C’est voté ! Après un long combat législatif, le Parlement a définitivement adopté, ce mercredi 25 janvier, une loi pour interdire les hautes clôtures dans les espaces naturels, notamment en Sologne, afin de mieux protéger la faune et lutter contre les dérives de la chasse en enclos.
Après l’Assemblée Nationale, c’est au tour du Sénat d’entériner définitivement ce projet de loi. Portée par le sénateur du Loiret Jean-Noël Cardoux (LR), cette loi va « mettre fin à plus de 3 000 kilomètres de grillages qui ont dévasté les paysages de notre Sologne et dénaturé des pans entiers de nos bois et de nos forêts dans de très nombreux départements ».
Concrètement, d’ici au 1er janvier 2027, les grandes clôtures de deux mètres de haut en fil de fer et en barbelés érigées depuis 1993 devront avoir été retirées et, si elles sont remplacées, elles devront l’être par des clôtures en matériaux naturels ou traditionnels posé à 30 cm au-dessus du sol et d’une hauteur limitée à 1,20 m de façon à pouvoir certes marquer les limites de propriété.
« Mais aussi et surtout à laisser passer les animaux petits et grands qui retrouveront ainsi leur liberté comme il convient dans la nature pour les animaux sauvages » précise l’association Les Amis de Sologne qui se bat contre l’engrillagement de son territoire depuis des années.
La chasse en enclos est particulièrement visée par ce texte de loi qui interdit l’agrainage (alimentation des animaux sauvages) et l’affouragement dans des enclos de chasse hermétiques.
Le cas de la Sologne est emblématique : dans ce territoire de 5 000 km2 où abondent les étangs et les forêts giboyeuses, de riches propriétaires aux noms de Seydoux, Bouygues, Bich, Tranchant ou encore Dassault se sont créé de vastes enclos de chasse en grillageant peu à peu leurs terrains, sans jamais enfreindre la loi.
Les forêts solognotes sont aujourd’hui émiettées, balafrées par quelque 4 000 kilomètres de clôture, au sein desquelles les animaux sauvages peuvent être chassés toute l’année, sans limite du nombre d’individus tués, grâce à une dérogation du droit de la chasse.
Le député Renaissance François Cormier-Bouligeon a revendiqué un combat contre les « grands propriétaires solognots engrillageurs » : « Nous étions les David face aux Goliath ! Nous avons concerté, rassemblé et mobilisé aussi bien les chasseurs que les non-chasseurs, les promeneurs contemplatifs, les sportifs, les élus », a-t-il énuméré
De son côté, l’ASPAS, qui mène une campagne active contre la chasse en enclos depuis 2019, regrette que le texte n’interdise tout simplement pas la chasse sur des animaux maintenus en captivité, mais se satisfait tout de même des avancées annoncées.
Pour compenser l’abaissement des clôtures et inciter à leur disparition, la proposition de loi crée une contravention de quatrième classe (amende forfaitaire de 135 euros, pouvant être minorée ou majorée) pour pénétration dans une propriété privée rurale ou forestière.
« Nous regrettons la mesure compensatoire qui vise à pénaliser par une contravention les promeneurs s’aventurant dans les forêts privées : la libre circulation dans la nature vaut pour les animaux comme les humains respectueux de leur milieu ! » précise l’ASPAS
Autre ombre au tableau : « l’effacement de ces grandes clôtures aura dû être précédé par la mise en œuvre d’actions permettant à cet effacement d’être opéré en respectant l’état sanitaire, les équilibres écologiques et les activités agricoles ou forestières du territoire. Il n’est pas question de remettre en liberté ces dizaines de milliers de sangliers, chevreuils, biches et cerfs non seulement parce que nous en avons déjà trop dans les espaces libres, mais aussi parce que nous ne voulons pas mettre en contact des animaux consanguins ou des espèces exotiques avec les animaux sauvages libres. » a précisé François Cormier-Bouligeon
Il s’agit donc de savoir comment va être géré cet « équilibre écologique ».
Cette loi arrive alors que le nombre d’enclos s’étendait de plus en plus à d’autres régions, de la Picardie aux Landes, en passant par la Normandie ou la Brenne. Or, en enclos, la surpopulation artificielle de gibier à poil cause de nombreux dommages à l’écosystème forestier.
À partir d’une certaine densité, les ongulés empêchent les végétaux de se régénérer, appauvrissant la forêt, et compromettent la reproduction de certaines espèces d’oiseaux, d’amphibiens et de mammifères au sol.
Cette nouvelle loi va être un répit immense pour les forêts françaises.