Deux ans après l’affaire des moteurs truqués, Volkswagen revient sur ses promesses de transparence ; les actionnaires furieux, réagissent à cette annonce qui se devait d’être discrète. Sommes-nous à l’aube d’un nouvel épisode du scandale Dieselgate ?
Retour sur images
Le 18 Septembre 2015, l’EPA (Agence américaine de protection de l’environnement) publie un avis de violation du Clean Air Act contre le constructeur automobile allemand Volkswagen. En effet, l’agence de contrôle s’est rendue compte que l’un des leaders du marché automobile avait intentionnellement trafiqué environ 11 millions de moteurs diesel afin qu’ils passent les tests d’émissions de carbone haut la main, dont 500 000 vendus aux Etats-Unis. Afin de réagir à ces accusations, la marque charge le cabinet d’avocats Jones Day de procéder à une enquête poussée. Parallèlement, la marque fait son mea-culpa envers ses actionnaires et ses consommateurs en leur promettant une transparence totale sur l’issue de cette investigation. Seulement, chaque réunion d’actionnaires, chaque prise de parole se solde par des conclusions qui se mordent la queue : la date de sortie du rapport se voit repoussée à multiplies reprises, l’ampleur de la tâche est soulignée par des chiffres tels que 600 interviews, 100 millions de documents…
En début d’année, Volkswagen fait suite à son accord avec le ministère de la justice américaine lui permettant d’échapper aux poursuites judiciaires, en publiant le « Statement of Facts » résumant les grandes lignes de l’affaire. Jeudi, la justice américaine a approuvé le plan de la marque destiné à indemniser 78 000 propriétaires de voitures équipés de moteurs truqués (grosse cylindrée – 3L) ; au total, Volkswagen aura indemnisé 600 000 clients américains, en rachetant ou en mettant aux normes leurs voitures et/ou en versant des indemnités en liquide. Charles Breyer, le juge californien en charge du dossier a donné son feu vert à ce que la marque pensait être la dernière page du chapitre Dieselgate « Cela représente une importante étape pour Volkswagen et cela signifie qu’une solution est à la disposition de l’ensemble de nos clients dont les voitures sont concernées aux Etats-Unis ».
En somme, aucune information supplémentaire que celles contenues dans le « Statement of Facts » ne sera délivrée.
Les doutes augmentent et le coup est asséné
Mercredi 10 mai, le président du conseil de surveillance du groupe de Wolfsburg, Hans Dieter Pötsch a pris la parole face aux actionnaires afin de leur annoncer que l’enquête menée par Jones Day ne serait finalement pas publiée. Un an et demi de recherches et des milliers de téraoctets de données expliquant les tenants et les aboutissants du scandale se retrouvent alors relayés au secret le plus complet « Il n’y a pas, et il n’y aura pas de rapport final de Jones Day ». En somme, aucune information supplémentaire que celles contenues dans le « Statement of Facts » ne sera délivrée. Le groupe tente de se justifier par le fait que ce scandale lui a déjà coûté plus de 22 milliards d’euros d’amendes et que « toute autre décision serait démesurément risquée. Le directoire et le conseil de surveillance doivent tout faire pour éviter à l’entreprises d’autres dommages ». Il semblerait que cette annonce ait rappelé aux actionnaires leurs sueurs froides d’il y a un an et demi lorsque les actions de la marque ont chuté lors du scandale. Se contredisant ainsi, comment les actionnaires et les parties prenantes de la marque telles que les consommateurs, les employés, les agences environnementales etc. ne peuvent douter ? Christian Streneger, membre du conseil de surveillance de DWS Deutsche Asset Management est outré « Votre référence à l’énoncé des faits, accepté aux Etats-Unis, est totalement insuffisante et quasiment insultante vis-à-vis de tous ceux qui souhaitent une clarification complète des responsabilités ».

Même son de cloche du côté du gestionnaire de Deka Investments, le fonds d’investissements des caisses d’épargne allemandes « Que les résultats de l’enquête soient encore sous clé laisse penser qu’ils ne plaisent pas à Volkswagen ». La marque pensait en avoir fini avec cette histoire après la démission forcée du président du directoire Ferdinand Piëch suivi de près par le PDG Martin Winterkorn, le redressement de ses comptes financiers avec un bénéfice net de 5,1 milliards d’euros en 2016 (-20%) et surtout avec l’annonce d’un dividende de 2 euros par action, contre 11 centimes l’année dernière.
Les braises du scandale sont encore brûlantes
Si la large campagne de communication du groupe envers ses consommateurs n’a pas eu d’impact conséquent sur les ventes en entreprise et auprès des particuliers ; les actionnaires ne décolèrent pas. De plus, l’hebdomadaire économique Wirtschaftswoche a balancé un nouveau jet d’huile sur le feu : le parquet de Stuttgart enquêterait contre le (nouveau) PDG du groupe, Matthias Müller, le président du conseil de surveillance, Hans Dieter Pötsch, ainsi que contre l’ancien PDG ayant remis sa démission en 2015, Martin Winterkorn dans la même affaire du Dieselgate. Cette enquête aurait été requise par la plainte de l’autorité de surveillance des marchés financiers Bafin à l’été 2016 pour « soupçon de manipulation de marché ». Cette nouvelle procédure s’ajoute à la pile de poursuites liées à l’affaire des moteurs trafiqués ; en effet, Volkswagen fait l’objet de 40 enquêtes provenant de l’administration de 3 550 plaintes de propriétaires abusés. Si l’avenir de la marque semblait se stabiliser sérieusement, ces nouveaux rebondissements risquent de ternir un peu plus une image déjà écaillée

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