Dans la foulée du scandale des fermes à sang qui saignent en Uruguay et en Argentine des juments gestantes afin de fournir les laboratoires pharmaceutiques européens, PETA Etats-Unis (People for the Ethical Treatment of Animals) révèle que le même type de traitement est réservé à d’anciens lévriers de course dans une ferme à Cherokee (Texas) : enfermés dans des cages et régulièrement saignés pour fournir une Pet Blood Bank (Banque de sang animal), tout cela dans des conditions de vie déplorables. Ce sang est ensuite distribué, principalement par Patterson Veterinary Supply Inc., une entreprise pesant pour plus de 3 milliards de dollars de vente uniquement en 2016. Seulement, l’affaire se révèle plus complexe que prévu : de nombreuses contre-enquêtes ne montrent aucune trace des affirmations de PETA.
Un ancien employé dénonce les conditions de vie atroces des chiens
Bill Larsen, 60 ans, est l’ancien employé de cette ferme qui a fourni à PETA les images et vidéos choquantes que l’on peut consulter sur leur page internet. Sur ces clichés, on peut voir des chiens tenus captifs dans un hangar anciennement utilisé pour élever des dindes, certains tournent en rond comme des fous dans leur cage, ont creusé des trous pour essayer de s’enfuir.
« Quand ils vous voient toucher la poignée de la porte, ils se réfugient dans leur abri [un bidon de plastique éventré, ndlr] et se cachent », explique l’ancien employé.
D’autres ont des tiques, les dents pourries, des blessures, leurs griffes sont si longues qu’elles se retournent dans leurs coussinets. PETA dénonce les mauvais traitements et l’absence de soins vétérinaires appropriés apportés à ces chiens, mais aussi le risque de contamination des chiens qui recevraient leur sang.
Bill Larsen confie au Washington Post qu’il travaillait dans cette ferme quelques années auparavant et que les conditions de vie d’alors étaient meilleures. C’est quand il a été réengagé il y a quelques mois qu’il dit avoir constaté ce désastre.

Démentis et contre-enquêtes
« Dire que j’ai été stupéfait serait un euphémisme », déclare dans la presse locale Shane Altizer, propriétaire de la Pet Blood Bank depuis novembre 2015. « J’ai rapidement appris qu’un ancien employé avait donné des photos à PETA, qui avait ensuite créé une vidéo terrible et avait affirmé que nos animaux étaient « saignés pour faire du profit » », poursuit-il. Il ajoute ensuite :
« Les images utilisées dans la campagne sont sorties de leur contexte et ne dépeignent pas la pleine et entière histoire de chaque situation. J’ai entrepris de prouver notre innocence et ai contacté le bureau du shérif afin qu’il vienne vérifier l’état de notre installation ».
Il ne nie toutefois pas que les photographies ont été prises dans son établissement mais déclare au Washington Post qu’elles datent d’avant son rachat de la ferme en 2015, ou représentent des instantanées qui ne correspondent pas à la situation actuelle.
Le bureau du shérif de San Saba affirme dans un communiqué, après enquête sur place et libre accès à tous les équipements, n’avoir trouvé aucune trace de mauvais traitements et que « les animaux semblaient en bonne santé ». Un représentant de la Texas Greyhound Association (Association des lévriers du Texas) était sur place pendant l’inspection et affirme de même n’avoir rien constaté d’anormal. Ce dernier a cherché le vétérinaire en charge de la santé des animaux de la ferme, qui s’est avéré être un certain Dr. Adam Nelms, lequel affirme :
« Nous travaillons pour M. Altizer assez régulièrement depuis les trois dernières années (…). La Pet Blood Bank se tient à jour sur les traitements de prévention que nous préconisons. Ils nous font aussi faire du travail de routine comme le nettoyage de dents, et nous avons des archives pour le prouver ».
De même la Pet Blood Bank nie en bloc les affirmations de PETA, et Patterson Veterinary Supply Inc. s’engage pour sa part – si des enquêtes plus approfondies apportent les preuves de mauvais traitements – à « aider à assurer à ces chiens des soins appropriés ».
Discarded Greyhounds Imprisoned, Neglected, and Farmed for Their Blood – PETA
Les banques de sang animal aux Etats-Unis
C’est tout un business qui se fait autour du sang animal aux Etats-Unis, et si les conclusions de la campagne de PETA restent excessivement troubles, cette affaire a le mérite d’attirer l’attention sur la réglementation qui entoure cette exploitation des animaux.
Pour répondre à une demande de sang de plus en plus importante, particulièrement concernant les chiens, se sont mises en place des banques de sang animal reposant sur deux systèmes principaux : le don et la colonie. Si les lévriers sont principalement utilisés c’est parce qu’ils sont le plus souvent donneurs universels et leurs veines sont faciles d’accès.
L’État de Californie est à ce jour le seul à réglementer ces banques de sang et à imposer des contrôles annuels puisqu’aucune législation fédérale n’existe à ce propos. Ces banques prennent des formes diverses et variées, allant de la grande exploitation jusqu’à la plus modeste, vendant aux laboratoires pharmaceutiques comme aux cliniques vétérinaires, gérées par des entrepreneurs ou des institutions comme des cliniques vétérinaires.
La « grande majorité des banques de sang vétérinaires est supervisée par des vétérinaires et des assistants vétérinaires qui ont voué leur carrière au bien-être animal », déclare au Washington Post Sarah Muslin, présidente de l’Association de l’Hématologie Vétérinaire et de la Transfusion (AVHTM). Très bien, mais en l’absence de statistiques et d’un registre précis de ces établissements, cette allégation reste très floue.
Un dilemme se présente également, résidant dans la notion de « donneur ». La Pet Blood Bank l’utilise écrivant crânement sur son site internet que ses « produits sont obtenus en priorité via des donneurs volontaires ». Ils détiennent donc le secret du consentement animal, en voilà une bonne nouvelle ! Tout le nœud de la question de l’exploitation animale se trouve là : le consentement du propriétaire est-il suffisant pour engager l’animal en question ?
Ce que l’on peut raisonnablement dire c’est que les transfusions sanguines permettent de sauver de nombreux animaux domestiques chaque année, mais que ces transfusions devraient a minima être conditionnées au bon traitement des donneurs.
Crédits : PETA

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