Boyan Slat s’est fait connaître en 2012 en participant à la conférence TED, pour présenter son projet de machine pouvant nettoyer les océans du plastique. La popularité de ce tout jeune ingénieur néerlandais de 19 ans lui a permis de récolter 2 millions de dollars en financement participatif pour le projet, qui n’a pas passé l’étape du test, car la plateforme se déplaçant trop lentement, les plastiques ressortaient du filet, et la barrière a fini par se briser. Deux ans plus tard, un autre projet pour nettoyer les océans entre le Japon et la Corée du Sud est avorté, le prototype subissant d’importants dégâts.
Cet automne, Boyan Slat est revenu avec l’annonce de la création de la péniche The Interceptor, qui vise à récolter 50 tonnes de déchets par jour en fonctionnant par énergie solaire. L’objectif est de se déployer dans les cinq prochaines années sur les 1 000 rivières les plus polluées du monde.


Même si Boyan Slat parvenait à ces objectifs, le problème de la pollution des océans par le plastique serait loin d’être résolu, puisque le plus grand danger tant pour la faune que la flore marine, sont les microparticules de plastique, trop petites pour être captées par un tel système. Seul 1 % du plastique rejeté dans l’océan reste en surface.
En France, un autre jeune ingénieur de 24 ans, Alexandre Dechelotte, prend le problème plus en amont, et entreprend un tour du monde pour tenter de revaloriser le plastique afin d’éviter qu’il ne se retrouve dans les océans. Un projet de longue haleine où il est question de comprendre les enjeux locaux, culturels, et d’aider à construire de petites usines de recyclage du plastique.
Le jeune homme rappelait alors que le processus serait long :
« Rappel aux médias (et aux critiques) qui aiment écrire que « le nettoyage des océans ne fonctionne pas »: la plupart des aspects de ce concept sont confirmés (girouette, interception du plastique, suivi des vagues – Le système n’avance pas assez vite, mais nous pouvons y remédier. »
Car l’ingénieur est devenu un objet médiatique très convoité, et la cause écologique elle-même devient un sujet qui fait du buzz, surtout quand une figure d’adolescent l’incarne. Dans un entretien accordé à National Geographic, non daté sur le site mais qui est antérieur à 2018, alors que Boyan Slat déclare :

“Je pense que ces deux solutions combinées permettront une réduction drastique de déchets plastiques dans l’océan entre 2040 et 2050. Je suis persuadé que les océans seront à nouveau propres à cet horizon” , l’article titre en ouvrant des guillemets “D’ici 2050, nous aurons éliminé la pollution plastique des océans”.
Devant l’urgence de la menace, mais surtout parce que nous sommes dans une société de l’immédiateté, nous voudrions des solutions immédiates qui fassent de beaux titres dans la presse.
“Une machine pour nettoyer les océans”, ça attire mieux le clic que “Nous travaillons à élaborer des prototypes qui pourraient contribuer en partie…” Nous voulons des solutions entières qui éradiqueront un problème à elles toutes seules. Mais la création travaille bien plus lentement que la destruction. Nous avons le choix de croire à notre utopie parce qu’elle nous fait du bien, ou de regarder la complexité du réel et de retrousser nos manches.