A 1500m d’altitude, des mesures réalisées au Puy-de-Dôme ont révélé la présence dans le ciel, jusqu'à 140 tonnes, de 32 pesticides dont certains sont interdits depuis plusieurs années.
Comme au Japon, les pesticides sont aussi massivement présents dans les nuages en France. Une étude franco-italienne, parue dans la revue Environmental Science & Technology et également disponible sur le site de l’Université Clermont Auvergne, a analysé six échantillons d’eau de nuage prélevés entre l’été 2023 et le printemps 2024 au sommet du puy de Dôme.
Résultat : 32 substances chimiques ont été identifiées, parmi lesquelles des fongicides, insecticides, herbicides, biocides et produits de dégradation.
« Dans au moins un tiers des échantillons, la concentration totale de pesticides est supérieure à la limite de qualité pour l’eau potable », alerte l’équipe scientifique.
Selon la couverture nuageuse, entre 6 et 140 tonnes de pesticides gravitent ainsi dans le ciel français. Un choc pour les scientifiques.
« En lançant ce projet, je m’attendais à ne trouver que quelques kilos », raconte Angelica Bianco, chercheuse au laboratoire de météorologie physique (CNRS, université Clermont-Auvergne), pour Le Monde.
Ces mesures ont été effectuées de sorte à exclure les contaminations causées par le transport local de masses d’air des zones agricoles alentour. Les pesticides quantifiés seraient donc une estimation en-deçà de la réalité, d’autant plus que le glyphosate, pesticide le plus utilisé en France et dans le monde, n’a pu être recherché dans les échantillons.
Parmi les substances toxiques retrouvées par les chercheurs, certaines sont prohibées depuis plusieurs années, prouvant la longévité de ces molécules dangereuses dans l’environnement. Ainsi, l’atrazine est un herbicide interdit en Europe en 2003, tandis que la carbendazime est un fongicide dont la commercialisation a cessé en 2008.
Les scientifiques expliquent leur durée dans le temps par plusieurs hypothèses : un transport atmosphérique sur de longues distances, des usages illégaux, ou une remise en circulation par l’irrigation, lorsque l’eau des nappes phréatiques est contaminée.
Invisible, cette pollution pose de sérieux problèmes, puisque cela signifie que les pluies peuvent contaminer des lieux éloignés des zones agricoles. Or, à ce jour aucune étude n’est capable de dire à partir de quelles doses des précipitations régulières peuvent affecter les organismes humains. Sans oublier la faune et la flore sauvages qui sont fatalement touchées elles aussi.
Une chose est sûre, comme pour les microplastiques, des plus hauts sommets des montagnes aux plaines en vallée, aucune région de France n’est désormais épargnée par les pesticides.
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