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Au Sénégal, les paysans retrouvent leur souveraineté alimentaire grâce aux céréales locales

« Le pain a remplacé la plupart des recettes locales pour le petit déjeuner, sa consommation est exponentielle », relève Audrey Boullot. « Puisqu’il est fabriqué à partir de farine de blé importée, le Sénégal dépend de cette importation. Le prix du blé peut évoluer, les boulangers ne sont donc pas à l’abri d’un choc, d’une hausse des prix. Remplacer le blé par des céréales locales permet d’avoir plus d’autonomie alimentaire ».

Depuis 10 ans, l’association SOL mène au Sénégal un projet visant à promouvoir la souveraineté alimentaire par la valorisation des ressources locales. Entretien avec Audrey Boullot, responsable des programmes pour SOL, en charge des projets à l’international.

Sur les marchés sénégalais, la baguette de pain blanche est incontournable. Fabriqué à partir de blé importé, ce pain industriel a détrôné les produits à base de céréales locales, mettant en péril les petits agriculteurs et les boulangers traditionnels.

Délaissés par les consommateurs urbains et les jeunes, ceux-ci s’organisent au sein de mouvements paysans fédérateurs. Leur objectif : revaloriser les céréales locales et ainsi reconquérir une souveraineté alimentaire.

Cette histoire, contée par le documentaire Semer, Récolter, Résister, est celle d’un projet porté par l’association SOL et par la FONGS (Fédération des Organisations Non-Gouvernementales du Sénégal). Son objet est de promouvoir la souveraineté alimentaire par la valorisation des ressources locales.

La phase 2 de ce projet, qui s’étend de 2018 à 2021, porte sur la valorisation des céréales locales dans les régions rurales de Thiès, Kaffrine, Kaolack et Diourbel,dans le bassin arachidier du Sénégal.

« SOL travaille sur cette thématique de souveraineté alimentaire depuis les années 1990 en Afrique de l’Ouest », précise Audrey Boullot. « Le projet actuel au Sénégal a été mis en place à partir de 2015. Le but était de créer une filière de céréales locales, en l’occurrence le mil et le maïs, de la graine jusqu’à sa transformation. Au début 3 unités ont été créées. Nous avons collaboré avec des ONG pour construire des moulins permettant une qualité de farine très fine ».

Afin de revaloriser ces céréales, il s’agissait également de faire évoluer les habitudes alimentaires.

« Nous avons collaboré avec des femmes qui vendent dans la rue ou sur les marchés des beignets, des galettes, des préparations locales…Nous avons aussi travaillé avec les boulangers, que nous avons formés, comme les femmes, à l’incorporation de céréales locales ».

Les femmes sont facilement parvenues à remplacer la farine de blé par les céréales locales. Pour les boulangers en revanche, se séparer de la farine de blé s’avère plus ardu.

« Ils sont obligés de continuer à en utiliser. D’abord parce qu’il est difficile de faire du pain sans farine de blé, mais aussi parce que les clients peuvent délaisser ces produits si les pains sont trop différents. Les boulangers incorporent cependant de 15 à 30% de céréales locales dans leurs produits ».

Trois grandes raisons ont impulsé ce projet. En premier lieu, la souveraineté alimentaire.

« Le pain a remplacé la plupart des recettes locales pour le petit déjeuner, sa consommation est exponentielle », relève Audrey Boullot. « Puisqu’il est fabriqué à partir de farine de blé importée, le Sénégal dépend de cette importation. Le prix du blé peut évoluer, les boulangers ne sont donc pas à l’abri d’un choc, d’une hausse des prix. Remplacer le blé par des céréales locales permet d’avoir plus d’autonomie alimentaire ».

Ensuite, la valorisation de la production locale.

« On forme ceux qui participent au projet à l’agroécologie. Pour les unités de transformation paysannes, il s’agit de créer une activité régénératrice, plus durable ».

Enfin, les avantages nutritifs.

« Les céréales locales sont plus nutritives que le pain produit à partir de farines industrielles. Celui-ci est peu cher mais aussi très peu nourrissant ».

Mener un tel projet implique naturellement quelques difficultés. Il y a d’une part le contexte, comme l’explique Audrey Boullot :

« Nous agissons en zone rurale, où il est compliqué de transporter des matières premières et du matériel…Il faut en permanence essayer de résoudre ce type de problèmes, ça nécessite une grande adaptabilité ».

À cela s’ajoute le manque de moyens.

« Nous sommes limités en termes de ressources pour étendre le projet autant qu’on l’aimerait. Aujourd’hui, même si les politiques y sont favorables, il y a très peu de moyens et d’actions de la part des politiques publiques ».

Malgré ces obstacles, le projet a rencontré un réel succès et bénéficie déjà à 150 fermes familiales, 5 organisations paysannes, 3 minoteries, 250 transformatrices et boulangers, et plus de 40 000 consommateurs ont accès aux produits.

Marine Wolf

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