Depuis l’été 2021, la France subit une sécheresse météorologique préoccupante. Alors que cet hiver était censé permettre de recharger les nappes et les sols, c’est tout l’inverse qui se produit, faisant craindre le pire pour l’eau cet été. La pluviométrie des trois prochains mois sera cruciale pour le pays.
Cela fait désormais 14 mois que la France a soif. Depuis août 2021, c’est un cortège de mois déficitaires en pluviométrie qui défile – à l’exception des mois de décembre 2021, juin 2022 et septembre 2022 – et février ne fait malheureusement pas exception au phénomène.
Alors que la pluie était ardemment attendue cet hiver pour recharger les sols en eau, voilà trente jours qu’il n’a pas « plu » sur la métropole « à cause d’un anticyclone solidement installé » précise MétéoFrance. On parle de jour sans pluie quand le cumul des précipitations agrégé sur la France est inférieur à 1mm.
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Le pays enchaîne les records inquiétants : « le dernier record hivernal était de 22 jours sans pluie en 1989. La plus longue période sans pluie qu’a connu la France tous mois confondus, avait duré 31 jours, entre le 17 mars et le 16 avril 2020. L’hiver 2023 figurera parmi les 10 hivers les moins arrosés depuis 1959 ».
Dans les plaines comme en montagne, les précipitations sont bien trop faibles. L’enneigement des massifs pyrénéens et alpins est ainsi nettement inférieur à ce qu’on observe habituellement à cette saison. La durée de la couverture neigeuse dans les Alpes est désormais inférieure de 36 jours à la moyenne habituelle – une baisse « sans précédent » au cours des 600 dernières années – selon des recherches récentes.
Or, la neige des montagnes, en fondant au printemps, permet une alimentation supplémentaire en eau des rivières proches des montagnes, tandis que l’hiver permet habituellement aux sols de se gorger d’humidité, aux nappes souterraines et rivières de retrouver leurs niveaux habituels. Sans cette « période de recharge », ce manque de pluie risque d’avoir des conséquences terribles s’il continue au mois de mars.
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« La problématique, c’est le niveau des nappes phréatiques. Si les deux premiers mètres des sols agricoles étaient gorgés d’eaux, on n’aurait jamais parlé de cette sécheresse de février » décrypte l’agrométéorologue Serge Zaka
Actuellement, plus des trois quarts des nappes phréatiques françaises demeurent sous les normales mensuelles. Et 25% d’entre elles sont à des niveaux très bas par rapports à la mi-février.
« Les nappes phréatiques garantissent de passer l’été sereinement. C’est comme une bombe à retardement : si les nappes phréatiques ne sont pas rechargées d’ici le mois d’avril, il risque progressivement de ne plus y avoir d’eau du tout et donc des restrictions en été. Il ne reste que quelques semaines pour recharger les nappes. À partir du moment où les bourgeons des végétaux s’ouvrent, l’essentiel de l’eau qui tombe sur le sol va être utilisé par les racines des végétaux. Et donc très peu d’eau va s’infiltrer jusqu’aux nappes phréatiques » continue l’expert en agroclimatologie
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L’été dernier, la sécheresse a entraîné des pénuries d’eau dans certains départements : une centaine de communes avaient dû être alimentées en eau par camions-citernes car elles n’avaient plus d’eau potable. Cet hiver, les Pyrénées-Orientales et la majorité du Var subissent déjà des restrictions d’usage de l’eau, selon le site gouvernemental Propluvia.
Le manque d’eau a aussi un impact sur le fonctionnement de notre société thermo-nucléaire notamment sur la plupart des sources énergétiques s’alimentant en eau comme le nucléaire et les barrages hydroélectriques.
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Cela fait des années que nous lançons l’alerte sur le visage que prend le dérèglement climatique en France : des sécheresses à répétition. Aujourd’hui, nous y sommes et le phénomène risque malheureusement de s’aggraver. Une étude scientifique parue dans Environnemental Research Letters vient de démontrer que la sécheresse de 2022 en France est bien, principalement, le résultat du changement climatique lié aux activités humaines.
Cette sécheresse se voit partout dans les paysages : sols craquelés, fleuves et cours d’eau déjà à sec – en hiver ! -, départs de feux… Désormais, les météorologues ont les yeux rivés sur les prévisions de mars dont la pluie, ou pas, sera déterminante pour cet été. Habitués au confort de l’eau qui coule du robinet, les français vont apprendre à danser de joie sous la pluie lorsqu’elle arrive.