Les animaux, et plus particulièrement les singes, savent se soigner eux-mêmes, y compris grâce aux plantes qui les environnent. Mais pour l’une des premières fois, des scientifiques ont observé l’orang-outan Rakus se fabriquer une pommade à base de plantes afin de soigner sa blessure au visage.
Un grand singe vient rappeler aux sociétés modernes ce que nous tentons de retrouver : les plantes permettant de nous soigner sont tout autour de nous si nous savons les reconnaître et les utiliser à bon escient. Une démarche encore difficile en France alors que l’herboristerie est illégale depuis le régime de Vichy en 1941.
Il est désormais reconnu par la communauté scientifique que les animaux non humains se transmettent aussi leurs propres cultures et traditions, dont des techniques d’automédication. Les singes ont déjà démontré ces types de comportements ainsi que le raconte la primatologue Sabrina Krief, la « Jane Goodall française », dans notre livre-journal ANIMAL.
Au cœur de la forêt ougandaise, une communauté de chimpanzés possède une connaissance extraordinaire des plantes sauvages, à tel point que la scientifique a pu les observer en train de créer leurs propres médicaments. Mais cette automédication reste souvent difficile à documenter en raison de la difficulté de prédire son apparition.
C’est pourquoi les scientifiques ont été enthousiasmé par l’observation de l’orang-outan Rakus en la matière. Trois jours après avoir été blessé au visage, il a arraché sélectivement les feuilles d’une liane du nom commun Akar Kuning (Fibraurea tinctoria), les a mâchées, puis a appliqué à plusieurs reprises le jus obtenu sur la plaie du visage. Comme dernière étape, il a entièrement recouvert la plaie avec les feuilles mâchées.
Présentes dans les forêts tropicales d’Asie du Sud-Est, cette liane et les espèces apparentées sont connues pour leurs effets analgésiques, antipyrétiques et diurétiques et sont utilisées en médecine traditionnelle pour traiter diverses maladies, telles que la dysenterie, le diabète et le paludisme.
Des analyses antérieures de ses composés chimiques végétaux montrent la présence de furanoditerpénoïdes et d’alcaloïdes protoberbérine, connus pour leurs activités antibactériennes, anti-inflammatoires, antifongiques, antioxydantes et autres activités biologiques pertinentes pour la cicatrisation des plaies.
Pour les scientifiques, « ce comportement potentiellement innovant présente le premier cas systématiquement documenté de traitement actif des plaies avec une espèce végétale connue pour contenir des substances biologiquement actives par un animal sauvage et fournit de nouvelles informations sur les origines du soin des plaies humaines. »