Entre janvier et mars 2021, au sud de l’Ardèche, la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) a découvert 35 cadavres de divers rapaces. Une enquête a conclu que ces derniers avaient été empoisonnés au carbofuran et aux anticoagulants. La LPO a ainsi porté plainte pour destruction d’espèces protégées, et souhaite par ce biais sensibiliser sur le sujet.
Sur les plusieurs centaines de rapaces d’Ardèche, 20 buses et 15 milans royaux ont été découverts morts dans les communes de Chauzon et Pradons. La LPO a décidé de mener l’enquête en 2021, avant de porter plainte.
Les analyses sur les cadavres des individus ont prouvé qu’ils ont étés empoisonnés au carbofuran et aux anticoagulants, dont l’utilisation est pourtant interdite depuis 2008.
Louis Granier, président en Drôme-Ardèche de la LPO, explique que les rapaces sont empoisonnés parce qu’ils consomment des espèces elles-mêmes empoisonnées, telles que des campagnols.
Il précise pour France3Régions : « Pour lutter contre ces rongeurs, on procède à l’épandage de pesticides et de raticides et ces oiseaux, qui sont des charognards opportunistes, consomment les cadavres et sont empoisonnés. »
Selon lui, la nouvelle est particulièrement déprimante du fait de la date d’interdiction des insecticides trouvés : 2008. 14 ans plus tard, ces produits sont toujours en circulation. Cela signifie que des personnes en ont conservé, ou bien qu’ils se fournissent par l’intermédiaire de réseaux parallèles, sur internet.
Louis Granier estime que ces empoisonnements sont de plus en plus fréquents. Même si identifier les auteurs de ces actes pourrait être une opération difficile, la LPO souhaite sensibiliser le public sur l’importance de la chaîne alimentaire.
Le président de l’association ajoute : « Dans les chaînes alimentaires, il y a toujours quelqu’un qui se nourrit de quelqu’un d’autre. Si on empoisonne le début de la chaîne alimentaire, fatalement, les grands prédateurs en souffrent. »
Chaque maillon de la chaîne alimentaire a son importance dans le bon fonctionnement d’un écosystème. Si les insectes, les rats ou les campagnols disparaissent, leurs prédateurs disparaissent également.
En France, 30 % des oiseaux ont disparu en 20 ans. Les passereaux sont particulièrement concernés. L’hirondelle de fenêtre par exemple, a connu un déclin régulier de 41 % de ses individus entre 1989 et 2009. Les pesticides ne sont pas étrangers à cette disparition.
Derrière cette hécatombe, deux facteurs : le réchauffement climatique et l’usage des pesticides, ainsi que des insecticides.
Les prédateurs sont chassés, et les insecticides utilisés pour se débarrasser de leurs proies, des rongeurs ou des insectes, finissent dans les estomacs des oiseaux. L’exposition répétée à ces substances leur est fatale.
Par ailleurs, deux études de 2018 menées par le CNRS démontrent que le déclin des oiseaux s’accélère depuis 2008. Dans ce cadre, 239 carcasses d’oiseaux avaient été ramassées dans des zones de cultures céréalières : 70 % des cas relevaient de l’empoisonnement aux pesticides.
Selon Louis Granier, le nombre de rapaces tués est certainement sous-estimé, certains cadavres pouvant être mangés par des renards. Il appelle le public, propriétaires de jardins et de champs agricoles à prendre en considération les conséquences d’actes individuels, sur le Vivant ou judiciaires.
« Tous les rapaces sont protégés en France depuis 1976. Les peines encourues pour empoisonnement peuvent aller jusqu’à plusieurs dizaines de milliers d’euros d’amende, voire des peines de prison ferme, en fonction de la gravité des agissements. »
Crédit photo couv : Milan royal retrouvé mort – Sébastien Blache/LPO Ardèche