De septembre 2024 à juin 2025, l’ASBL As Bean mène un projet de Sécurité Sociale Alimentaire auprès de 70 étudiant.e.s de l’Université Libre de Bruxelles
Pour qui ? Pour quoi ?
Face à l’augmentation de la précarité alimentaire, et à la situation alarmante des agriculteur·rices, différents collectifs composé de citoyen·nes, chercheur·ses et producteur·trices se sont mis à travailler sur le principe de Sécurité Sociale de l’Alimentation (SSA). L’idée de la SSA est de développer une nouvelle branche de la Sécurité Sociale afin de permettre un accès à une alimentation de qualité et choisie pour tous et toutes, tout en soutenant la transition de nos systèmes alimentaires.
La population étudiante est un public largement touché par la précarité alimentaire avec 28% des étudiant·es vivant une situation d’insécurité alimentaire, comme en témoignent Cécilia et Tess, deux étudiantes participant à ce projet :
« j’ai eu un peu d’instabilité à la fin de l’année par rapport à mon job étudiant (et en conséquence, mon entrée d’argent) et au moins j’avais la « tranquillité d’esprit » de me dire qu’au moins j’avais mes 100 euros fixes qui tombaient tous les mois. » (Cécilia, étudiante), « j’avais un début de TCA l’année dernière, à cause de la pression financière. Là, avec les 100 euros, je suis plus à l’aise et j’ai repensé mon alimentation. Je me force à manger mieux et je reprends du plaisir avec les aliments, car j’ai accès à plus de nourriture bio et équilibrée. Je dirais que c’est surtout de la dignité que ça m’a apporté. » (Tess, étudiante)
Crédit photo : Mathieu Paulus
Le principe de l’expérimentation
Septante étudiant·es, sélectionné·es pour représenter la diversité économique de la population étudiante, reçoivent 100€ par mois durant l’année académique pour leurs courses alimentaires. En parallèle, ils et elles assistent à un cycle d’ateliers qui a pour objectif de donner des clés d’informations concernant les systèmes alimentaires, pour qu’ in fine chacun.e puisse se créer sa propre opinion par rapport à ceux-ci. La question de la démocratie alimentaire est remise au centre. Lors de ces ateliers, les étudiant·es délibèrent et décident ensemble des lieux dans lesquels iels s’autorisent à aller dépenser leurs 100€ mensuels.
Enfin, les ateliers ont aussi pour but d’établir collectivement des revendications et pistes d’actions pour améliorer l’accès à une alimentation choisie et de qualité pour les étudiant.e.s. Au point de se reconnecter avec l’engagement, comme le raconte Cécilia, « Elle m’a permis d’apprendre plein de choses, de devenir plus consciente de ma réalité, de reconnecter avec la partie la plus engagée et militante de moi-même (laquelle j’ai dû mettre en pause à un certain moment de ma vie parce que, au bout d’un moment, le poids du monde est trop lourd et qu’on doit lâcher prise de certains trucs). »
Crédit photo : Mathieu Paulus
Un suivi scientifique
Cette expérimentation fait l’objet d’un suivi scientifique mené par le Centre d’Etudes Economiques et Sociale de l’Environnement (le CEESE), durant lequel les étudiant·es répondent à des questionnaires et participent à des entretiens individuels et collectifs orchestrés par ce même CEESE.
Le financement
Ce projet embryonnaire de SSA est soutenu et financé par 4wings (privé), Bruxelles environnement (publique) et la Cocof (publique).
En aval…
Une SSA qui aurait pour objectif in fine de permettre la rémunération des paysan.nes et de soutenir la transition des systèmes alimentaires. Ielles en ont bien besoin par les temps qui courent. Le monopole dans les filières alimentaires est, en effet, détenu par quelques entreprises au modèle agroindustriel.
Ce qui signifie la recherche croissante de compétitivité, de rendement, de capital, de profit, amenant à la destruction de la biodiversité, à la pression continue sur les travailleur.euse.s du secteur, à la perte d’emprise des mangeur.euse.s sur ce qu’ielles mangent, etc. Autre constat : 600 000 personnes appellent à l’aide alimentaire en Belgique, un chiffre 6 fois plus important qu’il y a 20 ans. Face à cette urgence de changement de modèle, la SSA constituerait une proposition de mesure structurelle s’appuyant sur un modèle solidaire et démocratique.
Crédit photo : Mathieu Paulus
Dans la pratique, dans la cantine
Implantée depuis plusieurs années sur le campus, l’ASBL As Bean a également mis sur pied une cantine durable et engagée, La Turbean. As Bean organise aussi régulièrement des activités pour permettre aux étudiant·es d’apprendre sur les systèmes alimentaires et de se mobiliser collectivement. Ces échanges s’inscrivent dans la lignée de l’éducation permanente, l’équivalent de l’éducation populaire en France. Celle-ci a pour but de faire échanger les vécus et les connaissances du terrain au quotidien de chacun.e.s par rapport aux systèmes alimentaires. As Bean organise, pour cultiver celle-ci, des soirées-conférences, des soirées-débats, des ateliers, etc.
De plus, de nombreuses informations, via des folders, des affiches, des tableaux, sont également à disposition des étudiant.e.s dans les 2 salles polyvalentes de la cantine. Des ateliers de cuisine, où la sauce et l’échange prennent, s’ajoutent au menu et sont à prix libre. On y apprend à démystifier le monde de la cuisine végétale et à composer avec les ingrédients du jour.
Autant de projets concrets et collectifs qui permettent de sensibiliser les étudiant.e.s aux enjeux de l’alimentation durable, et de, qui sait, préparer à un monde rêvé autrement.