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4 députés ont déposé une proposition de loi pour imposer le retour de la consigne de verre en France

Ils veulent notamment créer une obligation de reprise du verre réemployable et de commercialisation des produits consignés dans les grandes surfaces d’ici 2025 ; et rétablir l’obligation de la consigne du verre pour les cafés, hôtels et restaurants.

Las des promesses gouvernementales non-tenues quant à la mise en place d’une consigne du verre pour réemploi, quatre députés de divers horizons politiques ont déposé, début octobre, une proposition de loi à l’Assemblée nationale. Au programme : rehaussement des objectifs et généralisation de la consigne pour les secteurs clés.

La bête noire du volontariat

Depuis 2020, la question de la consigne pour réemploi est revenue sur la table des décideurs politiques. D’abord avec la loi AGEC, qui fixe dans le code de l’environnement un objectif – volontaire – de réemploi de contenants à 10 % en 2027 et met sur pied un observatoire en charge d’évaluer son application.

Puis avec les annonces de Bérangère Couillard, ancienne secrétaire d’État chargée de l’Écologie, qui a déclaré en juin dernier vouloir mettre en place « une obligation pour les supermarchés et les hypermarchés de reprendre les contenants en verre » d’ici deux ans.

Mais si les acteurs associatifs, économiques et politiques engagés sur le sujet ont jugé cette décision encourageante, ils craignent cependant que la généralisation de la consigne pour réemploi ne voie jamais le jour, fautes de sanctions la rendant véritablement contraignante.

Un constat également relayé par Charlotte Soulary – responsable plaidoyer chez Zéro Waste France –, qui déplore ne voir « que des occasions manquées et le retard s’accumuler ».

Pour des objectifs plus ambitieux et contraignants

C’est là tout l’enjeu de la proposition de loi déposée par Charles Fournier, Maxime Laisney, Stéphane Delautertte et Hubert Wulfranc. Souhaitant faire de l’économie circulaire non plus l’alternative mais bien la norme, les députés entendent amorcer un changement paradigmatique.

Comment ? En abandonnant le principe du volontariat pour rendre la consigne pour réemploi obligatoire et contraignante. D’autant plus que, plébiscitée par près de 90 % de la population d’après un récent sondage l’IPSOS, celle-ci fait largement consensus.

Pour ce faire, les auteurs du texte proposent, en autre : de rehausser les objectifs de réemploi des emballages mis à disposition sur le marché à 20 % en 2027, 40 % en 2035 et 50 % en 2040 ; de créer une obligation de reprise du verre réemployable et de commercialisation des produits consignés dans les grandes surfaces d’ici 2025 ; et de rétablir l’obligation de la consigne du verre pour les cafés, hôtels et restaurants. Le tout, appuyé par des financements publics et des mécanismes de sanctions suffisamment importants pour être incitatifs.

C’est donc un signal fort de la part de l’État qui est attendu en direction des marchés, car sans soutien politique, la transition écologique ne pourra se faire.

Pour Éric Vesine – chef du service des politiques territoriales de l’ADEME – l’État doit jouer un rôle fondamental : il doit sensibiliser les citoyens et entreprises, assurer le fonctionnement du système de collecte en termes d’accessibilité et de proximité, gérer les lieux de stockage, la standardisation des bouteilles…

Un modèle qui a déjà fait ses preuves…

Heureusement, l’État peut s’appuyer sur un réseau de collecte, stockage et traitement préexistant. C’est que, pendant des décennies, la consigne du verre a été largement répandue en France.

En 1938, celle-ci a même été rendue obligatoire ! Les consommateurs, lors de l’achat de produit contenu dans des bocaux en verre, payaient alors un surplus qui leur était restitué lorsqu’ils rapportaient les emballages vides en magasin.

Ce fut sans compter l’essor de la société de consommation de masse qui, dans les années 1970, a érigé l’emballage unique en porte-étendard de la modernité. Baptiste Monsaingeon, auteur d’Homo detritus : critique de la société du déchet, abonde également dans ce sens :

« La ‘jetabilité’ devient un argument récurrent de vente aux lendemains de la guerre : le fait de mettre à la poubelle est bien plus qu’un moyen de simplifier le quotidien, c’est désormais un véritable ‘art de vivre’».

Au début des années 1990, face à l’augmentation des déchets et sous la pression des entreprises les pouvoirs publics ont mis en place le dispositif de « responsabilité élargie du producteur ».

Grâce à celui-ci, les entreprises produisant des déchets doivent dorénavant participer à leur gestion en versant une contribution financière aux collectivités territoriales. Problème : comme les collectivités locales perçoivent moins qu’elles ne payent pour collecter le verre, la différence se répercute au niveau de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères imputable aux contribuables.

C’est donc le glas de la consigne pour réemploi qu’a sonné l’apparition du principe de pollueur-payeur. Et ce, au profit du 100 % jetable… qui avoisine pour le verre près de 45% des emballages ménagers, d’après une étude de l’ADEME (2018).

Une solution plus vertueuse que le recyclage

De leur création via l’extraction du sable – activité responsable de près de la moitié des émissions de gaz à effet de serre d’après l’ONU – à leur traitement en phase de déchet, ces emballages accusent un bilan carbone particulièrement élevé.

Or, de nos jours, dans un contexte d’urgence climatique  et de tension maximale sur les prix de l’énergie, le réemploi présente des avantages considérables, ne serait-ce que par rapport au recyclage.

C’est ce que souligne la dernière étude de l’ADEME (2023), selon laquelle « le réemploi d’une bouteille permettrait de diminuer drastiquement les consommations d’énergie (de l’ordre de 79 %), de CO2 (76 %) et d’eau (59 %) par rapport à la production d’une bouteille ».

Pourquoi ? Car « quand une bouteille en verre est recyclée, elle est brisée et fondue » dans des appareils chauffés à plus de 1 500 degrés afin qu’un nouveau contenant soit créé, comme nous vous l’apprenions sur La Relève et la Peste.

Alors que dans le cas du réemploi, les matériaux traités sont réutilisés à des fins identiques à celles pour lesquelles ils ont été conçus. Il y aurait ainsi « un avantage systémique pour l’option réemployable concernant le verre, et ce, dès deux à quatre utilisations » étaye l’exposé des motifs de la proposition de loi.

Surtout que les bouteilles peuvent être réemployées en moyenne jusqu’à 19 fois, comme en atteste l’exemple de la brasserie alsacienne Meteor.

Plus globalement, en matière de consigne du verre, l’Alsace fait figure d’exemple en France : tandis qu’au niveau national la pratique périclitait, elle est restée relativement implantée dans la région frontalière à l’Allemagne.

Environ 35 % des emballages en verre utilisés dans le secteur de l’hôtellerie-restauration sont consignés, 30 % des magasins disposent de points de collecte, et un réseau régional – Alsace Consigne – visant à systématiser l’initiative a été mis au point en 2019. Résultat : ce sont près de 25 millions de bouteilles en verre réemployées qui sont vendues chaque année dans le Haut-Rhin et le Bas-Rhin.

Ainsi, des solutions – nationales ! – existent. Encore faut-il que la volonté politique de ces quatre députés ne soit pas dénaturée et se traduise en actes, tant le processus législatif et long et tortueux…

SOURCES : « Étude. Réduction, réemploi et recyclage des emballages ménagers », ADEME, 26/06/2023 /« Les français et la consigne des emballages boissons », IPSOS, 16/05/2023 / « Notre utilisation du sable nous met le dos au mur, avertit le PNUE », ONU, 27/04/2022 / « Étude. La consigne du verre pour réemploi », ADEME, 22/11/2018 /Proposition de loi n°1762, Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 octobre 2023.

Gaelle Welsch

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