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« Je souhaite que lorsque le gouvernement nous traite en adversaire, nous puissions le traiter en adversaire en retour. »

Voilà ce que je pousse : moins de gouvernement, de domaines régaliens où on leur délègue notre capacité de penser, de décider et d'agir. Gouverner, nous le ferons par et pour nous-mêmes, selon des modalités qui se discuteront dans l'intérêt commun.

Dans La Charge, l’avocat David Koubbi rappelle que nos politiques sont unis à nous par un lien d’ordre hiérarchique qu’ils ont inversé, et propose différents moyens pour rétablir ce déséquilibre. Conversation autour de nos contestations compatibles.

Propos recueillis par Matthieu Delaunay@Delaunaymatth

Pourquoi, après Une Contestation française, vous êtes-vous remis à écrire ?

En le relisant au début d’année 2020, je me suis rendu compte que j’avais à l’évidence péché par orgueil en espérant écrire de façon trop académique et compliquée et me suis dit que le meilleur moyen de faire passer des idées était de les exprimer le plus simplement possible.

Dans La Charge, j’ai voulu ramasser le propos pour n’en laisser que l’os et le nerf, prenant le risque assumé qu’il soit plus abrupt, mais tout en essayant de m’adresser à un plus large lectorat.

Ce manifeste a été l’occasion de pousser un certain nombre d’idées et de tenter d’apporter des solutions, à la condition qu’elles soient lues et qu’elles emportent la conviction des gens qui le liront.

On a l’impression que la colère a monté d’un cran ?

D’abord, nous ne sommes plus sous la même mandature que quand j’ai écrit mon dernier livre. Nous sommes sous un quinquennat qui s’est donné les moyens d’exister, par opposition à celui d’Hollande, par une promesse marketing résumée ainsi : « nouveau monde, société civile, fin de la hiérarchie pyramidale, remontée des bonnes pratiques, intérêt commun, etc. », bref, la promesse d’une présidence à la Kennedy.

Emmanuel Macron, cadet trentenaire qui réussit le holdup de ne pas exister médiatiquement toute sa vie durant et qui, à compter du moment où il existe, devient Président de la République trois ans plus tard. Quel braquage formidable !

Fort du constat qui consiste à dire que les pratiques, contrairement à ce qui nous avait été vendu, non seulement perdurent mais en plus se durcissent, j’ai rédigé ce manifeste, illustré par les superbes photos de Léa Garson. La période laissant moins de place pour avoir des états d’âme, il fallait aller au but, le plus droit possible.

Crédit : Léa Garson

Qu’est-ce qui est pire aujourd’hui qu’il y a cinq ans ?

Nos politiques ne prennent même plus la peine de se cacher, lorsqu’ils déraillent, parce qu’il n’y a pas de contre-pouvoir. Du poste d’observation qui est le mien, ce serait une faute de ne pas partager le constat que je fais.

Beaucoup de gens sentent confusément que quelque chose ne va pas, mais ils peinent à l’illustrer. Etant au contact de beaucoup de journalistes et de politiques, j’essaie de rapporter ce que je vois de là où je me trouve, pour dire à ceux qui ressentent le même malaise que moi : « vous n’avez pas tort, voilà de quoi l’illustrer ».

Le constat est simple : la loi ne s’applique pas de la même manière à tous, surtout pour les puissants, aux premiers rangs desquels se tiennent nos politiques. Combien de députés, de politiques sont allés en prison ? En dehors de Balkany : zéro.

Est-ce que ça veut dire que la France est un pays d’une particulière probité publique, je ne le crois pas. Il y a ce totem, cette magie judiciaire qui fait que, quelle que soit l’atteinte, c’est une peine de deux ans ferme qui est prononcée.

Or, jusqu’à deux ans de prison, on peut ne pas y aller, puisque ce sont des peines dites aménageables. Elles ne manquent d’ailleurs jamais d’être aménagées lorsqu’elles viennent frapper des politiques ou des gens d’importance.

En partant de là, se pose la question de notre vitalité démocratique, et même de l’existence d’une démocratie. Dans le triptyque Liberté, Égalité, Fraternité, Égalité signifie que l’on soit tous traités de la même façon. C’est inscrit dans notre Constitution.

Dès lors que la loi ne s’applique pas à tous, et je pense que la démonstration en est faite quotidiennement et sans contredit possible, cela vient fragiliser l’idée que nous serions en démocratie.

« Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir. », écrivait La Fontaine dans Les animaux malades de la Peste au 17eme. Il n’y a rien de nouveau !

Le « ce n’est pas nouveau » n’a jamais été une excuse pour ne rien penser et ne rien faire. Et je soulève un point : il y a quelque chose de nouveau depuis les poèmes de La fontaine, et qui n’est pas tout à fait neutre, c’est que nous ne sommes plus en Monarchie.

Aujourd’hui, on nous a dit que nous vivions sous le régime de la République et accessoirement dans une démocratie. Quitte à vous choquer, je préfère l’intolérable période de La Fontaine, où il existait des lettres de cachet, le fait du prince, qui décidait, arbitrairement et sans procès, qui devait être inquiété ou non. Au moins, c’était clair, c’était dit.

Aujourd’hui, nous vivons dans une fable moderne, qui n’est pas celles de La Fontaine, où tout se vaut ou finit par se valoir, où les mots et la parole n’ont plus de sens, et où nous arrivons dans ce paradoxe où, n’ayant jamais eu autant de moyens de nous informer, nous le sommes si peu.

Crédit : Léa Garson

La question qui se pose maintenant est : que faisons-nous de tout ça ?

La plupart du temps, rien collectivement. Individuellement, on en fait des râleries et le système a trouvé une parade en disant : « Râler, c’est ça être Français ! » En réalité, il y a plein de moyens de fonctionner différemment et de faire quelque chose.

Lesquels ?

Il y a ce grand sujet de la désobéissance civile. Le modèle L214 me semble fonctionnel et réussi. S’ils ne filment pas dans les abattoirs parce qu’ils respectent la loi, au mieux peuvent-ils faire le récit de ce qu’ils ont vu, mais nous n’y accorderions aucune sorte d’écho. En filmant, ils violent une obligation, mais donnent à voir des images qui participent à une prise de conscience générale. Et donc à des changements.

Qu’est-ce que ce concept des « Contestations compatibles » ?

Quand on propose une action à un politique ou une personne connue, systématiquement on s’entend répondre : « Il y aura qui d’autre ? Je ne veux pas être vu avec tel ou tel. » Aujourd’hui, si vous êtes vu avec quelqu’un, c’est que vous adhérez à ses idées. Cette quadrature du cercle, nous devons absolument la rompre le plus rapidement possible.

Pour le dire autrement, le fait que je sois sur une photo avec vous, ne signifie pas que j’embrasse toutes vos idées, mais qu’à un moment donné nous avons eu une convergence qui pointe vers une contestation qui nous est commune, cela nous rend compatible.

Cela ne veut pas dire que je vous fais un chèque en blanc de moralité, ça n’empêche pas non plus que nous puissions nous entendre alors que l’un de nous serait juif et l’autre catholique, l’un viandard et l’autre végétarien, l’un pro nucléaire et l’autre décroissant.

Il me semble que cette notion doit rentrer dans l’esprit des gens. Les manifestations autour de Charlie Hebdo de 2015 illustraient cette idée : ce brassage était une union autour d’une contestation contre les attentats.

La réappropriation des outils numériques comme outil démocratique est au cœur de ce manifeste.

C’est une course contre la montre qui est enclenchée. Ils doivent être utilisés comme outils démocratiques, sinon ils se retourneront contre nous pour limiter nos Libertés publiques. Comment TF1 est capable de tester toute la Nation en temps réel pour savoir si « Machin reste ou s’en va en tapant 1 ou 2 », alors que nous ne sommes pas en mesure, avec un outil identique, de demander aux citoyens des réponses claires à quelques questions telles que : « Etes-vous sûrs de vouloir passer 6 mois sur le mariage gay, le voile, le Burkini, la PMA, la GPA etc. »

Cette courte litanie, c’est 5 ans de débats étirés entamant notre vie démocratique ! Dans le même temps, nous n’avons pas été consultés sur le CETA, sur les quotas de pêche, sur l’utilisation du glyphosate…

Théoriquement, nous n’aurions d’ailleurs pas dû l’être, puisque c’était dans les programmes de la plupart des candidats, notamment celui qui a été élu, et qui, pour autant que j’en sois informé, fait l’inverse de ce qu’il avait promis, sans d’ailleurs s’en expliquer. Aucun compte ne leur est demandé.

Crédit : Léa Garson

Cette notion contractuelle est aussi un autre volet du livre.

Tout dans la vie est organisé autour d’un contrat : mariage, location d’une maison, achat d’une voiture, contrat de travail, contrat d’assurance, d’achat… Tout est contractualisé… sauf la sphère politique !

Non seulement ils ne doivent pas rendre compte, mais en plus ils ne sont pas engagés par leur propre parole. La parade du système, qui fait tout pour survivre, est : « Rassurez-vous, dans 5 ans, vous pourrez ne pas voter pour celui-là ». Entendu, mais on votera pour un autre, qui sera le même en définitive !

En prime, il y aura l’épouvantail du RN au deuxième tour, Libération titrera, « Faites ce que vous voulez, mais votez Macron » et tout continuera comme avant : cela s’appelle le fameux sursaut démocratique. On nous offre de voter pour un autre visage, mais ce sera toujours le même système au sein duquel il n’y aucun engagement contractuel qui, je le répète, régit toutes les sphères d’échanges entre humains. Cela semble dire que la sphère politique échappe aux modes de fonctionnement humains.

Comment l’expliquer ?

On a aboli la monarchie dans sa forme théorique. En réalité tout s’éclaire, quand on regarde ne serait-ce que les passations de pouvoirs, ou cette espèce de scène ahurissante de Macron au Louvre, le soir de son élection. Il y avait là une forme de déification, un décorum qui ne faisait pas très « société civile », pas très « décisions horizontales », si je puis me permettre.

Si les gens n’avaient pas compris que tout ce qui avait été promis avant l’élection ne serait pas tenu, ce soir-là, ils n’avaient plus d’excuses pour ne pas le croire. Ce système est fabriqué pour des hommes et des femmes – mais surtout des hommes – providentiels. La question qu’on doit se poser est : « OK, mais quand il n’y a pas d’homme providentiel, comment fonctionner le temps qu’il arrive, sachant qu’un siècle nous en sert seulement quelques-uns ? »

Quel serait votre femme, ou votre homme providentiel ?

Au point où j’en suis rendu, simplement quelqu’un qui aurait une vision du pays, même si je ne suis pas d’accord avec elle et la probité attendue. Quelle est la vision de Hollande, de Macron ? Le sujet brûlant concernant Alstom donne une petite idée de ce que pourrait être cette vision : démanteler un fleuron français pour le céder à une puissance étrangère. Cela pose question.

En quoi l’intégrité est-elle profitable à tous ?

D’abord parce que les plus grands textes qui régissent notre vie en société le prévoient. J’ai beaucoup de mal à concevoir qu’on puisse s’éloigner de ces textes, motif pris qu’on est au pouvoir. Dans ces grands dossiers publics, on se rend compte qu’il y a toujours quelque chose de louche, que les élections ont été truquées, que le financement n’était pas légal, qu’il y a eu des écoutes sauvages, etc.

Dernier en date : avec l’ouverture des archives du Conseil constitutionnel, nous avons aujourd’hui la preuve que l’élection de Jacques Chirac en 1995 et que la candidature d’Edouard Balladur n’ont pas respecté les règles de financement de campagne. Passe encore. Mais on sait désormais que le Conseil constitutionnel a « manœuvré », d’après la cellule enquête de France info, pour couvrir ces irrégularités. Excusez du peu !

On ne peut violer la loi et « en même temps » prétendre s’intéresser à l’intérêt commun ou régir la vie des citoyens français. Quelqu’un d’honnête devrait commencer par dire : « Le champ de gouvernement qui m’est confié est trop large pour que je puisse faire le boulot correctement. Nous allons donc regarder quelles sont les urgences et pour le reste, je renvoie la population au fait qu’elle doit se débrouiller toute seule, avec intelligence, pour les choses qui la concernent ».

Voilà ce que je pousse : moins de gouvernement, de domaines régaliens où on leur délègue notre capacité de penser, de décider et d’agir. Gouverner, nous le ferons par et pour nous-mêmes, selon des modalités qui se discuteront dans l’intérêt commun.

Quant aux quelques sujets qui sont dévolus aux politiques, ils le seront sous un contrôle actif populaire.

Crédit : Léa Garson

Dans un système où la justice n’est pas rendue de la même façon pour tous, comment leur imposer nos vues ? Ce système est aussi une addition de multiples petites corruptions qui font cette immense corruption.

Selon moi, il y a trois phases. D’abord, accroitre notre niveau de compréhension du sujet qui nous occupe, cela peut passer par l’éducation populaire. Toutes ces thématiques sont opaques car il est de l’intérêt de nos gouvernants et su système qui les protège qu’elles le soient le plus possible.

Ne pas pouvoir comprendre justifie à coup sûr la délégation de notre pouvoir entre leurs mains. Ensuite, il faut les nommer et les contester quand ils ne respectent pas les obligations qui pèsent sur eux. Enfin, si ça n’est pas suffisant, il faut leur désobéir en vue de les remplacer.

Comment contester ?

Quand on comprend quelque chose, on en parle autour de soi, on l’écrit partout où on peut l’écrire, on use de chaque tribune dont on dispose, même si ça a moins de poids qu’un média national. Je pose une question ici : un grand nombre de médias français sont la propriété de banquiers. Or on sait que la presse est chroniquement déficitaire.

Il convient de s’interroger quant au fait que des banquiers, dont le travail est de faire du résultat, se retrouvent à la tête de titres de presse dont les économies ne sont pas florissantes. À quoi est-ce que cela sert, sinon à faire passer des messages, à façonner une pensée collective, à décider ce que sont les bonnes et les mauvaises informations ?

Pourquoi les nommer ?

Parce que ça les gêne, eux et leur entourage. Tout ça se passe dans le noir. Je ne peux par exemple pas entendre que 2,2 milliards d’argent public ne soient toujours pas recouvrées et laissés dans les mains d’une banque, alors qu’on va aller mettre à plat un petit artisan, un commerçant ou un salarié qui sera éventuellement défaillant sur le paiement de son impôt.

Pour moi, c’est quelque chose qui n’est pas audible. Le prix de cette incurie, de cette inaction, engendre directement la nécessité d’aller accrocher une multitude de personnes plus vulnérables, pour leur prendre de quoi payer ce que les banques ne paient pas.

Certains pourraient vous rétorquer que ce sont des propos démagogiques.

A la condition de me dire où ce raisonnement est faux sinon, c’est une pétition de principe. On peut me dire aussi que ce sont des propos de cannibale, mas il va falloir me montrer à quel moment je mange quelqu’un. S’il y a quelque chose que j’exècre par-dessus tout, c’est la démagogie.

Pour nommer, il faut trouver les noms. Ceux des politiques sont publics, mais ceux du « cran d’en dessous ou du dessus », ces hauts fonctionnaires, ces grands banquiers, ces juges, etc, comment les connaitre et les contraindre à faire leur travail avec diligence ?

Il faut être vigilant. Quand on a leur nom, il faut le rendre public. Il faut aller voir un avocat, faire des pétitions, regarder ce qu’ils ont fait et éventuellement les poursuivre. De toute façon, ce sera ça ou la rue, parce que les gens ne peuvent plus assumer cet état de faits, ce que je comprends très bien.

Crédit : Léa Garson

Est-ce qu’une révolution citoyenne est en marche ?

Révolution je ne sais pas, contestation c’est certain. On peut lui donner le nom qu’on veut : Gilets jaunes, Nuit debout, il y a là une question de mal-être et de bonheur.

Prenons la crise sanitaire mondiale que nous traversons. Je me garde bien de prendre position sur ce que je ne maitrise pas, je ne fais que regarder. Quand je vois : lundi 29 morts, mardi 85 morts, mercredi 35 morts, je ne comprends pas très bien ce qui nous est imposé.

Si l’on prend le nombre de mort par jour, rapporté à la population française – même s’il y aura des symposiums de statisticiens pour me dire que ce n’est pas comme ça qu’il faut compter – on arrive à 0,0000004 % de la population française. Je n’ai pas le sentiment que nos libertés sont limités à cette hauteur-là, bien au contraire. Et c’est là un vrai problème.

Pensez-vous que les Français seraient prêts à payer le prix d’une immunité collective qu’on évalue entre 150 000 et 400 000 morts ? Des personnes qui mourraient dans les conditions actuelles, qui sont bien souvent indignes d’un pays aussi riche que le nôtre ?

Je défends et écoute à ce titre beaucoup de médecins que je tiens pour sérieux et honnêtes. Ce qu’ils disent est que beaucoup des morts du COVID-19 seraient morts dans les semaines ou les mois qui suivent. Je ne sais pas de quoi sont constitués ces 400 000 personnes, et si cela tombe sur votre famille, c’est évidemment terrible.

La communication qu’on fait autour de la COVID n’est pas en ligne avec ce qu’on se dit dans cette conversation. Les masques par exemple : on nous a menti en nous disant que nous en avions un stock stratégique suffisant, mais qu’il ne fallait pas en mettre. Aujourd’hui, on nous impose d’en mettre tout le temps, y compris la nuit dans des rues vides. Il y a un problème.

Si on ne veut pas mettre en joue l’honnêteté de nos dirigeants, il me semble indispensable de soulever un problème de compétence, ne serait-ce qu’en matière de communication. J’aurais aimé qu’on nous dise : « ce qu’on vit est inédit, on va tâtonner et vous dire peut-être autre chose dans 15 jours ».

Mais les voir nous dicter, sur un ton professoral, une chose et son contraire à deux semaines d’intervalle, sans aucune concertation de surcroit, fait qu’il y a un trou d’air qui empêche d’avancer sereinement. De simplement comprendre ce qui nous arrive.

Comment leur imposer une meilleure communication ?

En leur expliquant que nous ne sommes pas des enfants et qu’on a pas envie d’être insultés.

Comment leur faire comprendre puisque, manifestement, ils n’ont pas l’air très réceptifs ?

J’essaie de faire un manifeste, vous une interview, des gens s’efforceront de lire ce qu’on est en train de se dire et en parleront peut-être autour d’eux. Mais pour répondre concrètement à votre question, il faut les sanctionner en ne votant plus tant qu’on n’a pas la garantie de leur honnêteté, on ne peut pas les considérer comme des partenaires de jeu.

Dans le même temps, il nous faut créer un quorum en deçà duquel celle ou celui qui aura le plus de voix ne sera pas représentatif pour gouverner la Nation. C’est le travail des constitutionnalistes et le nôtre également. Quand je comprends que certains gouvernent avec 10% des voix ramenées à la représentation totale, cela pose une vraie difficulté de légitimité.

Vous appelez à la révolte citoyenne, donc à ce que l’Etat soit déstabilisé ?

A un réveil plus exactement. Je souhaite que, lorsque le gouvernement nous traite en adversaire, nous puissions le traiter en adversaire en retour. Pour ceux en âge de voter et payer des impôts, il n’est plus acceptable qu’ils s’adressent à nous comme à des élèves attentifs.

Je rappelle qu’ils sont unis à nous par un seul lien, qui est hiérarchique et qui manifestement a été inversé. Or, celui qui décide, c’est celui qui paie. Ce n’est pas la position de l’ultra libéralisme soudain dont je me sentirais investi qui me fait parler ainsi, tout ce que ces gens font, ils le font sur des fonds publics, ils en ont fait un métier.

Or, il existe d’autres modèles ! Celui qui semble aller très bien à tout le monde c’est celui-là, ici en France. Moi, il me convainc très moyennement, a fortiori lorsqu’ils sont pris en train de mentir, ou en flagrant délit d’incompétence ou d’atteinte à la probité.

Comme ils n’ont pas la pudeur de disparaitre, je pense que c’est à nous de les faire disparaitre lorsqu’ils nous volent, qu’ils trafiquent des intérêts et détournent la chose publique de son objet magnifique et premier.

Crédit : Léa Garson

Est-ce que la majorité souhaite ça ?

Selon moi, l’extraordinaire majorité a une soif accrue de justice, sociale, fiscale, etc. Tout le monde a compris que le montant de l’impôt est totalement confiscatoire en France et qu’on n’en a pas pour notre argent en termes de service public, d’éducation… et de Libertés ! 

Dans le privé, quand une personne vit au crochet de sa société, ça s’appelle un abus de bien social. Pour seulement dresser une courte liste d’exemples, passer des voyages personnels dans ses frais, manger du homard en buvant de grands vins, faire des réceptions fastueuses pour autre chose que le travail, dans le privé, ça veut dire licenciement !

Je suis convaincu que si on demandait à la population, via l’application évoquée précédemment, s’il faut licencier un politique pris en flagrant délit de détournement de fonds publics ou de prise illégale d’intérêts, le politique en question ne resterait pas longtemps au pouvoir.

Les gens sont anesthésiés par les problèmes du quotidien créés et entretenus pour qu’ils n’aient pas autre chose à faire que d’essayer de surnager au milieu de ces difficultés. J’ai 47 ans, et depuis que je suis né, j’entends que nous sommes en crise : financière, démocratique, immobilière, migratoire, sanitaire…

Nous allons d’état d’urgence en état d’urgence, sans jamais dégraisser le corpus applicable des lois votées, des décrets ou des ordonnances prises pour répondre à la crise du moment, qui a chassé la précédente, et qui attend celle d’après avec une impatience mécanique.

Quant à ceux qui savent ça, qui occupent des places avantageuses et qui ne veulent pas changer de système, peut-être, contrairement à ce qu’ils prétendent, ont-ils une forme d’intérêt à ce que tout perdure de la même manière que depuis toujours.

Et maintenant le couvre feu ?

Le choix des mots… l’expression « couvre feu » s’utilisait jusqu’ici dans deux circonstances uniquement : en temps de guerre (imposée par l’envahisseur nazi) et dans la lutte contre insurrectionnelle (guerre d’Algérie).

Ce choix n’est pas un hasard, nos autorités auraient parfaitement bien pu évoquer « un confinement partiel » par exemple. Cela recoupe mon propos précédent où je vous indiquais que les mots n’avaient plus de sens d’autant que couvrir un feu est le meilleur moyen de lui offrir une combustion lente, pas de l’éteindre.

Propos recueillis par Matthieu Delaunay. Journaliste, auteur, voyageur au long cours, Matthieu Delaunay contribue régulièrement à La Relève et La Peste à travers des entretiens passionnants, vous pourrez le retrouver ici. Voici la vidéo de son entretien avec Corinne Morel Darleux.

crédit photo couv : Joël SAGET / AFP

Matthieu Delaunay

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