De nouvelles fortes chaleurs sont attendues, alors que les centres de soins de la faune sauvage sont déjà saturés. Les martinets et les hirondelles sont les premières victimes de la chaleur.
Le 2 juillet, alors que la France connaissait une vague de chaleur précoce, le centre Faune Alfort, seul centre d’Ile-de-France à prendre en charge toutes les espèces, a accueilli 191 animaux en une seule journée, un record.
« Il s’agissait pour les trois quarts de martinets », raconte Céline Grisot, directrice de Faune Alfort, pour La Relève et La Peste. « La canicule est arrivée très tôt, au moment où les oisillons sont encore dans les nids. Or cet oiseau niche sous les toits, où c’est une vraie fournaise, ce qui pousse les oisillons à se jeter du nid pour ne pas griller sous les toits. »
La température des nids peut atteindre 60 °C. Les martinets sont des oiseaux migrateurs, constamment dans les airs, qui ne se posent jamais au sol. De fait, si la chute du nid n’entraîne pas de blessure particulière, les petits sont condamnés car leurs parents ne sont plus mesure de s’en occuper.
« C’est un oiseau qui est compliqué à prendre en charge, car il est extrêmement fragile et incapable de manger seul. Nous en avons 300 qu’il faut gaver un par un, avec au moins quatre tours de nourrissage par jour », raconte Céline Grisot.
Grâce aux soins apportés par les équipes et à une préparation au vol, la plupart des martinets pourront retrouver le chemin de la liberté, avant la migration fin août.
Même son de cloche du côté du centre Paloume dans les Landes, qui accueille toutes les espèces d’oiseaux présentes en France, les mammifères de moins de 6 kg et les tortues. En plus des martinets, ce centre a également accueilli un grand nombre d’hirondelles, davantage présentes dans les campagnes, au moment des fortes chaleurs.
« Les martinets vont généralement utiliser les grands bâtiments pour faire leurs nids, mais ce n’est pas le cas des hirondelles qui fabriquent leurs propres nids avec de la boue. Et la sécheresse fragilise les nids, qui peuvent se casser, entraînant la chute des juvéniles », explique Laure Labarthe, directrice du centre Paloume, pour La Relève et La Peste.
Une fois au sol, comme pour les martinets, les parents ne peuvent plus s’en occuper.
« La sécheresse peut aussi conduire les adultes à parcourir des kilomètres pour trouver de la boue, ce qui les épuisent et les empêchent de nourrir correctement les petits », ajoute-t-elle.
Martinets noirs juvéniles recueillis – Crédit : Centre Faune Alfort
La sécheresse impacte toute la chaîne alimentaire
Les busards ont également subi de plein fouet les récentes fortes chaleurs. « Il s’agit d’une espèce extrêmement vulnérable, qui niche dans les champs de culture », explique Céline Grisot.
« Les agriculteurs sont censés y faire attention sous peine d’amende et ils sont des plus en plus sensibilisés, mais tous ne jouent pas le jeu. Du fait de l’alerte canicule, les agriculteurs ont fauché leur culture plus tôt que prévu pour éviter la sécheresse, perturbant de nombreux nids et laissant les oisillons en plein cagnard, car non protégés par les hautes herbes. »
Grâce au travail des associations comme Pie verte bio 77, qui répertorient et protègent les nids, Faune Alfort a pu prendre en charge les bébés busards et même des œufs.
La sécheresse impacte également toute la chaîne alimentaire : le manque de céréales perturbe l’alimentation des rongeurs, ce qui va perturber l’alimentation de ceux qui s’en nourrissent comme les rapaces…
« Le manque d’eau peut aussi conduire à un arrêt momentané de la reproduction », ajoute Laure Labarthe pour La Relève et La Peste.
Par chance pour la survie de ces oisillons, leur maman hirondelle a pu les suivre. – Crédit : Centre Paloume
Les pertes d’habitat occasionnées par l’homme réduisent aussi considérablement les zones d’ombre, mais aussi les possibilités de lieux de nidification. Céline Grisot plaide pour repenser les villes en tenant compte de la faune sauvage, avec notamment des cavités dans les immeubles pour que les oiseaux puissent y nicher.
Pour aider la faune sauvage à surmonter les grosses chaleurs, des gamelles d’eau peuvent être disposés dans les jardins, en prenant soin de changer l’eau et de désinfecter régulièrement pour limiter le risque de contamination. Ces gamelles sont à disposer le plus éloigné possible des passages humains et surtout à vue, dans des endroits dégagés, pour que les oiseaux puissent repérer les chats de loin. On peut aussi installer un petit bac de boue dans son jardin pour aider les hirondelles à reconstruire.
Pour ceux qui le peuvent, « les mares sont magiques pour la biodiversité », note Céline Grisot, qui appelle également à aménager des zones où laisser la nature faire dans les jardins et les parcs.
Le changement climatique lié aux activités humaines, en plus d’augmenter l’intensité et la fréquence des canicules, chamboule aussi le rythme des animaux. « On voit par exemple des hérissons qui mettent bas au mois de novembre : les petits ne passeront pas l’hiver », illustre Céline Grisot pour La Relève et La Peste.
Si l’impact des canicules est majeur pour les martinets et les hirondelles, « 95 % des animaux que l’on reçoit sont victimes des activités humaines, en particulier d’accidents, de chocs avec des véhicules ou des vitres », souligne la directrice de Faune Alfort.
La prédation des chats est également en cause chez les oiseaux. Les soigneurs rappellent qu’il faut toujours appeler un centre de soins avant d’agir, lorsque l’on trouve un oiseau au sol.
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