Le 19 septembre 2023, une étude publiée dans Nature communications a révélé le rôle de communautés de cétacés dans le recyclage écologique de deux nutriments majeurs et de six oligo-éléments, contribuant ainsi au bon fonctionnement de l’écosystème marin.
Des nutriments qui diffèrent selon les écosystèmes
Il est connu que la matière fécale des grandes baleines fertilise les océans en nutriments, stimulant ainsi le phytoplancton et la productivité des écosystèmes.
Mais cette connaissance était jusqu’ici limitée à quelques espèces, nutriments et écosystèmes, c’est pourquoi les chercheurs se sont penchés sur les rôles de communautés de cétacés dans le recyclage écologique mondial de deux nutriments majeurs (azote et phosphore) et de six oligo-éléments (fer, cuivre, manganèse, sélénium, zinc et cobalt).
Le cocktail de nutriments libérés varie en quantité et en qualité, en fonction des zones géographiques et de la composition des communautés de cétacés. L’étude a donc été réalisée dans 14 zones autour du globe, sur 38 espèces différentes de cétacés.
Lola Gilbert, doctorante au Centre d’études biologiques de Chizé (CEBC – CNRS/La Rochelle Université), développe : « L’azote joue un rôle important dans les zones tempérées et tropicales, tandis que dans les zones australes, c’est le fer qui prédomine. Selon l’engrais qu’on met dans son jardin, on n’a pas les mêmes plantes qui poussent. Pour l’océan, c’est pareil, ce que produit l’écosystème dépend du cocktail de nutriments dont il dispose. Et ce dernier varie selon plusieurs facteurs. »
Les chercheurs se sont ainsi penchés sur les concentrations en nutriments des proies, les régimes alimentaires, et les paramètres métaboliques des cétacés.
Les déjections des communautés de cétacés dépendent de la productivité des écosystèmes
Les résultats de l’étude révèlent que les communautés de cétacés rejettent beaucoup plus de nutriments par l’intermédiaire de leurs déjections dans les latitudes tempérées productives que dans les latitudes tropicales pauvres.
Ces conclusions mettent en évidence un “cycle vertueux des nutriments” : plus la base de la chaîne trophique est productive, plus les nutriments sont recyclés par des animaux.
Le rôle des petits cétacés et des plongeurs profonds ne doit pas être négligé. Dans la plupart des zones mésotrophes (milieu moyennement riche en nutriments) et eutrophes (milieu extrêmement riche en nutriments et fortement abondant en plantes aquatiques), leur contribution est supérieure à celle des baleines à fanons dans le cycle des nutriments étudiés.
Selon le CNRS : « Dans les eaux tropicales et subtropicales, la productivité est trop faible pour soutenir les populations de baleines à fanons, laissant les petits cétacés et les plongeurs profonds pour seules espèces de cétacés impliquées dans le cycle biologique des nutriments dans une grande partie des océans du monde. »
Pour les chercheurs, il est essentiel de maintenir et restaurer des populations saines de cétacés, diversifiées et abondantes dans les océans du monde entier, afin de maintenir leur rôle de diffuseurs actifs de nutriments et de stimulation des puits de carbone dans l’Océan.
Cette solution, fondée sur la nature, est plus crédible qu’une fertilisation artificielle à grande échelle afin de favoriser le captage du carbone par l’Océan.