Le milieu de la finance se porte bien, merci. Un de ses principaux acteurs, la banque d’affaires Rothschild & Co, a publié mercredi dernier ses résultats pour l’exercice 2016-2017, et tous les indicateurs sont au vert. Avec 1,19 milliard d’euros de revenus, la maison d’origine française a établi pour la seconde année consécutive un record, notamment grâce à son incursion sur le marché américain. « Notre montée en puissance aux Etats-Unis va nous permettre d’accroître nos prises de parts de marché dans les prochains mois », a commenté Olivier Pécoux, Managing Partner de la banque.
La spécialité de Rothschild & Co est la fusion-acquisition, ou « fusacq », dans le jargon banquier : elle fait son beurre en conseillant des entreprises dans l’acquisition ou la vente de filiales, pour des montants qui dépassent régulièrement les neufs chiffres. Cette année, la banque a notamment travaillé sur le rapprochement entre l’industriel français Technip et l’entreprise américaine FMC Technologies, ou encore sur le rachat du géant de l’agro-alimentaire Monsanto, familier de nos lignes, par le non moins familier Bayer (pour la bagatelle de 66 milliards de dollars).
La face cachée de l’iceberg
Au niveau mondial, le secteur des fusions-acquisitions pesait en 2015 plus de 5 000 milliards de dollars, soit près du double du PIB de la France la même année. Sachant que l’essentiel de cet argent fonctionne en circuit fermé (il provient d’entreprises, qui le versent à d’autres entreprises, et ainsi de suite), les banques d’affaires ne faisant que prendre une commission au passage, l’ampleur du montant a de quoi soulever des interrogations.
Les entreprises qui brassent autant d’argent ne devraient-elles pas être contraintes, ou simplement encouragées, à en reverser une partie à la société civile (le mécanisme est déjà couvert par la taxe sur les plus-values, mais mériterait une amélioration) ?
De plus, les chiffres évoqués plus haut ont un deuxième effet pervers, plus insidieux : parce qu’elles brassent plus d’argent parfois que certains petits pays (le revenu seul de Rothschild & Co en 2016 équivaut au PIB de la Guinée-Bissau), les entreprises impliquées dans ces opérations sont de plus en plus déconnectées des réalités, ce qui pourrait les amener à passer outre les réglementations nationales, ou à négliger leurs employés pour plus de performance.
Du fait de son passé très remarqué dans les « couloirs feutrés » de la banque Rothschild & Co, Emmanuel Macron connaît bien ce monde secret à l’influence considérable. Osons espérer qu’il saura composer avec cette puissance méconnue pour œuvrer à plus d’égalité, sans la braquer en lui déclarant la guerre, comme a pu faire son prédécesseur.

Pour commander notre Manifeste, cliquez sur l’image !