Après la censure par le Conseil constitutionnel de la réintroduction de l’acétamipride, Emmanuel Macron a promulgué la loi dite « Dulomb » ce mardi 12 août. Elle ouvre grand la voie aux méga-bassines et à l’élevage ultra-intensif, au détriment de l’environnement.
Porté par le sénateur Laurent Duplomb (Les Républicains), ce texte « visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur » a créé de véritables polémiques pendant des mois en France. La cause : les importants reculs environnementaux qu’elle entraîne.
La disposition la plus contestée a été censurée par le Conseil constitutionnel. En application de la Charte de l’environnement inscrite depuis 2005 dans la Constitution française, les Sages ont interdit la réintroduction d’un pesticide interdit de la famille des néonicotinoïdes, l’acétamipride. Cependant, Laurent Duplomb envisage déjà une nouvelle proposition de loi tenant compte des critères imposés par l’institution.
Surtout, le Conseil constitutionnel a laissé passer d’autres mesures tout aussi problématiques pour l’environnement comme les simplifications administratives accordées aux plus gros élevages pour faciliter l’agrandissement ou la construction de bâtiments d’élevage de porcs ou de volailles.
« La loi Duplomb va à l’opposé de ce qu’il faudrait faire », décrypte Philippe Pointereau, président de la fondation Terre de Liens pour La Relève et La Peste. Agronome et co-fondateur de Solagro, Philippe Pointereau a participé à l’élaboration du scénario Afterres2050, un scénario de prospective agricole et alimentaire.
« Le scénario Afterres2050 préconise de réduire les cheptels par deux en privilégiant les élevages les plus vertueux : les systèmes ruminants à l’herbe qui sont autonomes et biologiques, et pour les monogastriques comme les volailles des élevages en plein air »
Or, les fermes-usines favorisées par la loi Duplomb sont à l’origine de pollutions de l’eau, de l’air, des terres, et rejettent massivement des gaz à effet de serre. La Bretagne est déjà dramatiquement contaminée par les algues vertes à cause de l’élevage intensif porcin.
De surcroît, la loi Duplomb va faciliter la construction d’ouvrages de stockage d’eau à finalité agricole, c’est à dire de méga-bassines dont l’utilisation menace les nappes phréatiques comme cela s’est déjà passé en Espagne.
« La loi Duplomb veut irriguer alors qu’on n’a plus d’eau ! Aujourd’hui, la moitié de la France est en restriction d’eau, précise Philippe Pointereau. Les retenues d’eau qui sont construites devraient être publiques et pas privées. Avec les méga-bassines, on en construit essentiellement pour des agriculteurs privés qui auront un accès à l’eau acquis par des subventions publiques. Cela devrait être à l’État de privilégier l’usage de l’eau »
Maigre consolation, les retenues d’eau de la Loi Duplomb ne doivent pas faire de prélèvement dans des nappes inertielles – qui se vident ou se remplissent lentement – et devront pouvoir être contestées devant un juge.
Face aux menaces environnementales et sanitaires, la Loi Duplomb avait été vivement contestée par la communauté scientifique et la société civile. Une pétition réclamant son abrogation avait réuni plus de 2,1 millions de signatures.