Une étude scientifique publiée le 12 juillet 2023 dans la revue britannique Nature confirme que la planète bleue change progressivement de couleur, se dirigeant vers le vert. L’étude a été menée entre juillet 2002 et juin 2022. Le phénomène est surement lié au réchauffement climatique, et a des conséquences pour toute la chaine trophique marine, ainsi que le stockage de dioxyde de carbone.
Le changement a été observé sur les vingt dernières années par le satellite Modis de la Nasa, mis en orbite en 2002. La zone d’observation s’est portée sur 56 % de la surface océanique, entre les latitudes 40 ° nord et 40 ° sud, un endroit assez stable sur le plan climatique. Plus de la moitié de la surface globale des océans a lentement tourné au vert, vraisemblablement à cause des changements de températures.
L’auteur principal de l’étude, B.B. Cael, climatologue et océanologue, a commenté : « Nous impactons l’écosystème d’une manière qui n’a encore jamais été observée auparavant. »
Les variations naturelles et annuelles de la production de phytoplancton ne peuvent pas expliquer le phénomène. Si la raison du changement n’est pas complètement claire, le mode de vie moderne des êtres humains a eu un impact évident.
Les chercheurs ont comparé leurs résultats à ceux donnés par un modèle développé il y a quelques années, qui simulait l’évolution de la couleur des océans en fonction de nos émissions de gaz à effet de serre. Les prévisions du modèle se sont avérées similaires aux données recueillies sur la période observée par les chercheurs.
Le phénomène pourrait plus spécifiquement être lié au réchauffement des couches supérieures océaniques. Ces dernières deviennent plus stratifiées avec le réchauffement climatique, rendant ainsi difficile la remontée à la surface des micronutriments. En présence de moins de nutriments, il est possible que de plus petits phytoplanctons survivent plus facilement que des grands, ce qui change la couleur de l’eau.
Différents types de planctons reflètent et absorbent la lumière de différentes façons. Cela signifie un changement des propriétés de l’eau, et donc de son écosystème.
B.B. Cael a spécifié pour le magazine Vice : « Si le facteur [de réflexion] change, l’écosystème change également, même s’il est difficile de dire avec précision de quelle façon, compte tenu du statut actuel de nos connaissances sur les écosystèmes de plancton. Ces changements de couleur peuvent signifier un changement de plus petits à de plus grands planctons, de plus ou moins de prédateurs ou de proies, [ou bien encore] d’autres types de plancton qui impactent le stockage du carbone ou la pêche différemment. »
En d’autres termes, le changement de couleur de l’océan induit un bouleversement dans les équilibres du réseau trophique marin. Le phytoplancton est le premier maillon de la chaîne dans l’écosystème marin. Il nourrit les zooplanctons, qui sont consommés par des petits prédateurs, qui eux sont mangés par de grands prédateurs.
Il faudra au moins 40 années d’observation pour préciser la tendance. En janvier 2024, la NASA va appuyer ses recherches avec le lancement d’un autre satellite nommé PACE (Plankton, Aerosol, Cloud, ocean Ecosystem), entièrement dédié à l’observation des océans.
Les scientifiques précisent cependant que peu importe la tendance, le changement aura inévitablement un impact écologique. La lumière étant un facteur clé dans les communautés de phytoplancton, tout changement de l’environnement lumineux, d’un point de vue optique ou de sa disponibilité dans l’océan, conduira à un changement dans l’écosystème marin.
Cela peut ainsi impliquer un changement pour les niveaux trophiques supérieurs et donc la pêche, ainsi que la capacité du phytoplancton à stocker le dioxyde de carbone.