Dans le Finistère a eu lieu une manifestation inédite « contre l’empire Bolloré », à l’appel des Soulèvements de la Terre (SDLT) et du collectif Lever les Voiles. Sur terre et en mer, ce sont environ 2 500 personnes qui ont bravé vent, marées, et interdiction administrative pour dénoncer le rôle du milliardaire dans la montée du fascisme en France, ainsi que ses activités désastreuses pour l’environnement.
Le choix du lieu n’est pas anodin. Le territoire porte les stigmates des convoitises du milliardaire, où la famille Bolloré est solidement implantée. Entre son île privée du Loc’h dans l’archipel des Glénan, son manoir sur la pointe du Beg Meil ou encore ses usines à Ergué-Gabéric, le paysage local reflète l’empreinte tentaculaire de son emprise économique et foncière.
Une armada contre l’empire Bolloré
Dès le vendredi, l’opération est en marche. Une flottille féministe et antifasciste en mixité choisie s’est élancée à l’assaut de l’île du Loch. Visiblement pris de cours par ce commando arc-en-ciel, ni la police, ni la sécurité privée – et néo-nazie – de Bolloré ne sont intervenues, permettant aux militant.e.s de clamer haut et fort leurs revendications féministes, queer, antifascistes et anti-capitalistes.
Le lendemain matin, le son d’une corne de brume marque le départ officiel de ce week-end de lutte. L’objectif initial est le même que celui du cortège féministe de la veille, mais une présence policière importante et les interdictions de la préfecture, faisant planer le risque de “peines délirantes”, a incité les militants – marins et terrestres – à se rassembler sur la plage du Cap Coz. L’occasion pour les collectifs présents de réaffirmer leur opposition aux idéaux fascistes et climaticides du milliardaire.
Organisé dans le cadre de la campagne “Désarmer Bolloré”, initiée à l’été 2024 par les SLDT, ce rassemblement s’inscrit dans la continuité de plusieurs mois de mobilisation, durant lesquels ont émergé de nombreuses initiatives ciblant le milliardaire et son empire.
« Les idées fascistes n’émergent pas par elles-mêmes dans le débat public, mais sont poussées par les médias appartenant à Bolloré. Pour ce faire, ce dernier s’appuie sur sa fortune fondée sur un complexe industriel qu’il a bâti sur le dos de l’environnement et en pillant le continent africain », explique Benoît Feuillu auprès de Médiapart.
Après un fest noz improvisé, où se mêlent danses et chants antifascistes, les quelque 70 embarcations sont reparties en mer pour porter leurs revendications sur les flots, colorant l’horizon de drapeaux palestiniens, kanaks, et de banderoles ciblant directement le milliardaire et son empire.
Un village d’irréductibles antifascistes
En parallèle, le village antifasciste, installé à Guiscriff, a vu arriver des centaines de militants, venus apprécier les diverses activités organisées pour l’occasion. Conférences et tables rondes se sont multipliées avec un objectif clair : exposer l’empire Bolloré et bâtir un réseau de solidarité pour faire front contre sa présence et ses projets fascistes en Bretagne et dans le reste du monde.
Il s’agissait par ce biais de mettre en lumière la concentration médiatique opérée par le milliardaire afin de questionner l’impact de cette mainmise sur la liberté d’expression et le pluralisme dans la presse. En donnant la parole à des journalistes indépendants, les échanges ont visé à renforcer les alternatives existantes face aux logiques capitalistes et réactionnaires qui traversent le paysage médiatique, que Bolloré s’accapare progressivement depuis des années afin de faire de ses idées un programme de société.
Les fondements coloniaux des activités industrielles du groupe ont également fait l’objet d’une conférence, dénonçant “l’exploitation de la nature et des êtres humains, les jeux d’influence sur les élections et les marchés frauduleux” dont Bolloré est accusé et pour lesquels il se retrouve régulièrement devant la Justice.
En exposant ses activités sur le continent africain, l’intention était d’établir la nécessité de construire une solidarité internationale, capable d’articuler écologie, justice sociale et lutte contre l’extrême droite. Ce week-end de rencontres et de discussions revêt une importance singulière, tant par l’élan collectif qu’il a suscité que par la nécessité de faire face à l’extrême droitisation du paysage médiatique français — un basculement idéologique dont l’empire Bolloré incarne l’un des principaux vecteurs.
Une démonstration collective de force et de créativité face à un empire qui, malgré ses moyens colossaux, ne fait plus illusion. La contestation lève les voiles pour de bon, bien décidée à tenir son cap face au milliardaire.