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Vers une libéralisation sauvage du Code du travail et un capitalisme « western »

La nouvelle mouture du Code du travail voulue par Emmanuel Macron, qui a annoncé pendant la campagne présidentielle vouloir changer les choses « au plus vite », devrait être révélée d’ici le mois d’août. Profitant de la période estivale pour faire passer cette réforme, c’est presque sans débats parlementaires que la nouvelle législation sera mise en place […]

La nouvelle mouture du Code du travail voulue par Emmanuel Macron, qui a annoncé pendant la campagne présidentielle vouloir changer les choses « au plus vite », devrait être révélée d’ici le mois d’août. Profitant de la période estivale pour faire passer cette réforme, c’est presque sans débats parlementaires que la nouvelle législation sera mise en place grâce à l’article 38 de la Constitution. Une refonte du Code du travail qui s’annonce particulièrement néfaste pour les salariés, remettant en cause des acquis sociaux de longue date.

Pourquoi cette nouvelle réforme du droit du travail n’est pas une bonne nouvelle pour les salariés…

Loin de penser qu’une réforme du droit du travail – parfois instable ou inadapté aux nouvelles réalités de la vie salariale – n’est pas nécéssaire, il est primordial de pointer du doigt le fait que la démarche entreprise par Emmanuel Macron ne sert en rien l’adaptation du droit aux nouveaux défis qui attendent nos sociétés. L’objectif poursuivi n’est pas moderne, loin de là, et renforce simplement le pouvoir des employeurs dans les rapports qu’ils entretiennent avec les salariés.

Pour satisfaire les exigences de l’Union européenne, Macron abdique et sacrifie les acquis sociaux des travailleurs sur l’autel du libéralisme. Une réforme qui consisterait – selon les documents parus dans Libération – en une flexibilisation encore plus outrancière du marché du travail, dans la droite lignée de la loi El Khomri.

Au programme ? Nouvelles pressions sur les salaires, disparition des sécurités contre les licenciements abusifs et affaiblissement du poids des syndicats dans les négociations… pas de quoi se réjouir !

L’inversement de la hiérarchie des normes et la prévalence des accords d’entreprise

Le principe de la hiérarchie des normes – théorisée par le juriste Hans Kelsen – est l’un des principes fondateurs de notre système juridique. Il consiste en la prévalence de certaines normes, jugées plus importantes car ayant une légitimité supérieure sur d’autres. Les lois par exemple, exprimant directement la volonté du peuple à travers le processus législatif, sont sensées exprimer la volonté générale des citoyens et prévalent donc sur des accords pris au sein de l’entreprise même. Jusque là, tout est normal.

Ce principe fondateur avait déjà connu des exceptions avec la loi El Khromri, et est en passe d’être encore plus durablement remis en cause avec la nouvelle réforme. Cette dernière devrait donner encore plus de poids aux accords d’entreprise, au détriment des accords de branche et de la loi. Les documents révélés par Libération font ainsi mention du fait que les employeurs pourront bientôt librement négocier les causes de licenciement, jusqu’alors fixées limitativement dans la loi pour prévenir les abus.

La mise en place d’un tel fonctionnement – c’est-à-dire plus ou moins la mise en place d’un Code du travail spécifique au sein de chaque entreprise – renforce l’installation durable d’une concurrence accrue entre les différents opérateurs économiques, leurs permettant de faire du coût du travail une variable d’ajustement de la maximisation de leurs profits.

La précarisation des employés, « parties faibles » du contrat de travail

C’est la négation du rapport de force salarié/employeur qui est au coeur de la philosophie de cette réforme. Il faut en effet tenir compte de l’inscription spécifique de ce type de contrat dans les rapports de production, et donc de classe. Le salarié, aussi appelé « partie faible au contrat » est engagé dans un rapport déséquilibré où l’employeur prédomine (et d’autant plus lorsque l’offre de travail est très importante pour une faible demande).

Ainsi l’évincement progressif des syndicats – en facilitant la prise de décision à l’échelle de l’entreprise où ces derniers sont historiquement peu présents – apparait comme une très mauvaise nouvelle pour la protection des droits des travailleurs. On assiste à un véritable déplacement des lieux de décision vers des espaces où les travailleurs sont plus vulnérables. Combiné à la mise en place des « référendums d’entreprise » – processus faussement démocratique qui précarisent les salariés en désaccord avec l’employeur – cette mesure pourrait s’avérer particulièrement critique. Les salaires pourraient ainsi être renégociés à la baisse, au sein même de l’entreprise et ce avec une marge d’action très limitée des salariés.

Selon l’INSEE, le Code du Travail n’est pas un frein à l’embauche !

« Moins de 18 % des entreprises affirmaient ne pas embaucher à cause de la règlementation du marché de l’emploi »
Alors que le gouvernement martèle que cette réforme a pour principal objectif de relancer l’emploi et la croissance, une étude de l’INSEE sortie le 20 juin dernier arrive au parfait moment pour relancer le débat sur le réel poids du Code du travail. Cette étude, lancée en janvier 2017, a sondé directement les entreprises en leur demandant quels étaient – selon elles – les principaux freins à l’embauche.

Moins de 18 % des entreprises affirmaient alors être freinées par des obstacles dus à la règlementation du marché de l’emploi lors du recrutement (on peut y ajouter le coût de l’emploi jugé trop élevé pour 23% des entreprises). Les principales raisons invoquées sont le manque de main-d’œuvre qualifiée (27 %) ou la conjoncture économique trop défavorable (28 %).

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Charlotte Dressel

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