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Violences Policières : une trentaine de personnes portent plainte contre le Préfet de Police de Paris, Didier Lallement

Utopia 56 signale que la plainte déposée contre les trois préfets « se fonde sur des dizaines de témoignages » et a pour objectif de « dénoncer la stratégie de l’État à l’égard des populations exilées et de leurs soutiens, ainsi que le caractère prémédité et systémique des violences perpétrées ».

Jeudi 6 mai, une trentaine de personnes ont porté plainte contre Didier Lallement, préfet de police de Paris, Georges-François Leclerc, préfet de Seine-Saint-Denis et Marc Guillaume, préfet d’Île-de-France, pour les deux expulsions de camps de migrants et d’exilés qui ont eu lieu les 17 et 23 novembre 2020 en région parisienne.

Le « cycle infernal des expulsions »

Déposée auprès du procureur de la République de Paris, cette plainte collective comporte les trois chefs de « complicité de violences volontaires, complicité de destruction, dégradation et détérioration d’un bien appartenant à autrui, et vol en bande organisée », ont indiqué Utopia 56 et Enfants d’Afghanistan et d’ailleurs, les deux associations d’aide aux migrants à l’origine de la procédure.

Comptant une somme de 34 requérants, parmi lesquels 17 exilés, des bénévoles associatifs, des élus locaux ou parlementaires et un journaliste, la plainte à l’encontre des trois préfets a été redoublée d’une seconde plainte contre X pour « violence volontaire par des personnes dépositaires de l’autorité publique ».  

Très médiatisés, les faits se sont déroulés l’année dernière, à l’automne. Le 17 novembre, les forces de l’ordre se rendent à Saint-Denis pour évacuer un campement de migrants de 2 800 personnes, qui s’étaient progressivement installées depuis le mois d’août sous une bretelle autoroutière, à deux pas du Stade de France.

Cette opération de démantèlement, la soixante-cinquième de ce type depuis 2015, a pour but de dissocier les « réguliers » des « irréguliers », afin de mettre les uns « à l’abri » et renvoyer les autres du territoire, selon la préfecture. Au cours de la matinée, des gaz lacrymogènes sont tirés et une violente charge de la police laisse un migrant inconscient.

En réponse à ce qu’une trentaine d’associations, dont la Cimade, Emmaüs et Médecins du monde, qualifient de « cycle infernal des expulsions » et de « harcèlement policier », Utopia 56 organise, le 23 novembre, un rassemblement pacifique de migrants et d’exilés place de la République, à Paris, pour réclamer une meilleure prise en charge de l’État et de plus nombreuses places d’hébergement.

À la tombée du jour, des centaines de tentes bleues sont disposées en rang sur la place, en présence d’avocats, de journalistes et de multiples élus venus apporter leur soutien. Des migrants sont censés y passer la nuit. Mais une heure à peine après son installation, ce dispositif est violemment évacué par les forces de l’ordre.

Les tentes sont arrachées et jetées dans un camion ; migrants, bénévoles, élus et journalistes sont dispersés à coups de matraque et de gaz lacrymogènes, avant que la poursuite ne continue çà et là jusqu’au cœur de la capitale, donnant lieu à des scènes de violence, dont certaines se terminent aux portes de Paris, notamment à Aubervilliers.

Largement diffusé sur les réseaux sociaux, cet épisode a suscité une indignation partagée par le gouvernement lui-même.

Répression systémique et chasse à l’homme

Utopia 56 signale que la plainte déposée contre les trois préfets « se fonde sur des dizaines de témoignages » et a pour objectif de « dénoncer la stratégie de l’État à l’égard des populations exilées et de leurs soutiens, ainsi que le caractère prémédité et systémique des violences perpétrées ».

Le dossier a été confié à plusieurs avocats, dont maître Raphaël Kempf, qui parle quant à lui « d’une espèce de chasse à l’homme de la part des forces de l’ordre à l’endroit des migrants », qui aurait duré des jours à divers endroits de la région parisienne.

Dans une interview donnée au Média, l’avocat explique que les deux déploiements policiers, en particulier celui du 23 novembre, étaient complètement disproportionnés, compte tenu de la situation, et que la confiscation des tentes et du reste du matériel appartenant aux exilés constitue au regard de la loi « un vol en bande organisée » avec préméditation.   

« Cette préméditation, a développé Raphaël Kempf, nous en avons la preuve à travers le choix de faire venir un camion vide, qui n’était destiné qu’à récupérer du matériel dont la police savait qu’il ne lui appartenait pas. »

Preuve supplémentaire de « l’élément intentionnel », le préfet de Paris aurait déclaré, lors du démantèlement du 23 novembre, qu’il était selon lui « absolument nécessaire que ces camps soient traités [nous soulignons, ndlr] et surtout ne se reconstituent pas »

Le dépôt de plainte et l’instruction du dossier, si le procureur de la République s’en saisit, risquent d’exiger beaucoup de temps, « puisqu’il va falloir identifier un certain nombre de personnes, voir comment ces évacuations sont préparées », conclut l’avocat qui s’est spécialisé dans la dénonciation des états d’urgence successifs et l’aide aux victimes de la répression d’État.

Pour les associations et certains élus soutenant ce combat, les démantèlements des 17 et 23 novembre dernier participent d’une répression systémique, visant non seulement à harceler et humilier les exilés qui cherchent à trouver refuge sur notre territoire, mais aussi à empêcher ceux qui souhaiteraient y parvenir.

« On le constate aux frontières, à Paris, à Calais, en Italie, en Grèce, en Serbie… Il y a l’orchestration d’une politique de non-accueil et les exilés qui la subissent, en plus de leur parcours migratoire traumatisant, sont au bout du rouleau », a par exemple confié Charlotte Kwantes, coordinatrice nationale d’Utopia 56, au journal Mediapart.

Crédit photo couv : Jerome Gilles / NurPhoto / NurPhoto via AFP

Augustin Langlade

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