Un problème de démocratie
Au cours de son interview, Nicolas Hulot a pointé le problème des lobbys au sommet de l’Etat.
« On avait une réunion sur la chasse, avec une réforme importante pour les chasseurs et surtout pour la biodiversité, mais j’ai découvert la présence d’un lobbyiste qui n’était pas invité à cette réunion. »
La réunion, c’est celle organisée lundi soir par Emmanuel Macron. Une réunion de haut niveau sur la chasse, en présence de Nicolas Hulot et de son secrétaire d’Etat Sébastien Lecornu, ainsi que de Willy Schraen, président de la FNC (Fédération nationale des chasseurs).
Le lobbyiste, c’est Thierry Coste, conseiller politique de la FNC. Proche de Nicolas Sarkozy en 2007 et de François Hollande en 2012, il conseille régulièrement Emmanuel Macron sur les questions de ruralité. Les dossiers cygénétiques – qui concernent les actions sur la faune sauvage – en font partie.
« C’est symptomatique de la présence des lobbys dans les cercles du pouvoir. Il faut à un moment ou un autre poser ce sujet sur la table, parce que c’est un problème de démocratie : qui a le pouvoir, qui gouverne ? » s’est insurgé Nicolas Hulot.
Suite à la réforme de la chasse les chasseurs, ont obtenu par exemple une baisse du permis national de chasse de 400 à 200 euros.
Une accumulation de déceptions
Toutefois, Nicolas Hulot a assuré que cette réunion n’était pas la cause de sa décision. « C’est surtout parce que je n’y crois plus », a-t-il laché.
« Est-ce que nous avons commencé à réduire l’utilisation des pesticides ? La réponse est non. Est-ce que nous avons commencé à enrayer l’érosion de la biodiversité ? La réponse est non. Est-ce que nous avons commencé à se mettre en situation d’arrêter l’artificialisation des sols ? La réponse est non. »
Depuis sa nomination en mai 2017, le ministre a vu l’entrée en vigueur provisoire du CETA (l’accord de libre-échange UE-Canada) et le report de l’objectif visant à abaisser la part du nucléaire dans la production d’électricité à 50 % en 2025. Ce ne sont que quelques-unes des nombreuses décisions qui ont été prises en contradiction avec ses convictions.
Tout seul à la manœuvre
Enfin, lors de cette annonce, Nicolas Hulot a cherché à impliquer ses concitoyens. « Est-ce que la responsabilité c’est simplement la responsabilité du gouvernement ? » interroge-t-il.
« Je ne comprends pas que nous assistions globalement, les uns et les autres, à la gestation d’une tragédie bien annoncée dans une forme d’indifférence. » Il dénonce un véritable problème de société, un changement nécessaire que nous refusons d’opérer.
« On s’évertue à entretenir voire à réanimer un modèle économique, marchand, qui est la cause de tous ces désordres. (…) Je ne comprends pas comment après la conférence de Paris, après un diagnostic imparable qui ne cesse de se préciser et de s’aggraver de jour en jour, ce sujet est toujours relégué dans les dernières priorités. »
Pour Léa Salamé, co-présentatrice de la matinale, le ministre est apparu comme « un homme qui dit : sincèrement, je ne peux pas continuer, je suis trop seul, je n’y arrive pas. »
En témoignent ces questions qu’il a laissées en suspens :
« Est-ce que j’ai une société structurée, qui descend dans la rue pour défendre la biodiversité ? Est-ce que j’ai une formation politique ? Est-ce que j’ai une union nationale sur un enjeu qui concerne l’avenir de l’humanité et de nos propres enfants ? »