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La désobéissance végétale pour reverdir nos villes

Véritable activité politique pour ses membres, la Guerilla Green leur permet de se réapproprier l’espace public pour ne plus subir les décisions des aménageurs urbains et lutter contre la bétonisation à outrance. En France, ce sont 25m2/seconde qui sont noyés sous le béton, rien que pour les terres agricoles.

Les permis de végétaliser, c’est bien. Ne pas attendre d’étouffer sous le béton, c’est mieux. Voici un peu la philosophie de la Guerilla Green, mouvement de résistance urbaine qui végétalise l’espace public pour se réapproprier la ville. « Guerilla Green : le guide de survie végétale en milieu urbain » en donne les codes et les astuces, pour que chacun-e puisse se lancer.

Se réapproprier l’espace public urbain

A l’origine, le mouvement des « levellers et Diggers » protestait contre la privatisation des communs (les forêts, les terres arables). En 1607, au Sud de Londres, des milliers de paysans sans terre résistèrent contre l’accaparement des terres par la haute paysannerie riche en combattant leur milice et détruisant les clôtures pour récupérer les sols.

Crédit Illustration : Cookie Kalkair

Dans les années 1970, à New-York, cette résistance végétale est remise au goût du jour version urbaine avec le guerilla gardening. En pleine crise économique, des propriétaires ruinés doivent céder leur terrain à la municipalité qui les laisse à l’abandon. Des citoyen-ne-s décident alors de reverdir ces terrains en les cultivant et créant de nombreux jardins et potagers.

« Il ne faut pas confondre la Guerilla Green avec l’agriculture urbaine qui a une vocation de production, dans des lieux pas forcément accessibles au public. La Guerilla Green reprend les codes de la guerilla armée et de la street-culture avec l’idée de se réapproprier un espace public devenu hostile, mais cette fois pour une cause écologique. » explique Ophélie Ta Mère Nature, Guerillera Green, à La Relève et La Peste

Armé-e-s de bombes à graines, de pelles ou de râteaux, les Guerilleros Green sont autonomes et n’ont pas de chef, ils décident librement du bout de terre dont ils vont s’occuper plutôt que d’attendre d’avoir l’autorisation municipale de végétaliser leur rue.

En effet, végétaliser la ville est considéré comme de la dégradation d’un bien public. Cet acte de désobéissance civile interroge ainsi la légitimité de certaines législations.

Lutter contre le tout-béton

Véritable activité politique pour ses membres, la Guerilla Green leur permet de se réapproprier l’espace public pour ne plus subir les décisions des aménageurs urbains et lutter contre la bétonisation à outrance. En France, ce sont 25m2/seconde qui sont noyés sous le béton, rien que pour les terres agricoles. Avec des périodes de canicule de plus en plus importantes, végétaliser permet aussi de rafraîchir la ville et d’apporter du bien-être aux habitants.

« Il ne faut plus être victime de la situation. On sait qu’il y a une crise écologique et sociale sans précédent, et que les pouvoirs publics ne sont pas dans le quotidien des gens. On ne va pas rester les bras croisés à attendre que les choses changent. On peut, avec très peu de moyens, occuper cet espace et recréer du lien social en ville. Lors de nos actions, tous les types de classe sociale s’intéressent à ce qu’on fait, et viennent échanger avec nous, et parfois y prennent part. Il y a une vraie bienveillance de la part des habitants et des passants car ils réalisent à quel point cette action altruiste est fragile. A leur tour, ils veulent protéger la rareté de la végétation, le vivant et le beau. » raconte Ophélie Ta Mère Nature, Guerillera Green, à La Relève et La Peste

Partout en France, des guerilleros green investissent ainsi l’espace public. Même si la démarche est illégale, les arrestations restent marginales. « Difficile d’arrêter quelqu’un qui plante des fleurs ou des fruits », sourit Ophélie. Quand elles sont comestibles, les plantations de la Guerilla Green permettent également de se questionner autour de l’accès à une alimentation équilibrée pour toutes les franges de la population. Les guerilleros restent très attentifs à la pollution de l’air et des sols lorsqu’ils souhaitent planter des végétaux comestibles, mais aussi à l’accès à l’eau.

« Guerilla Green : le guide de survie végétale en milieu urbain » a ainsi été pensé par Ophélie et l’illustrateur Cookie Kalkair comme un projet hybride décliné sur un compte Instagram, des reportages vidéo et une bande dessinée qui paraîtra le 21 août en librairie, pour inciter les gens à passer à l’action en quelques étapes. Seul-e ou en groupe, repérer un lieu par lequel on passe assez souvent pour pouvoir l’entretenir sans trop de contraintes, et prendre le temps de l’observation pour choisir des plantes adaptées au sol et au climat. Parfois, il faut aussi nettoyer le lieu. Puis planter !

Laurie Debove

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