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Cantine bio, autonomie énergétique et havre de biodiversité : Ungersheim, petite ville écolo modèle

« Nous pouvons considérer que la souveraineté alimentaire est acquise, mais les gens devraient acheter davantage de produits locaux et de saison, car nous avons ce qu’il faut. En cas de crise, nous pouvons subvenir à nos besoins alimentaires »

Au cœur du Haut-Rhin, la petite ville d’Ungersheim a entamé une démarche de transition écologique il y a plus d’une vingtaine d’années déjà. Aujourd’hui reconnue comme pionnière des avancées environnementales, intellectuelles ou encore énergétiques en France comme en Europe, Ungersheim doit sa renommée à son maire, Jean-Claude Mensch, qui, grâce à sa sensibilité écologique, sa ténacité et ses nombreux travaux et études, a fait d’elle un véritable modèle d’avenir duquel s’inspirer.

Ungersheim, Inspiré par Rob Hopkins

Tout commence avec l’installation de 120 mètres carrés de chauffage solaire sur le toit de la piscine de la commune alsacienne, en l’an 2000. Près d’une quinzaine d’années avant que le sujet de la sobriété énergétique ne soit l’une des préoccupations principales des défenseurs de la cause environnementale et de trop peu nombreux dirigeants, Ungersheim, petite ville du Haut-Rhin d’à peine plus de 2000 habitants, avait déjà saisi les enjeux qui allaient devenir ceux de toute une génération.

« À l’origine, la piscine était à l’origine intégralement chauffée à l’électricité. Mais à l’époque, on ne parlait pas de transition écologique. J’avais une sensibilité sur ces questions depuis très longtemps. C’est cela qui m’a amené à réaliser cette première démarche », explique Jean-Claude Mensch, maire de la commune depuis 1989, à La Relève et la Peste.

Inspiré par le Manuel de transition de Rob Hopkins, enseignant en permaculture à l’origine d’un mouvement international en faveur de la transition écologique des villes, Jean-Claude Mensch réalise qu’il mène déjà, depuis plus d’une décennie, des actions en ce sens et qu’il est nécessaire, désormais, de les structurer, « afin de mener cette transition, et de la mener jusqu’au bout ».

Lui vient alors l’idée de mettre en place 21 actions concrètes pour le 21ème siècle, dès 2011, afin de transformer sa ville dans une logique sans faille de respect à l’environnement. À la fois sur un plan d’autonomie intellectuelle, d’indépendance énergétique mais aussi de souveraineté alimentaire.

Aujourd’hui, les habitants sont en autonomie énergétique au niveau du chauffage, forts de 4 centrales photovoltaïques, bientôt 5, d’une puissance de 10 mégawatts. Aussi, une unité de méthanisation s’est installée, produisant autant de gaz que ce que consomme la commune, tout comme le développement de la biomasse. La ville a également réduit de 40% la consommation d’énergie pour l’éclairage public et fait aussi usage d’un cheval utilitaire et d’un camion à propulsion électrique.

Ungersheim, photovoltaïque

Photovoltaïque sur l’école

Dans les cantines, 100% d’alimentation bio

Pour la transition alimentaire, la commune accueillait un chantier d’insertion porté par l’association les Jardins d’Icare jusqu’il y a peu. Ungersheim a par la suite repris le projet après le dépôt de bilan de l’association. En parallèle, la ville a créé une régie agricole communale, désormais répartie sur 20 hectares.

Aujourd’hui, le maire espère développer « Terre résiliente », un projet ayant pour objectif d’expérimenter des cultures susceptibles d’intéresser les céréaliers maïsiculteurs afin qu’ils se convertissent au bio tout en étant rentables le temps de leur transition.

« Aujourd’hui, avec le maïs, nous nous sommes installés dans une habitude, qui nécessite un outillage correspondant, avec une terre propice à cette culture. Il faut donc tout revoir. Nous nous orientons certes vers le maraîchage, mais il est très mal payé, surtout le bio. Nous allons nous diriger vers le chanvre, le colza, le tournesol pour la fabrication de l’huile. Plus tard, l’idéal serait aussi de produire les légumineuses », abonde Jean-Claude Mesch pour La Relève et la Peste.

Des objectifs envisageables d’autant qu’un retrait total des produits phytosanitaires et engrais chimiques a été amorcé lors de la réflexion autour des 21 actions.

« Nous pouvons considérer que la souveraineté alimentaire est acquise, mais les gens devraient acheter davantage de produits locaux et de saison, car nous avons ce qu’il faut. En cas de crise, nous pouvons subvenir à nos besoins alimentaires », ajoute Jean-Claude Mesch.

Depuis 2009, déjà, les enfants bénéficient d’une alimentation 100% bio à la cantine, tous les jours de la semaine.

« Concernant l’autonomie intellectuelle, il est difficile de sortir les gens de leurs habitudes consuméristes. Alors, parfois, vous baissez les bras, vous êtes dans le doute et vous posez beaucoup de questions. On est en face de l’effondrement de la biodiversité, du dérèglement climatique, où les signaux ne cessent d’augmenter. Et pourtant, la société ne bouge pas. Les politiques ont une grande responsabilité », déclare le maire d’Ungersheim à La Relève et la Peste.

Jusqu’ici, la commune a élaboré un atlas communal de la biodiversité ou encore créé une monnaie locale complémentaire, le Radis, et mis en place un parcours de sensibilisation à la démarche de transition.

Jean-Claude Mensch devant un champ de colza à Ungersheim

Jean-Claude Mensch devant un champ de colza à Ungersheim

Une transition parfois compromise

« Comme toujours, lorsqu’on est dans l’innovation, toutes les vérités doivent franchir trois étapes, comme le disait Schopenhauer. Nous considérions donc que notre démarche de transition écologique était l’une de ces vérités. Au départ, les gens observent, nous traitent d’utopistes ou de farfelus. La deuxième étape, lorsque ça commence à prendre, c’est là où il y a des réactions, de l’incompréhension, des oppositions qui se créent. Enfin, tous ces opposants, une fois que ce que vous avez mis en place fonctionne, vous diront « c’est comme ça qu’il fallait faire » », détaille Jean-Claude Mensch pour La Relève et la Peste.

Les opposants n’ont en effet pas manqué de déstabiliser les élus en place pour tenter de freiner le processus de transition. Le maire nous le confie, lui et ses équipes ont connu de très mauvais moments. Jean-Claude Mensch a notamment vu les financements de ses actions et projets drastiquement évoluer avec le temps.

« Il fallait trouver des niches. La transition écologique, c’est une réorientation des politiques publiques. Dépenser moins à certains endroits pour en faire plus au niveau de la transition. Nous étions un peu considérés comme des pestiférés, à l’époque », précise le maire à La Relève et la Peste.

Panorama d'Ungersheim

Ungersheim / Wikimedia Commons

Le maire, et le conseil municipal à l’unanimité, se sont par exemple opposés à la construction d’un terrain qui devait accueillir une zone de vacances avec des centaines de bungalow, à proximité de l’écomusée, dans une forêt alluviale. Une prise de position qui leur a valu de nombreux coups bas et des subventions bien difficiles à obtenir par la suite pour les accompagner dans cette transition écologique.

Jean-Claude Mensch, fort de son engagement, a su faire face à ces mésaventures et a même connu un véritable regain d’intérêt pour ses démarches grâce au film « Qu’est-ce qu’on attend », réalisé par Marie-Monique Robin en 2016. Après son documentaire « Sacrée Croissance », qui relate bon nombre d’initiatives solidaires  et écologiques permettant de repenser la société aujourd’hui fondée sur la croissance, la réalisatrice française choisit de poser son regard sur Ungersheim et de valoriser ses prises de risques et actions en matière de transition.

« Ce film a réellement permis de mettre en lumière nos initiatives et notre engagement. À ce moment, les choses se sont calmées, les subventions ont commencé à abonder de nouveau et les sollicitations également », explique le maire à La Relève et la Peste.

En effet, la commune prouve que, dans un sens comme dans l’autre, la transition écologique dépend en grande partie des dirigeants, à petite, comme grande échelle, et que les maires font partie intégrante du maillon qui permettra à tous de réussir notre progression dans un monde soutenable. Cet engagement constant d’Ungersheim a même fini par être récompensé : la ville a décroché, en 2021, le titre de « meilleure petite ville française pour la biodiversité », décerné par l’Office français de la biodiversité.

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Juliette Boffy

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