Les scientifiques du GIEC le disent eux-mêmes : la responsabilité des médias est immense pour que les populations prennent conscience du défi écologique que nous vivons. Pourtant, l’écologie reste bien trop souvent cantonnée à une simple rubrique. Face à la montée en puissance du dérèglement climatique, un collectif de médias et de journalistes, dont fait partie La Relève et La Peste, a décidé d’aider leurs pairs en créant une « Charte pour un journalisme à la hauteur de l’urgence écologique ».
L’écologie reste bien trop souvent cantonnée à une simple rubrique, alors qu’elle devrait être le prisme à travers lequel penser tous nos sujets de société. Quant aux journalistes traitant sérieusement des questions autour de ce sujet, ils sont souvent considérés comme des « personnalités engagées pour le climat » plutôt que comme des vulgarisateurs scientifiques.
Pourtant, les études scientifiques les plus pessimistes n’avaient pas anticipé ce que nous vivons déjà : la crise climatique s’accélère et s’intensifie à un rythme sans précédent, alerte le GIEC. Cet été 2022 en a été la sombre démonstration : vagues de chaleur, sécheresse records, premiers mégafeux en France, inondations, orages et pluies diluviennes, les français.es ont vécu dans leur chair ce que signifie vivre dans un monde à +1,1°C de réchauffement.
Malgré cet été caniculaire, seuls 3% à 5% des JT ont mentionné l’impact de la crise climatique lors des reportages sur le sujet, selon le décompte du collectif Climat Médias.
Pire, certains médias sont carrément en décalage avec la gravité de la situation en publiant des images d’enfants jouant dans l’eau pour avertir sur les vagues de chaleur à venir. Or, les trois épisodes de canicules de juin, juillet et août 2022 auraient provoqué 11 000 décès supplémentaires par rapport à la période d’avant Covid, en 2019, selon un rapport de l’INSEE.
Quant à d’autres, ils continuent carrément d’inviter des climatosceptiques sur leurs plateaux TV, à tel point que des scientifiques du GIEC se sont vus obligés de sortir de leur réserve et d’alerter le CSA sur le sujet. Même durant les élections présidentielles, alors que pour la première fois deux rapport du GIEC ont paru sur le sujet, les médias n’ont accordé au maximum que 5 % de leur temps aux enjeux climatiques.
Heureusement, les français.es ne sont pas dupes : 53% des français.es estiment que les médias n’accordent pas assez de place à l’environnement et au climat ; un tiers juge « anxiogène » ou « catastrophiste » le traitement de ces sujets. Plus de la moitié en souhaiterait un récit « constructif » et « porteurs de solutions », selon une étude Vivavoice de 2021.
Comme l’ont rappelé les experts du Giec dans leur dernier rapport, les médias « cadrent et transmettent les informations sur le changement climatique. Ils ont un rôle crucial dans la perception qu’en a le public, sa compréhension et sa volonté d’agir ».
C’est pourquoi, face à ces écueils, un collectif de journalistes d’horizons variés a travaillé pendant des mois pour créer une « Charte pour un Journalisme à la hauteur de l’urgence écologique » qui paraît aujourd’hui.
En 13 points, cette charte, pensée comme une boussole, propose des repères et invite chacun, spécialistes et non-spécialistes, à interroger ses pratiques.
Déjà signée par plus de 500 journalistes, 50 rédactions, une dizaine de syndicats et collectifs ainsi que la conférence des écoles de journalisme, elle est dévoilée aujourd’hui à travers une tribune sur franceinfo et un site internet dédié. Elle est également soutenue par des scientifiques de renoms comme Valérie Masson Delmotte ou Christophe Cassou.
Tou.te.s les journalistes, rédacteur·ices en chef et directeur·ices de rédactions sont invitées à s’emparer de ce document afin d’améliorer collectivement la médiatisation de ces enjeux cruciaux pour les générations actuelles et à venir. Et de permettre aux citoyen·nes et à leurs représentant·es de faire des choix – individuels et collectifs – éclairés qui garantissent la préservation de bonnes conditions de vie sur Terre.
Crédit photo couv : Martin Bertrand / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP