Le gouvernement vient de modifier un arrêté autorisant de tirer sur les loups pour des troupeaux de bovins et d’équins déclarés comme « ne pouvant être protégés ». Une décision dangereuse pour la conservation du loup, selon le Conseil National de Protection de la Nature.
Vendredi 17 janvier, s’est achevée une « consultation publique » sur la politique de gestion du loup en France, lancée fin décembre par le gouvernement. Il projette de modifier son arrêté du 21 février 2024 qui fixe « les conditions et limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées par les préfets ».
Cette modification inclurait notamment des possibilités de tirs pour des troupeaux de bovins et d’équins déclarés comme « ne pouvant être protégés » suite à des analyses de vulnérabilité. La mise en place de moyens de protection est normalement nécessaire à l’autorisation de tirs dérogatoires.
La notion de « non-protégeabilité des troupeaux » est contestée. En 2023, le Conseil National de la Protection de la Nature (CNPN) – institution rattachée au ministère de la Transition écologique – avait rendu un avis très défavorable autour de cette dernière, l’estimant « dangereuse pour la conservation du Loup, car elle induit le recours à sa destruction dans ses secteurs de colonisation ». L’organisme citait un rapport précédent qui recommandait « d’abandonner la disposition relative à la « non-protégeabilité » », a minima pour des bovins.
Dans un avis émis en 2023 sur le Plan National d’Actions (PNA) loups 2024-2029, la Fédération des parcs naturels régionaux de France (FPNRF), estimait quant à elle que la « non-protégeabilité des troupeaux » devait permettre aux éleveurs de disposer du temps nécessaire « à l’adaptation de leurs pratiques » sans pour autant « se dérober aux obligations de protection ». La fédération considérait également que cette notion devait « se limiter à une partie d’exploitation, non à un territoire ni à une exploitation entière ».
Dans de nombreux secteurs de plaines ou de moyennes montagnes où le loup fait son retour, certains acteurs réclament en effet que des régions entières soient reconnues comme « difficilement protégeables ». Une telle zone existe déjà depuis 2019 sur les lieux de production du Roquefort, au sud du massif central.
Sans nécessairement valider cette option, certains chercheurs reconnaissent la difficulté à adapter les moyens de protection mis en œuvre dans les Alpes depuis 30 ans, à des régions où les contextes socio-économiques, écologiques et géographiques sont bien différents. Ils appellent néanmoins à s’appuyer davantage sur les connaissances scientifiques plutôt que sur des tirs « tous azimuts ». Farid Benhammou, géographe étudiant les relations entre humains et grands carnivores, rappelle que « la corrélation entre tirs et réduction de la prédation n’est pas prouvée scientifiquement ».
Les contributions à la consultation publique, dans la très grande majorité des cas, présentent des avis défavorables à la modification de l’arrêté. Reste à voir si ces avis – plusieurs milliers – seront pris en compte.
S’informer avec des médias indépendants et libres est une garantie nécessaire à une société démocratique. Nous vous offrons au quotidien des articles en accès libre car nous estimons que l’information doit être gratuite à tou.te.s. Si vous souhaitez nous soutenir, la vente de nos livres financent notre liberté.