“Le Bio c’est cher !”. On l’entend, on le discute, on le constate. Bien sûr, plus il y aura de la demande plus les prix baisseront. Comme pour beaucoup il n’est pas question de changer nos habitudes, la grande distribution fait d’importantes recherches pour nous vendre des packages marrons et verts et le greenwashing nous promet qu’on pourra continuer à manger des tomates et des fraises bio de serre en hiver et d’autres cultivés en monoculture très loin. En attendant que la priorité soit de manger local et de saison, le packaging et l’acheminement des produits maintiendra les prix du bio assez élevés.
Si de plus en plus de gens ont accès à des producteurs locaux, en dehors du domaine alimentaire, c’est plus compliqué. Tout le monde n’a pas une entreprise de fabrication de lessive ou de shampooings à proximité. Les produits de nettoyage sont un domaine dont on parle moins en termes de santé et de pollution. Pourtant nos aérosols, liquides vaisselle, lessives, produits d’entretien en tout genre et cosmétiques, sont non seulement polluants mais allergisants et à long terme, potentiellement dangereux.
Quand nous nettoyons… nous polluons. Les nappes phréatiques mais aussi l’air ambiant. Et nous voilà asmathiques, allergiques, et moins résistants aux microbes. Les bouteilles en plastique de nos shampooings et gels douche sont une source majeure de pollution des océans.

Alors mieux vaut acheter naturel. Oui mais… À 4 € la bouteille de shampooing… comment faire ? Quand on s’intéresse à ce qui fait le prix de ce que nous achetons, on constate qu’entre le prix de vente du fabricant et le prix que le consommateur paye, ce sont les marques, les grossistes et les détaillants qui touchent une part écrasante des marges. On retrouve ce déséquilibre dans tous les rouages de la consommation, de l’agroalimentaire où le paysan touche moins de 6% de la valeur totale, en passant par le marché du livre où l’auteur et l’éditeur touchent 10%, le libraire 30 % et le distributeur plus de 50 %.
Maxime et Nicolas ont vécu à Londres l’expérience pour l’un de la grande distribution, pour l’autre des startups pour vendre des produits vegan. Ils ont découvert que les produits bio n’étaient pas plus chers à fabriquer, mais que ce sont les intermédiaires qui vont exploser les prix. De retour en France, ils ont eu l’idée de court-circuiter la chaîne d’intermédiaires et de proposer aux consommateurs des produits achetés directement au fabricant, stockés une fois par an dans un entrepôt, vendus 30 % moins chers. La marque en moins, c’est leur idée et ce sera peut-être un pionnier.

Trois entreprises ont accepté de se lancer dans l’aventure : une savonnerie près de Marseille qui vend déjà à la grande distribution, un fabricant de produits d’entretiens près de Rouen et un autre près de Cholet. Maxime et Nicolas ont été surpris du bon accueil des entreprises, car ils pouvaient craindre qu’étant sur de petits volumes, ils ne pourraient pas rivaliser avec la grand distribution. Mais l’explication était limpide :
“On fait du volume mais nos marges sont très faibles. Avec vous on ferait moins de volume et plus de bénéfices.” Que demander de plus ?
La Marque en Moins cherche à réduire les déchets. Ici encore, les constats sont étonnants : les produits ménagers sont composés à 90 %… d’eau ! Prix élevé, utilisation massive de bouteilles, transport de gros volumes… encore une situation absurde qui est devenue normale.
La Marque en Moins propose de vendre des capsules de tensioactifs que le consommateur pourra mélanger avec de l’eau en gardant toujours la même bouteille. Ceci permet une économie de 90 % du plastique. La capsule coûtera 2,50 € là où la bouteille coûtait 3,50 €. La future anti-marque ira aussi fouiller du côté des brosses à dents rechargeables qui permettront de changer la tête et non de racheter sans cesse une brosse à dents en plastique.

Quand on vend un produit, il faut satisfaire les consommateurs. Or nous nous sommes habitués à avoir une multitude de choix de shampooings, savons et autres produits. En réalité, dans la grande distribution, c’est un parfum qui est changé, et bien sûr le packaging. La Marque en Moins se veut à l’opposé de cette démarche, et les deux associés sont déterminés à ne pas proposer un florilège de produits :
“On ne vendra pas des dentifrices à la fraise ou à d’autres goûts. Mais on pourra envisager de vendre différents types de shampooings pour répondre à des besoins spécifiques”
Oui mais… et le transport ? La Marque en Moins cherche des solutions écologiques pour le transport. Sur Paris, ce sera du vélo. Ailleurs, ce sera de l’envoi postal, en encourageant la livraison en points relais. La livraison sera offerte à partir de 35 € d’achat. On peut s’étonner de tant d’avantages et se demander où est le piège… mais Maxime et Nicolas sourient :
« Vous n’avez pas idée des économies qu’on fait quand on ne passe plus par les intermédiaires ! Rassurez-vous on se fait une marge ! »
Et si on pensait que le bio n’était qu’une mode citadine, les deux associés ont été les premiers étonnés :
“On reçoit énormément de demandes de personnes vivant en campagne souhaitant du bio et nous disant qu’ils n’y ont pas accès. Également de petits magasis qui n’ont pas beaucoup de marge de manoeuvre sur les produits d’entretien comparés à l’alimentaire.”
La Marque en Moins participe à ce mouvement idéologique où les consommateurs sont de plus en plus impliqués dans la fabrication d’un produit : ils deviennent des consom’acteurs, finançant des projets pour que les créateurs restent indépendants, ayant un droit de critique et de suggestion. On retrouve cela dans le milieu des médias indépendants ou chez les artistes. L’absence d’intermédiaire crée un nouveau lien entre créateurs de produits et les usagers. Serait-ce qu’un jour, le consommateur redeviendrait citoyen ?
La Marque en Moins démarre son projet ulule. Pour le soutenir cliquez ici.