Après une fuite fin août, le GIEC présente officiellement son dernier rapport sur l’état des océans et de la cryosphère, les régions gelées de la planète. Comme le reste du vivant, ces deux entités vivantes sont en état critique. Le GIEC explique pourquoi il est vital d’agir de toute urgence, et les solutions à mettre en œuvre.
Deux entités en état critique
Pour ce rapport spécial sur les océans et la cryosphère, plus de 100 chercheurs issus de 36 pays en ont étudié les dernières 7 000 publications scientifiques dans le contexte du changement climatique. Ce rapport a pour objectif d’influencer les décideurs politiques à enfin prendre des mesures concrètes et contraignantes lors des prochaines négociations sur le climat et l’environnement, comme lors de la COP25 qui aura lieu au Chili en décembre 2019.
Les océans et la cryosphère sont indispensables au maintien de la vie sur Terre telle que nous la connaissons. L’Océan recouvre 71 % de la surface de la Terre et représente 97 % de toute l’eau de la planète, contre 3 % d’eau douce. Environ 10 % des sols terrestres sont couverts par des glaciers ou des couches de glace.
L’Océan et la cryosphère abrite des habitats uniques, et sont interconnectés avec le climat à travers le cycle de l’eau, de l’énergie et du carbone. L’ensemble de l’humanité et de toutes les espèces animales et végétales sont ainsi directement dépendantes du bon état de santé des océans et de la cryosphère.
« Dans le monde entier, la cryosphère et les océans subissent « les ardeurs » du changement climatique depuis des décennies, ce qui a des conséquences radicales et profondes sur la nature et l’humanité. Depuis les villes côtières jusqu’aux communautés isolées de l’Arctique, les changements rapides que connaissent l’océan et les régions gelées de notre planète forcent des populations à modifier radicalement leur mode de vie. » a déclaré Ko Barrett, vice-présidente du GIEC.
D’une façon générale, les phénomènes déjà en cours, comme l’acidification de l’océan et la montée des eaux, vont s’aggraver au cours des prochaines années sur la trajectoire du « business as usual ». En 2100 :
- Plus de 15 % des animaux marins risquent de mourir, dont certaines extinctions d’espèces
- Le niveau de la mer pourrait augmenter de plus d’1m d’ici 2100, forçant des centaines de millions de personnes à se déplacer et submergeant des îles et des côtes entières
- La surface de l’océan pourrait se réchauffer de 3°C ce qui déclencherait une hécatombe des récifs coralliens et asphyxiera de nombreuses espèces animales et végétales
- Avec le réchauffement de l’eau, les catastrophes climatiques comme les typhons seront de plus en plus intenses et auront lieu chaque année
- 70 % du pergélisol pourrait être complètement détruit, ce qui relâcherait d’immenses quantités de dioxyde de carbone et de méthane dans l’atmosphère, entraînant des réactions en chaîne imprévisibles
L’urgence d’agir pour protéger le vivant
Face à l’état critique dans lequel se trouve actuellement ces deux entités vivantes, le GIEC sonne, à nouveau, l’alarme pour appeler l’humanité à se mettre en branle pour limiter l’ampleur des changements auxquels sont confrontés l’océan et la cryosphère. Malgré la situation dramatique, de nombreuses vies animales (humaines et non-humaines) et végétales peuvent encore être protégées, et de nombreuses souffrances évitées. Pour le GIEC, les dégâts seront inévitables mais il est temps d’éviter le pire.
« Si nous réduisons fortement les émissions (de gaz à effet de serre), les conséquences pour les populations et les moyens d’existence n’en seront pas moins éprouvantes, mais elles pourraient être plus faciles à gérer pour les populations les plus vulnérables. » a déclaré Hoesung Lee, président du GIEC.
En plus de réduire les émissions de GES et arrêter de polluer, le GIEC urge l’humanité à adopter un rôle de protection et de régénération des écosystèmes, en arrêtant de pêcher lorsque ce n’est pas indispensable à la survie d’une population et en laissant tranquille la haute-mer, ce qui impliquerait de ne pas se lancer dans l’extraction des minerais en eaux profondes. En particulier, le rapport du GIEC réitère l’importance d’impliquer les populations locales et autochtones dans la protection de leur habitat, et de s’appuyer sur leur savoir plutôt que de prendre des décisions technicistes déconnectées de toute réalité du terrain.
Pour Debra Roberts, co-présidente du Groupe de travail II du GIEC :
« Plus nous agirons rapidement et de manière décisive, plus nous serons en mesure de faire face aux changements inévitables, de gérer les risques, d’améliorer nos vies et d’assurer la durabilité des écosystèmes et des populations du monde entier – aujourd’hui comme demain. »