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Inondations dans le Pas-de-Calais : « En France, les réfugiés climatiques existent déjà »

Conséquence directe des inondations dans le Pas-de-Calais : 6 500 habitations ont été sinistrées dans le département en novembre et 2 800 en janvier.

Depuis novembre dernier, le département des Hauts-de-France doit faire face à des inondations historiques, qui ont contraint certains habitants à laisser derrière eux leurs habitations inondées et à chercher refuge ailleurs. Des sinistrés que certaines associations qualifient de « réfugiés climatiques » bien que le terme manque encore d'un cadre juridique clair.

Des milliers de personnes délogées par les inondations

Dans le Pas-de-Calais, les semaines se succèdent et avec elles leur lot de catastrophes. Après des pluies historiques en novembre 2023, qui ont entraîné trois semaines de crues, de nouvelles inondations ont eu lieu en janvier 2024. Plus récemment encore, la Canche est à nouveau sortie de son lit le 8 février dernier, provoquant l’inondation partielle du village de Brimeux. L’ensemble du département a, lui, été placé en vigilance orange ce week-end du 10 février pour risque de « crues ».

Conséquence directe de ces inondations : 6 500 habitations ont été sinistrées dans le département en novembre et 2 800 en janvier, chiffre la préfecture. Près de 300 demandes de relogement temporaire ont par ailleurs été déposées. 

A Longuenesse, dans le Pas-de-Calais, un « village des sinistrés » a vu le jour, rapportent également nos confrères de Reporterre. Une dizaine de familles y ont emménagé dans des mobile-homes, faute de pouvoir retourner chez elles, et sans savoir combien de temps elles devront y rester. 

« Quand l’État intervient, il est déjà trop tard »

Une situation catastrophique, qui a poussé Gabriel Attal à se rendre à plusieurs reprises dans le Pas-de-Calais depuis le début de l’année et à annoncer plusieurs mesures phares, comme mobiliser 50 millions d’euros pour la reconstruction des équipements publics, ainsi que renforcer le fonds d’urgence pour les agriculteurs et les maraîchers. Des mesures qui ne constituent pas pour autant une réponse étatique satisfaisante, selon l’association Oxfam. 

« Dans le Pas-de-Calais, mais ça vaut aussi ailleurs, quand l’État intervient, il est déjà trop tard, fustige Quentin Ghesquière. L’État réagit a posteriori au lieu d’agir… C’est comme s’il n’était pas en mesure de prévoir ce qui se passe, alors même que les experts tirent la sonnette d’alarme en permanence sur les conséquences du changement climatique, continue le chargé de campagne et plaidoyer “inégalités climatiques” d’Oxfam. Il est urgent de mettre en œuvre une politique réelle et ambitieuse d’adaptation au changement climatique ».

Des « réfugiés climatiques » en France

Alors que les inondations du Pas-de-Calais nous rappellent tristement l’urgence de s’adapter aux conséquences du changement climatique, l’association Oxfam défend également l’importance de reconnaître un statut spécifique aux victimes du changement climatique, celui de « réfugié climatique ».  A l’heure actuelle, ce statut n’existe pas à proprement parler, puisqu’aucun accord de profondeur n’a été convenu internationalement pour le consacrer.

Pourtant, d’après le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), depuis 2008, 21,5 millions de personnes sont déplacées de force en moyenne chaque année à travers le globe à cause de catastrophes telles que des inondations, des tempêtes, des incendies ou des températures extrêmes. 

Ces déplacements forcés de population n’échappent pas à la France, au contraire, explique Quentin  Ghesquière : « On manque encore d’un cadre juridique, certes, mais dans les faits, en France comme dans de nombreux autres pays, les « réfugiés climatiques » existent déjà, soutient-il. On le voit avec les habitants du Pas-de-Calais, qui ont dû quitter leurs maisons suite aux inondations, mais aussi avec les habitants du département ultramarin de Mayotte », continue-t-il, contraints pour certains de quitter l’île à cause de la crise de l’eau qui frappe très durement le territoire. 

« Sans compter que quand Marseille aura le climat de Séville, il y a certainement des gens qui partiront si rien n’est fait pour adapter la ville, développe le professionnel. Et puis avec la fonte des glaciers, des stations de ski vont aussi devoir fermer, ce qui va certainement entraîner d’autres migrations. La liste des exemples est longue… »

© Anadolu via AFP

Réfugiés climatiques, des mesures fortes à prendre

Tandis qu’à l’échelle mondiale, les projections présentent une progression titanesque, qui va de 260 millions de réfugiés climatiques en 2030 jusqu’à 1,2 milliards en 2050, en France, le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, a récemment annoncé l’ouverture d’une discussion nationale sur l’adaptation au changement climatique. Cette discussion doit précéder la publication à l’été prochain du troisième Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC-3). 

Initialement créé en 2011, ce dernier vise à présenter des mesures concrètes pour limiter les effets du changement climatique en France. Pour sa troisième révision, il s’agit tout particulièrement de préparer la France à un réchauffement de + 4°C d’ici à la fin du siècle. 

« Le précédent PNACC était une coquille vide. Cette fois, il est impératif que des mesures fortes soient prises », avance Quentin Ghesquière. 

Pour ce faire, l’association prépare actuellement un rapport à paraître mi-juin sur les mesures à mettre en œuvre pour s’adapter au changement climatique. Parmi ses recommandations, Oxfam appelle notamment à une prise en compte systématique de la question des inégalités face au changement climatique, ainsi qu’à doter le PNACC d’une réelle valeur juridique. 

« Pour le moment, le PNACC n’est pas opposable, précise Quentin Ghesquière.On demande à ce qu’il le soit, afin que l’État puisse être attaqué s’il ne respecte pas ses engagements. » Et de conclure : « Il en va du respect des droits humains, dans le Pas-de-Calais comme n’importe où ailleurs en France ».

Source : « Inondations : au « village des sinistrés » du Pas-de-Calais », Reporterre, 10/02/2024

Cecile Massin

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