C’est un soulagement énorme pour Adrien et Marine. Alors qu’ils devaient payer une amende de 1500 euros par mois et partir des mobil-homes qu’ils occupent sur leur ferme, ils ont finalement trouvé un accord avec la mairie après 2 ans de litige. Le couple de maraîchers va pouvoir y construire une maison pour leur famille.
Un accord qui respecte leurs valeurs écologiques
En avril 2022, nous vous alertions sur la situation d’Adrien et Marine, maraîchers bio à Maché, en Vendée, et parents de deux enfants. Après trois ans à avoir soigné la Terre et alors qu’ils lançaient leurs premières ventes à l’été, la nouvelle municipalité avait lancé des procédures contre leur mobil-home, illégal selon le PLU.
Deux ans plus tard, grâce à une médiation lancée en février 2023 sur proposition du tribunal, c’est un dénouement heureux pour les deux paysans. Ils sont parvenus à un accord avec la municipalité : ils vont pouvoir continuer à vivre sur leur ferme.
La solution trouvée : construire une maison sur une dalle en béton de 150m2, déjà existante, qui servait à l’ancien propriétaire à épandre du fumier à l’extérieur.
« On est contents car cela répond à nos deux revendications : vivre en plein milieu de la ferme sans artificialiser le sol ! Ce n’était pas un but en soi d’être dans les mobil-homes pour toujours. C’était une solution d’appoint pour les premières années afin d’avoir le temps de rentabiliser notre activité de maraîchage. On pensait ensuite faire autre chose, mais on ne savait pas encore quoi. Là, c’est génial pour nos enfants et nos valeurs écologiques » raconte Adrien Cano à La Relève et La Peste
Le couple va construire un logement plus pérenne, plus spacieux et mieux adapté à leur famille grandissante. Leurs enfants sont aujourd’hui âgés de 5 et 4 ans. Avec une exigence : rester fidèles à leurs valeurs de vie plus sobre.
« La construction envisagée va dans le sens d’un habitat écologique et bio sourcé localement : une petite maison ossature bois et isolation paille. Cela tombe bien, un maître d’œuvre spécialiste de ce type de construction est déjà dans les starting blocks pour monter le dossier de permis de construire et nous avons la chance d’avoir à 10km une entreprise spécialisée dans la botte de paille haute densité pour la construction-isolation » détaillent Adrien et Marine
La résolution du conflit est un soulagement immense pour le couple de maraîchers qui a continué à solidifier les activités de la ferme malgré la pression des poursuites judiciaires. La surface totale de la ferme est de 3.3 ha, avec une surface cultivable en plein champ de 2ha et sous abri de 1000m².
Depuis 2022, l’évolution de la ferme se passe très bien. Ils ont développé les types de cultures et des partenariats avec des fermes voisines pour créer un magasin à la ferme (bière, pain, miel en plus de leurs légumes) : « le modèle qu’on voudrait voir partout dans nos campagnes » précise Adrien dans un sourire.
« On a monté une champignonnière, ce qui va lisser notre production de revenus après l’été. On a plein de projets et malgré cette pression financière sur le dos, on n’a rien lâché. On a continué à développer la ferme autant qu’on le pouvait pour montrer le sérieux et la crédibilité de notre travail » explique Adrien Cano à La Relève et La Peste
Une pugnacité qui a dû marquer des points auprès de l’édile et leur a permis d’agrandir leur clientèle au fur et à mesure. Adrien et Marine ont une soixantaine de clients réguliers qui viennent une fois tous les 3 semaines, et livrent 60% de leur production à 4 Biocoops locales.
Un exemple pour d’autres installations agricoles ?
Alors que la moitié des agriculteurs partiront à la retraite d’ici moins de 10 ans, l’installation des jeunes paysans est de plus en plus difficile à cause de la taille des fermes et de la difficulté de se loger en France.
« On espère que notre situation pourra inspirer les plus hauts niveaux pour les constructions en zone agricole et permettre aux élus d’étudier les dossiers au cas par cas pour permettre de créer des choses, surtout pour les maraîchers » partage Adrien
Cela est encore plus compliqué pour un maraîcher d’obtenir le droit de vivre sur sa ferme, même en habitat léger, car l’administration française considère que cela n’est pas nécessaire en l’absence d’animaux malgré des plages horaires de travail énormes (50h par semaine en moyenne).
Le couple doit maintenant faire face à un nouveau défi : réunir la somme nécessaire pour la construction d’un habitat écologique alors qu’ils ne justifient pas encore de 3 ans d’activité pour emprunter largement auprès des banques. Avec un délai à respecter : ils n’auront qu’un an pour débuter les travaux de construction une fois le permis validé, l’échéance approximative pour démarrer est la fin d’année 2025.
Pour y parvenir, ils ont demandé à leurs familles de les aider et lancé une collecte de fonds. Avec l’envie de continuer à construire un projet qui permettra d’accueillir bien plus tard une nouvelle génération de maraîchers locaux, quand eux-mêmes devront transmettre leur ferme.
« Ce qui me plaît avec notre cas, c’est que cette dalle en béton est en plein milieu de la ferme. Donc ce ne sera jamais possible de vendre la ferme sans vendre la maison. Ce n’est pas l’endroit le plus paysager avec la plus belle vue mais c’est le plus symbolique, cela rend la maison indissociable de la ferme » conclut Adrien