Les mesures de confinement auraient pu être un doux répit pour la faune de nos forêts, mais c’était sans compter la ténacité des chasseurs à exercer leur activité malgré tout. Le Président de la Fédération Nationale des Chasseurs a ainsi donné l’ordre d’annuler réunions et chasses collectives, mais les pratiques individuelles restent autorisées.
Les chasses à « enjeu sanitaire » autorisées
Relevée par l’ASPAS, une association de protection de la faune sauvage, l’annonce paraît trop surprenante pour être réelle. Et pourtant, Willy SCHRAEN, le Président de la Fédération Nationale des Chasseurs, a bien écrit un communiqué précisant à l’ensemble de sa communauté la marche à tenir en cette période de confinement : aucune réunion ou assemblée générale ni chasse collective ne sont permises, mais les sorties individuelles restent maintenues.
« Certaines chasses individuelles restent possibles dès lors qu’elles ont un enjeu sanitaire. Je pense par exemple à celle des corvidés qui sont très importantes pour limiter les dégâts sur les semis de printemps, ou l’approche du sanglier là où c’est nécessaire, pour les mêmes raisons (selon les modalités en vigueur dans vos départements). » précise ainsi le Président sur le site chassepassion.net
Si l’argument semble pragmatique de premier abord, interrogation est faite de savoir quelles sont les chasses officiellement désignées comme étant à « enjeu sanitaire ». De fait, le terme sanitaire semble volontairement trompeur, puisqu’il est utilisé par le gouvernement pour désigner les mesures prises pour enrayer la propagation de maladies parmi les animaux d’élevage et la faune sauvage. La chasse peut faire partie de ces mesures, mais ce n’est pas le cas ici.
Qui régule quoi
Willy SCHRAEN, le Président de la Fédération Nationale des Chasseurs, explique que les chasseurs peuvent continuer d’aller « nourrir leurs appelants sur les sites où ils se trouvent ». Les appelants sont des appâts vivants utilisés par les chasseurs pour attirer et tuer leurs proies : par exemple des pigeons pour attirer des palombes, ou des canards pour leurrer les oiseaux aquatiques sauvages.
S’il est bien normal de ne pas laisser des animaux, probablement enfermés, mourir de faim, ce détail sur les pratiques de la chasse pose une fois de plus question sur notre rapport aux animaux, ici considérés comme des outils purs et simples, et les impacts de la chasse sur la faune sauvage.
« Malgré le refus de l’Etat d’interdire le piégeage et la chasse individuelle à l’approche, la faune sauvage devrait donc malgré tout profiter de cette situation de confinement des humains, au moins jusqu’en avril. Une aubaine pour la biodiversité : le printemps arrive à grand pas, et avec lui, la période fragile des naissances. L’ASPAS avait dénoncé avec force la décision de l’Etat de prolonger au niveau national la chasse des sangliers jusqu’à fin mars, à cause justement du risque important de dérangement pour toute la faune en cette période critique de reproduction. Nous regrettons que, malgré la crise sanitaire actuelle, il n’ait pas interdit l’intégralité des activités de destruction de la faune sauvage, qui sont loin d’être la priorité du moment… » déplore ainsi l’ASPAS
En effet, l’argument de la régulation est le plus souvent brandi par les chasseurs pour justifier leurs activités. Malheureusement, les pratiques de chasse ont bien trop souvent l’effet inverse en favorisant la prolifération des « gibiers préférés » des chasseurs, au détriment d’autres espèces plus fragiles. Une étude démontrait tout récemment comment les prédateurs naturels sont bien plus efficaces que la chasse pour l’équilibre des forêts.
Il est ainsi dommage de voir les activités de chasse continuer d’être autorisées, et être exemptées une fois de plus des règles qui s’appliquent au reste de la population. Un vrai répit aurait pu être une expérience exceptionnelle pour voir comment les forêts évoluent lorsque l’humain leur laisse le temps et l’espace de suivre leur rythme.