En France, les produits frais ont augmenté de 18% un en an. Cette hausse des prix conjuguée à la paupérisation de la population a plongé de nombreuses personnes dans une précarité alimentaire. Face à la crise, un collectif de paysans et paysannes a lancé un mouvement de réappropriation des terres pour créer des jardins solidaires, et préparer l’autonomie de demain.
Parmi les nombreux dysfonctionnements sociétaux mis en exergue par le coronavirus, la fragilité du système alimentaire mondialisé est l’une des plus grandes inquiétudes des gouvernements et organismes internationaux qui appellent à la plus grande vigilance face aux crises alimentaires en cours et à venir.
En France, le blocage dans les échanges internationaux, la hausse de 30% des coûts du transport et la pression sur la chaîne d’approvisionnement liée aux surstocks de certains Français ont, entre autre, provoqué une augmentation des prix des produits frais de 18%.
Avec plus de 7 millions de françaises ayant subi une baisse du pouvoir d’achat, cette hausse des prix s’est traduite par une explosion des demandes en aide alimentaire, le Secours Populaire parle même d’un « tsunami de la faim ». A Nantes, par exemple, le nombre de personnes en situation de détresse alimentaire a été multiplié par quatre depuis le début du confinement ! Un collectif incite tout le monde à multiplier les jardins solidaires :
« Nous, paysans et paysannes du collectif Terres Communes, souhaitons réaffirmer les valeurs d’entraide, de partage et de transmission du savoir, en appelant à créer des jardins solidaires/partagés pour répondre à la crise alimentaire, et préparer l’autonomie alimentaire de demain, locale, solidaire et respectueuse de l’environnement. Nous appelons les paysans et paysannes des confédérations paysannes, des GAB/CIVAM et les mairies à créer des jardins solidaires, en mettant à disposition des terres agricoles, des outils, des semences, des savoirs faire et également en mobilisant les services techniques municipaux. » explique le collectif Terres Communes dans son communiqué
Heureusement, une énorme frange de solidarité s’est renforcée durant la crise sanitaire, et de nombreux jardins solidaires ont déjà émergé dans différents endroits. L’objectif : assurer l’accès à une nourriture saine aux réfugié.e.s et personnes isolées et précarisées.
Ainsi, dans les Deux-Sèvres, le collectif « Bocage à la patate » a créé dans six lieux différents des jardins solidaires pour planter et cultiver des pommes de terre, mais aussi de nombreux légumes et légumineuses. Ouvert à toutes les bonnes volontés, ils ont reçu énormément de dons de plants qu’ils pourront mettre en terre ce samedi dans un grand chantier participatif.
En Vendée, à Dompierre-sur-Yon, le collectif « Un coquelicot entre les dents » a planté un verger sur un terrain communal et vient de récupérer une nouvelle parcelle de 5000m2 pour y créer une régie municipale ainsi qu’un jardin potager solidaire.
« On a du mal à se rendre compte quand on n’est pas concerné, mais depuis le début du confinement, de plus en plus de gens n’arrivent pas à se nourrir. D’habitude nous avons 22 familles bénéficiaires et là, 3 nouvelles se sont rajoutées. On sait très bien que ce sera pire quand nous serons déconfinés. La crise va être terrible pour tous ceux qui auront perdu leur travail, les inégalités vont s’accentuer. » explique Martine Joslin, responsable de l’antenne de la Banque Alimentaire locale depuis six ans pour France3 Régions
Chez le collectif Terre Communes, à Chauvé, le paysan Hubert Morice a décidé de céder un hectare de terres aux personnes les plus démunies par la crise actuelle, afin qu’elles puisse produire leur propre nourriture. Mercredi 13 mai, le premier chantier de semis a eu lieu pour lancer le jardin solidaire.
« Ce n’est pas trop tard pour agir ! On peut encore planter, semer. Mais je ne pourrai pas coordonner toutes les bonnes volontés. Il faudrait que le relais se fasse dans chaque territoire. Il faut s’appuyer localement sur les paysans. » explique ainsi Hubert Morice à Ouest France
Une autre idée qui pourrait prendre de l’ampleur : une sécurité sociale de l’alimentation où chaque personne cotiserait pour approvisionner une carte qui lui permettrait d’acheter sa nourriture chez des agriculteurs conventionnés selon des critères sociaux et qualitatifs.
En attendant que l’Etat se décide à vraiment « rebâtir notre indépendance agricole », le collectif Terres Communes incite tout le monde, paysans et citoyens, à se réapproprier les territoires, « pour redonner du sens à notre avenir, pour faire que la crise ne soit pas subie et excluante, mais aussi pour créer des territoires solidaires, résilients et autonomes ! »