C’est une victoire d’étape importante pour les associations et citoyens engagés dans la lutte contre le projet de retenue d’eau collinaire du plateau de Beauregard. Le juge du tribunal administratif de Grenoble leur a donné raison en ordonnant la suspension des travaux, le temps que l’affaire soit jugée sur le fond. Les protecteurs de la montagne ont gagné un répit précieux.
Le déboisement n’aura pas lieu sur le plateau de Beauregard. C’est un soulagement immense pour l’ensemble des associations, et collectifs et habitants investis depuis deux ans pour empêcher ce projet, alors que les travaux étaient imminents. Ce mardi matin, le juge du tribunal administratif de Grenoble a ordonné, en référé, la suspension de l’autorisation des travaux de la retenue d’altitude sur le plateau de Beauregard à la Clusaz.
Sa décision est claire et sans appel : « l’intérêt public qui découle de la réalisation d’une retenue collinaire essentiellement destinée à assurer l’enneigement artificiel de la station est insuffisant à remettre en cause l’urgence qui tient à la préservation du milieu naturel et des espèces »
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Le dossier pourra maintenant être étudié en détail par la justice, afin d’aboutir à un jugement au fond sur l’ensemble des points contestés par les associations. Ce recours au fond sera jugé d’ici un an minimum, voire deux à trois ans selon la rapidité de la justice.
A la Clusaz, la bataille fait rage depuis deux ans contre le projet de retenue d’eau collinaire qui doit se construire sur le plateau de Beauregard. Au cœur des Aravis (Haute-Savoie), ce cratère de 148 000 m³ dans la montagne (l’équivalent de 60 piscines olympiques et d’une surface au sol de 5 terrains de foot) détruirait 8ha de bois abritant 58 espèces protégées et risquerait d’assécher la tourbière remarquable de Beauregard, classée Natura2000.
« Ce projet de retenue d’altitude incarne la maladaptation des territoires de montagne au changement climatique. Miser uniquement sur un prélèvement accru de la ressource en eau pour faire perdurer le ski sans rechercher de solutions alternatives, le tout en sacrifiant des zones humides, faune, flore et espace d’exceptions dont la destruction est irréversible, est inacceptable » rappellent les associations environnementales engagées dans la bataille judiciaire
Avec l’imminence des premiers déboisements, la mobilisation était montée en puissance face à ce projet hors-norme et des activistes avaient décidé de se percher dans les arbres pour mieux les protéger.
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« Sur la ZAD l’heure est au soulagement, et a priori les personnes vont évacuer les lieux et rendre à la forêt son espace naturel. Cette première décision en notre faveur nous donne confiance pour la suite. Mais nous ne sommes pas naïfs, on sait que le recours au fond peut être une autre paire de manches. On va approfondir les arguments qu’on a développé et on peut estimer que le temps jouera en notre faveur. Plus les sécheresses et les évènements extrêmes s’enchaîneront, plus la notion d’urgence à s’adapter au changement climatique et préserver les espaces naturels sera de plus en plus prégnante pour la société civile mais aussi dans la législation » explique Corentin Mele, chargé de mission eau et veille environnementale à FNE Haute Savoie, pour La Relève et La Peste
Les associations du territoire espèrent profiter de cette pause pour ouvrir un débat nécessaire autour de l’avenir des montagnes et de la protection de la ressource en eau, avec l’ensemble des acteurs du territoire. Et qui sait… les ranger à leur côté.
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Crédit photo couv : Geoffrey Bire / Hans Lucas via AFP