Le collectif AC de Vagues renforce la mobilisation contre le projet de surf park de Talmont-Saint-Hilaire (Vendée), à seulement 250 mètres de l’océan Atlantique. Accompagné d’experts en biodiversité, le collectif veut faire annuler la construction de cette infrastructure, qu’il considère comme une « profonde aberration ».
Voilà maintenant huit mois que le collectif AC de Vagues lutte contre un projet d’infrastructure de vagues artificielles, destiné à la pratique du surf, à seulement 250 mètres d’une plage connue pour ses vagues sublimes. Ce dimanche 9 novembre, environ 700 personnes ont manifesté pour faire entendre leur opposition à cette construction – « un record ».
Dès qu’il fut rendu public, le projet a immédiatement suscité de vives inquiétudes auprès des citoyens de Talmont-Saint-Hilaire, au regard de son opacité, de l’absence de concertation citoyenne et de ses impacts environnementaux – largement sous-évalués par les sociétés « Wavegarden » et « Mersea », qui en sont à l’origine.
Pour faire entendre leur revendication, le collectif a lancé une pétition en mai dernier et se rassemble régulièrement pour informer au mieux les citoyens quant à ce projet, qu’il qualifie de « destructeur » et « déconnecté des réalités écologiques et sociales ».
Des espèces protégées impactées
Le mercredi 5 novembre, une réunion d’information était organisée à Talmont-Saint-Hilaire. Aux côtés des représentants d’AC de Vagues, Pierrot Pantel, ancien inspecteur de l’environnement, désormais ingénieur écologue, a détaillé les études menées par des naturalistes indépendants, sollicités par le collectif.
Il déplore la non-soumission du projet à une réelle étude d’impact environnemental, et pointe du doigt la « très faiblarde étude naturaliste » menée par le pétitionnaire. Difficilement justifiable alors même que le projet borde une zone Natura 2000.
« [L’étude du pétitionnaire] a essayé d’étudier les insectes, les oiseaux, les reptiles et les amphibiens. Malheureusement, on a un très gros point noir : les chauves-souris n’ont pas du tout été étudiées », analyse-t-il.
Pour pallier ce manquement, la naturaliste Chloé Bersegeais a réalisé un inventaire sur les chiroptères présents sur et autour du site où est prévue la construction du surf park.
Malgré une période d’observation extrêmement courte – une nuit au mois de septembre – elle a recensé pas moins de sept espèces de chauve-souris, dont certaines présentent des enjeux de conservation prioritaires au niveau européen, national ou local. Toutes sont normalement protégées, ainsi que leurs aires de vie.
Pour les oiseaux, le naturaliste Antoine Lesaine a réalisé l’inventaire des populations sur le site en procédant à deux journées d’observation, en septembre et en novembre. Dans son rapport, il fait office de la présence de 19 espèces, dont 14 protégées.
De plus, certains oiseaux présentent un enjeu de préservation fort, voire très fort – à l’instar du bruant des roseaux ou du pipit farlouse. Ses observations dressent donc un tableau bien plus complexe que celui du pétitionnaire, qui ne recensait que six espèces, et qu’Antoine Lesaine qualifie de « sévèrement incomplet » dans son rapport.
Il est important de préciser que les données issues des deux rapports sont très probablement des sous-estimations, compte tenu du délai extrêmement court des observations ainsi que de la saison durant laquelle elles ont été menées.
Le droit de l’environnement pour contrer le surf park
En menant ces études indépendantes, AC de Vagues se dote d’un outil de contestation de taille. Avec l’association Surfrider Foundation Europe, le collectif a informé la Préfecture de Vendée des risques de destructions environnementales engendrés par ce projet. Par ce biais, ils imposent aux porteurs du projet l’obligation d’obtenir une dérogation de destruction d’espèces protégées.
« On lance l’alerte sur le fait qu’il y a des espèces protégées et que le porteur de projet doit obligatoirement en tenir compte. Ni le préfet, ni le porteur de projet ne peuvent dire qu’il n’y en a pas », explique Pierrot Pantel pour La Relève et La Peste.
Pour pouvoir espérer procéder au chantier en toute légalité, les porteurs de projet doivent donc obtenir cette dérogation. Pour y arriver, ils doivent notamment prouver que le projet revêt des Raisons Impératives d’Intérêt Public Majeur (RIIPM), ce qui, en l’état, n’est pas le cas. Le droit de l’environnement constitue donc un levier de poids pour entraver la construction du surf park.
En cas de non-respect de ce dernier, les sanctions prévues pour le délit de destruction d’habitat d’espèces protégées s’élèvent à une peine de trois ans d’emprisonnement et d’une amende pouvant atteindre les 750 000 €.
« Le projet tel qu’il est aujourd’hui ne peut pas se faire dans le respect de la loi, c’est une certitude. À moins d’y apporter une modification profonde, radicale et substantielle, et donc de demander un nouveau permis de construire, ça n’est pas possible », conclut Pierrot Pantel.
Face à ces éléments, AC de Vagues appelle les autorités à prendre leurs responsabilités : faire respecter le droit et empêcher toute ouverture de chantier. Cet arrêt immédiat du projet est, selon le collectif, la condition préalable à un dialogue apaisé, à l’heure où la contestation ne cesse de grandir.
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