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Les termites, les meilleures architectes bioclimatiques du monde

L’architecte Mick Pearce a bien compris les bénéfices de cette architecture et a, en 1990, construit à Harare, dans la capitale du Zimbabwe, l’Eastgate Centre. Un bâtiment abritant bureaux et magasins. Il s’est inspiré de l’habitat des termites champignons. Ainsi, il consomme 90 % de moins d’énergie que l’immeuble voisin. Incroyable, n’est-ce pas ?

Notre cerveau a cette fâcheuse tendance à se focaliser davantage sur le négatif que sur le positif. C'est ce qu'on appelle le “biais de négativité”. Notre vision des termites en est un parfait exemple. Ces insectes clés de voûte ont des fonctions écologiques essentielles, sont des ingénieures du sol mais aussi des architectes low-tech hors pair. A tel point qu’elles inspirent les architectes du monde entier.

Les termites, espèce ingénieure

On recense environ 2600 espèces de termites dont seulement une vingtaine infeste et détruit les bâtiments. Les termites ou isoptères se déclinent en plusieurs familles. En Europe, nous connaissons plutôt les Rhinotermidés. Même si elles sont aujourd’hui bien installées dans les zones urbaines, on les trouve toujours à l’état naturel dans les forêts localisées dans la moitié sud du continent.

Leur particularité est leur métamorphose dite incomplète ou hémimétabole. Les jeunes ou juvéniles sont similaires aux adultes hormis les espèces ailées qui possèdent des bourgeons alaires repliés sur le dos, se transformant au stade adulte en ailes articulées fonctionnelles.

Les termites, avec leurs pièces buccales broyeuses, se nourrissent majoritairement de bois et de fragments de feuilles. Elles ont un corps blanchâtre et mesurent de 4 à 10 mm de longueur. A l’instar des fourmis, leur morphologie varie selon leur rôle social. Elles fonctionnent à travers l’intelligence collective et on peut les répartir en plusieurs catégories sociales :

Les reproducteurs : Le roi et la reine sont les seuls dotés d’ailes et en capacité de se reproduire. Quand ils survivent au vol nuptial, ils s’enferment pour leur durée de vie dans une loge prénommée (attention aux âmes délicates) le « copularium ». La reine peut mesurer jusqu’à 6 centimètres et est la seule de la colonie à pondre.

Les ouvriers : Ils forment le groupe le plus nombreux. Ils n’ont pas d’ailes, sont stériles et aveugles. Sans eux, aucune chance de survie pour la colonie. A la fois bâtisseurs, foreurs et baby-sitters des œufs, ils nourrissent les larves et les soldats. Ce sont eux qui mangent de la cellulose et créent ainsi la plupart des dégâts chez les humains

Les soldats : Si ces derniers sont les gardiens de la colonie grâce à leurs mandibules puissantes, ces dernières les empêchent néanmoins de se nourrir seuls, les rendant ainsi complètement dépendants des ouvriers. Ils ont la capacité de sécréter des substances chimiques de défense contre les prédateurs.

Si cette espèce disparaissait, cela compromettrait inévitablement la structure et le fonctionnement d’un écosystème.

Des termites

Des termites en Australie – Crédit : Jean and Fred Hort / Flickr

Le termite et ses fonctions écologiques

Cette espèce ingénieure construit son habitat. Par ce biais, elle rend sans le savoir (ou pas ?) de multiples services à la biodiversité et joue un rôle clé dans les cycles biogéochimiques. Ces derniers sont des processus complexes par lesquels des éléments minéraux ou organiques sont transformés par la combinaison de l’action des êtres vivants.

A l’instar de nos amis les vers de terre, le termite est un maillon vital de nos écosystèmes et nous invite à prendre soin du plus petit que nous. Ingénieure du sol, elle en est un élément essentiel à plusieurs égards.

Ce xylophage, par le simple fait de se sustenter, décompose la litière qui s’incorpore ensuite au sol. Le compostage de la cellulose enrichit ce dernier en matière organique. Somme toute, il le nourrit. Ensuite, il structure le sol en creusant des galeries et, par effet domino, modifie son agrégation.

Gardien du maintien de la vie du sol, il contrôle en partie la diversité et les activités microbiennes et protège les plantes contre les maladies et les pathogènes du sol.

Son déplacement ainsi que la construction de ses galeries permettent des techniques faisant écho aux principes de l’hydrologie régénérative puisqu’il participe à l’infiltration et au stockage de l’eau dans les sols. Le fonctionnement des termitières fait de ces insectes une source importante de méthane et d’azote minérale et lui octroie ainsi le rôle d’îlots de fertilité qui permettront à des plantes de se développer.

Les termites sont indispensables au maintien de l’équilibre et de la régulation de leur écosystème. Leur disparition entraînerait des effets fortement néfastes, pour ne pas dire catastrophiques, sur l’environnement. Ces isoptères ont encore d’autres surprises à nous dévoiler. Ils sont capables de construire collectivement des édifices d’une complexité et d’une efficacité déconcertantes.

Une termitière

Une termitière près de Turmi en Éthiopie – Crédit : Bernard Gagnon / Wikimedia Commons

Les termites, des architectes low-tech

Quand la nature est source d’inspiration, c’est une opportunité inédite d’innovation responsable. Chez les termites, les chantiers s’effectuent horizontalement. Comment s’organisent ces ouvriers sans aucun ingénieur ou architecte en chef pour construire ces habitats si sophistiqués ?

Si les espèces européennes vivent sous terre ou dans les souches, d’autres, comme en Afrique construisent de véritables cathédrales pouvant parfois aller jusqu’à huit mètres de haut. Les termites y cultivent des champignons pour se nourrir, ce qui leur a valu le nom de « champignonnistes ». Ces champignons transforment le bois non digestible rapporté par ces dernières pour fournir les nutriments dont elles ont besoin.

Afin d’assurer leur survie, il faut que la température à l’intérieur de la termitière soit autour de 27 degrés et, c’est là où réside toute la subtilité de ces constructions. Une équipe de recherche dont le chercheur Kamaljit Singh, ingénieur à l’Imperial College de Londres, a observé que la formation des dalles qui paraissent solides à l’œil nu sont en fait constituées d’un vaste réseau de pores minuscules et interconnectés qui régulent la ventilation, l’humidité et la température.

L’une des conditions sine qua non à ce fonctionnement est que le dioxyde de carbone puisse s’évacuer et l’oxygène entrer. Parmi les différents types de monticules, on trouve la haute cheminée centrale qui surplombe le nid. L’air chaud à l’intérieur du nid s’élève vers le sommet de la termitière puis est évacué. Ce vent qui sort par le haut aspire mécaniquement de l’air dans les parties basses du nid qui permet sa circulation. L’air d’en bas est rafraîchi au contact de puits très profonds. Les termites ont la capacité de pouvoir modifier son circuit en fermant certaines de leurs galeries. La nuit, elles l’interrompent pour conserver la chaleur emmagasinée durant la journée.

Les termitières découvertes au Brésil sont âgées de 690 à 3.820 ans – Crédit : Roy Funch

L’architecte Mick Pearce a bien compris les bénéfices de cette architecture et a, en 1990, construit à Harare, dans la capitale du Zimbabwe, l’Eastgate Centre. Un bâtiment abritant bureaux et magasins. Il s’est inspiré de l’habitat des termites champignons. Ainsi, il consomme 90 % de moins d’énergie que l’immeuble voisin. Incroyable, n’est-ce pas ?

Encore plus impressionnant, en 2019 une équipe britannique a découvert une véritable mégapole de termitières : un réseau de nids au centre du Brésil de 230 000 kilomètres carrés de surface – la taille de la Grande-Bretagne –, pour un volume de 10 kilomètres cubes de terre, soit l’équivalent de 4 000 pyramides de Gizeh, tellement grand qu’il en est visible par photo satellite.

Aujourd’hui, dans des sociétés où certains ont des délires de mort à vouloir habiter sur mars ou s’enfermer dans des bunkers coupés de leurs semblables et de la vie, d’autres œuvrent à comprendre et à s’inspirer des solutions fondées sur la nature (SFN). Des savoir-faire incroyables que nos colocataires s’évertuent à nous montrer. Des outils pour cohabiter avec le Vivant plutôt que de le détruire. Un autre monde est possible, si seulement, l’on se décidait à faire un pas de côté pour sortir de cette ère du capitalocène sordide et délétère.

Un autre monde est possible. Tout comme vivre en harmonie avec le reste du Vivant. Notre équipe de journalistes œuvre partout en France et en Europe pour mettre en lumière celles et ceux qui incarnent leur utopie. Nous vous offrons au quotidien des articles en accès libre car nous estimons que l’information doit être gratuite à tou.te.s. Si vous souhaitez nous soutenir, la vente de nos livres financent notre liberté.

Liza Tourman

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