Un tronçon du chantier d’extension du TransMoutain Pipeline (TMP), au Canada, a été clôturé pour 4 mois. La raison : la protection du colibri d’Anna et d’autres espèces d’oiseaux migrateurs, en pleine période de nidification. Les tribus amérindiennes et les associations environnementales opposées au projet reprennent espoir pour recenser d’autres espèces le long des 1500km du tracé.
Un projet destructeur pour les autochtones et l’environnement
Au Canada est mené en ce moment un large chantier d’extension du TransMoutain Pipeline (TMP), un oléoduc voué à passer par les montagnes Rocheuses pour rejoindre la côte pacifique du pays.
Une telle extension devrait tripler la capacité d’acheminement des pétroles bitumineux de l’Alberta, de 300 000 à 890 000 barils de pétrole par jour, malgré l’opposition de nombreux acteurs dont les tribus amérindiennes et les associations environnementales.
« Des dizaines de communautés autochtones s’opposent au projet en raison de leurs préoccupations concernant les risques de déversement, les menaces à leur économie et les atteintes à leur mode de vie et à leur culture traditionnelle. L’exportation du pétrole acheminé par ce nouvel oléoduc nécessiterait la présence de 400 navires pétroliers par an dans les eaux côtières de la Colombie-Britannique. Un déversement de ce pétrole lourd et hautement toxique dans ces eaux causerait des dégâts permanents aux localités côtières et aux espèces sauvages, y compris les populations d’épaulards et de saumons. En terme d’impacts économique, 98 000 emplois à Vancouver et 320 000 emplois en C.-B. ont des activités liées à l’océan. Un déversement majeur compromettrait 43% pour cent de ces emplois. » résume Greenpeace
Rien ne semblait plus pouvoir s’opposer à ce chantier, jusqu’à ce qu’en avril des défenseurs de l’environnement fassent constater la présence d’un nid tout frais de colibri d’Anna dans un arbre abattu à cause des travaux.
Cet oiseau-mouche d’une dizaine de centimètres au plumage émeraude et à la tête rouge rubis se trouve protégé par la législation fédérale. Ainsi, après qu’un agent ait attesté de la présence de ce nid, le ministère fédéral de l’Environnement a ordonné la suspension des travaux sur un secteur de 900 mètres, près de Burnaby, dans le sud de la Colombie-Britannique.
Le site se trouve clôturé pour 4 mois, jusqu’au 20 août, afin d’attendre la fin de la saison de nidification. Selon Environnement Canada, les oiseaux sont particulièrement vulnérables durant cette période. La destruction de leurs nids par les bulldozers, scies à chaîne et autres engins de chantier serait lourde de conséquences non seulement pour le colibri d’Anna mais pour plusieurs autres espèces d’oiseaux.
La protection des espèces comme moyen de pression
Le Canada accueille au fil de l’année environ 450 espèces d’oiseaux indigènes. La plupart d’entre eux, dont la mésange à tête noire, le bruant chanteur, le merle et le tarin des pins se trouvent protégés en vertu de la Loi de 1994 concernant les oiseaux migrateurs.
Celle-ci prévoit notamment un processus bi-annuel de consultation sur la gestion de la chasse aux oiseaux migrateurs. L’agence gouvernementale Environnement Canada est en charge de l’élaboration et de la mise en place des politiques et règlements pour garantir la protection de ces oiseaux. C’est ce qui a permis cette suspension de l’ouvrage du TMP, qui appartient au gouvernement canadien depuis 2018.
« Il doit être construit et il sera construit. C’est vital », avait martelé le ministre des Finances Bill Morneau au moment de son rachat pour plus de 4 milliards de dollars par le gouvernement de Justin Trudeau.
L’argument principal était qu’en augmentant la capacité quotidienne du réseau, grâce à l’extension du pipeline, le pétrole canadien serait ramené à un prix plus juste par rapport au baril américain. Une réduction de cet écart injecterait plusieurs milliards annuels dans l’économie du pays.
Entretemps, le chantier s’est englué dans une polémique entre les défenseurs de l’environnement, les Nations premières, l’Alberta et la Colombie-Britannique. Les recours déposés par des tribus amérindiennes avaient finalement été rejetés en appel, laissant le champ libre aux travaux. Avec cette suspension, les opposants à l’oléoduc reprennent courage.
« Nos membres ont prouvé la présence de huit nids actifs sur ce site », note Sarah Ross, du réseau d’observateurs Community Nest. « Mais il y a des centaines et probablement des milliers de nids supplémentaires le long des 1 500 km du tracé ».
Crédit photo couv : Nicole Beaulac