyable adaptation de la nature pour survivre. La découverte est survenue par hasard alors qu’une équipe de chercheuses et chercheurs de l’Université d’Exeter (Angleterre) et de l’Institut de Sciences Naturelles d’Okazaki (Japon) conservait des cténophores dans un bassin pour étudier leurs capacités régénératives.
Pour tout organisme normalement constitué, lorsqu’une blessure advient, les blastèmes, une masse de cellules en charge de la prolifération cellulaire, se mettent en fonctionnement pour combler la plaie. Chez les mnemiopsis leidyi, ces blastèmes « ne semblent pas contribuer à la formation de nouvelles structures », ce qui suggère « une source locale de cellules pendant la période de croissance. »
Cette aptitude « remarquable à remplacer les tissus manquants » pousse les chercheurs à aller plus loin dans leurs observations. Un jour ils découvrent, dans le bassin expérimental abritant les individus, un spécimen plus gros que la moyenne, avec un dédoublement des organes vitaux.
Pour comprendre le phénomène, ils décident d’isoler les individus par groupe de deux et leur incisent les lobes. Dans neuf cas sur dix, les deux animaux ont fusionné. Cette stratégie permet aux individus de survivre au minimum trois semaines supplémentaires.
Une avancée pour les greffes ?
Là encore, la technique diffère des être vivants jusqu’alors observés. Chez l’homme, lors d’une transplantation, la différence génétique et cellulaire pousse le corps à rejeter l’organe étranger nouvellement greffé.
« Les cténophores pourraient être dépourvus d’un mécanisme d’allo-reconnaissance qui empêcherait les événements de fusion entre congénères » expliquent les chercheurs. Cela sous entendrait que toutes cellules, même génétiquement éloignées, pourraient fusionner. Pour le moment, « l’origine et l’évolution de ces stratégies restent sans réponse […] les mécanismes cellulaires et moléculaires qui sous-tendent cette capacité sont inconnus »
Seconde constatation d’importance, les individus fusionnés intègrent et partagent rapidement des fonctions physiologiques et neurocomportementales. Moins de deux heures après le début de la fusion, les systèmes digestifs et nerveux ne font plus qu’un. Les bouches originelles coexistent et la nourriture que l’une ou l’autre avale transite par un unique tube digestif. Les deux anus continuent de cohabiter.
Ces observations justifient « des recherches supplémentaires pour comprendre l’évolution des systèmes de reconnaissance du soi et du non-soi et l’intégration fonctionnelle des structures neuronales chez les cténophores. » Avec à la clé des découvertes sur la régénération des tissus et les rejets de greffes ?
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Source : Revue Current Biology, 7 octobre 2024, Regeneration in the ctenophore Mnemiopsis leidyi occurs in the absence of a blastema, requires cell division, and is temporally separable from wound healing.