Pour la première fois, Ngigoro, membre du peuple autochtone Hongana Manyawa vivant en isolement volontaire dans la forêt tropicale indonésienne sur l’île d’Halmahera, est venu pour alerter l’Europe sur la destruction de son territoire. Un véritable porte-voix d’environ 500 membres de son peuple non contactés, dont la survie est directement menacée par l’exploitation intensive du nickel par le géant français Eramet.
Une mobilisation inédite devant Eramet à Paris
Ngigoro, né non contacté au sein de la communauté Hongana Manyawa, a parcouru des milliers de kilomètres depuis son île natale pour se tenir aux côtés de manifestants de Survival International et de Canopée, devant le siège parisien d’Eramet.
L’objectif : faire pression sur l’entreprise et sur l’État français, actionnaire à hauteur de 27 %, pour cesser l’exploitation minière et protéger les terres ancestrales. Au-delà du simple message de protestation, cette mobilisation symbolise le combat de tous les peuples autochtones non contactés dans le monde.
« Comme beaucoup de peuples autochtones, les Hongana Manyawa protègent véritablement l’environnement, mais sont menacés par les industries extractives qui pillent leurs terres », rappelle Caroline Pearce, directrice de Survival International au Royaume-Uni.
Dans son rapport “Résister pour exister : la lutte mondiale des peuples autochtones non contactés”, Survival International a recensé 196 groupes autochtones non contactés vivant dans 10 pays à travers le monde. Pour l’ONG, la situation est critique : la moitié de ces peuples pourraient être anéantie d’ici dix ans si les entreprises et les gouvernements n’agissent pas très rapidement.
Les menaces qui pèsent sur eux : d’abord et avant toute chose, les industries extractives, mais aussi les influenceurs à la recherche de likes, les missionnaires en quête de nouvelles communautés à évangéliser, et les organisations criminelles liées au narcotrafic ou à l’exploitation minière illégale.
« Combien de temps encore, dans le monde industrialisé, allons-nous continuer à considérer les peuples autochtones non contactés comme de regrettables dommages collatéraux tout en pillant leurs terres pour satisfaire les besoins pour nos voitures, nos maisons, nos besoins énergétiques, nos bijoux, nos divertissements ? », a demandé Richard Gere, aux côtés des leaders autochtones, lors de la présentation du rapport par Survival International.

À Paris, des manifestants dénoncent Eramet, qui détruit la forêt des Hongana Manyawa non contactés. © Etienne Begouen / Canopée
Le nickel, une menace directe pour les Hongana Manyawa
La mine Weda Bay Nickel, exploitée par la compagnie française Eramet, est la plus grande mine de nickel au monde. Sur l’île d’Halmahera, elle avance à un rythme effréné sur les terres ancestrales des Hongana Manyawa, où environ 500 membres de cette communauté vivent en isolement volontaire, non contactés.
Selon des rapports internes d’Eramet, divulgués récemment, l’entreprise connaissait la présence de Hongana Manyawa non contactés depuis au moins 2013. Pourtant, elle a nié leur existence publiquement. Un déni qui souligne une fois de plus l’ampleur du conflit entre intérêts financiers et droits des peuples autochtones.
« Pour les Hongana Manyawa, ce projet représente la destruction de leur forêt et une condamnation à mort pour celles et ceux qui vivent non contactés », souligne Caroline Pearce, directrice de Survival International au Royaume-Uni.
L’exploitation du nickel, largement destinée à alimenter l’industrie des voitures électriques, met en lumière un paradoxe. Derrière l’image d’une transition énergétique « durable », des vies humaines et des écosystèmes millénaires sont détruits.
« Les entreprises s’enrichissent sur le dos de nos morts. Lorsque le monde découvrira qu’elles volent nos terres, elles auront honte », a déclaré Ngigoro.
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