Au congrès mondial de la nature à Marseille, l’Union internationale de la conservation pour la nature (UICN) a rendu publique sa « Liste rouge » le 4 septembre, rapportant un nouveau constat sur l’effondrement du vivant. Cette dernière établit, depuis 1964, l’inventaire le plus vaste du statut de conservation des espèces animales et végétales du monde, ainsi que la liste des nombreuses menaces qui pèsent sur elles. Cette année, le choc est dur : 28% des espèces sont menacées d’extinction, soit exactement 38 543 sur 138 374 espèces étudiées.

Parmi les espèces concernées, l’imposant dragon de Komodo auparavant déjà classé dans la catégorie « vulnérable » est désormais répertorié comme espèce « en danger ». Le lézard d’une taille pouvant atteindre les 3 mètres de long vit dans des lieux secs aux sols sablonneux.
L’UICN avertit : « La hausse des températures et donc du niveau de la mer devrait réduire leur habitat d’au moins 30 % dans les 45 prochaines années ».
Il reste actuellement quelque 5000 individus à l’état sauvage, en Indonésie. De nombreux fléaux d’origine humaine participent à cette extinction : la perte d’habitat, la diminution du nombre de proie, le tourisme et le braconnage.
Sous l’océan, 37% des espèces de requins et de raies sont désormais menacées d’extinction sur les 1200 qui ont été étudiées, contre 24% en 2014.
31% d’entre elles font face à des pertes d’habitat, 10% subissent les conséquences du réchauffement climatique, et toutes sont victimes de la surpêche.
Cette réévaluation prend pour source une étude réalisée par un membre de l’université canadienne Simon Fraser, qui explique que l’exploitation des requins et des raies est bien trop souvent légalisée, autorisant une surpêche qui n’est pas soutenable.

A l’inverse, certaines espèces voient heureusement une hausse dans leur nombre d’individus.
Sur les sept espèces de thon les plus pêchées actuellement, quatre d’entre elles montrent des signes de récupération grâce à une lutte plus efficace dont l’application de quotas contre la pêche illégale.
Le thon rouge de l’Atlantique est notamment passé de la catégorie « En danger » à celle de « Préoccupation mineure ». Cependant, le thon reste encore surpêché dans divers endroits du globe : le thon albacore est victime d’un surplus d’exploitation dans l’océan indien, et le thon rouge du pacifique est passé de « Vulnérable » à « Quasi menacé »; une espèce si appauvrie qu’elle n’a plus que 5% de sa biomasse d’origine.
Le renouvellement des quatre espèces de thon est toutefois un signe encourageant dans notre action pour le vivant, comme le souligne Bruce Collette, président à l’UICN du groupe spécialisé sur les thons :
« Ces évaluations sont la preuve que les approches de pêche durable fonctionnent, avec des bénéfices énormes à long terme pour l’activité économique et la biodiversité ».

Par ailleurs, l’organisation a cette année déployé en parallèle un « Statut vert des espèces » pour mesurer précisément la régénération des espèces et établir l’impact de leur programme de conservation.
Pour Molly Grace, coordinatrice du groupe sur le travail sur le Statut vert : « Empêcher l’extinction n’est pas suffisant. Le Statut vert permet de rendre visible le travail invisible de la protection des espèces ».
Elle donne pour exemple le Condor de Californie dont la population ne s’élevait plus qu’à 9 individus en 1985, et qui grâce à sa réintroduction et protection, s’élève désormais à 300 individus dans son milieu naturel.
Ce statut permet donc de suivre et rendre visible le potentiel de rétablissement des espèces étudiées, bien que son chiffre ne s’élève pour l’instant qu’à 181 espèces, bien loin des 38 543 de la liste rouge.
Pratiquement 30% d’espèces en voie d’extinction, c’est cependant là le constat alarmant de la Liste rouge en 2021. Pour Craig Hilton-Taylor, responsable de son élaboration : « Si l’augmentation se poursuit à ce rythme, nous serons bientôt confrontés à une crise majeure. » Un rappel douloureux sur l’urgence de prendre soin du Vivant sous toutes ses formes.
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