C’est dans un article publié le 24 avril dans Science of the Total Environment que sont dévoilées des informations inquiétantes sur le parc Kibale en Ouganda. Au sein de cet article Sabrina Krief, primatologue, y dévoile qu’une grande partie des chimpanzés du parc souffre de malformations.
En effet, c’est suite à un projet pour la conservation des grands singes, que la fondatrice de l’association et son équipe de recherche se sont lancées il y a maintenant 9 ans dans l’analyse de 25 kilomètres carrés du parc national de Kibale. Les recherches ont mené à la découverte qu’un quart des chimpanzés présents dans le parc montrait des anomalies. « Certains individus n’avaient pas de narines, d’autres carrément la face creuse. Un chimpanzé semblait avoir quelque chose qui ressemblait à un bec-de-lièvre » décrit la primatologue. Autre problème relevé : le cycle de reproduction, certaines femelles n’ont pas de cycle sexuel et n’ont a priori pas de descendance. D’autres espèces sont également touchées comme les babouins.
« Certains individus n’avaient pas de narines, d’autres carrément la face creuse. Un chimpanzé semblait avoir quelque chose qui ressemblait à un bec-de-lièvre »
Des pesticides causent des malformations
L’une des explications possibles serait la contamination due à l’agent orange utilisé dans les années 70 comme pesticide afin de se débarrasser des arbres. Contenant de la dioxine, cet herbicide est un polluant dangereux pouvant entrainer cancers, maladies de peau ou encore des maladies congénitales (malformations à la naissance).
Afin de tirer des conclusions plus précises, des prélèvements ont été effectués sur les excréments, les arbres, les rivières et les résultats sont inquiétants. De nombreux produits toxiques tels que le DDT (anti-moustique très puissant), des pesticides, du chlorpyrifos (insecticide) ont été détectés. Ainsi un cycle toxique s’est mis en place : les eaux contaminent les plantations et les plantations intoxiquent les chimpanzés.

Barbara Demeneix, professeur du Muséum National d’Histoire Naturelle explique que les malformations seraient causées par les perturbateurs endocriniens (agent chimique capables d’interférer sur le système hormonal). D’autres analyses sont nécessaires afin de prouver les problèmes des pesticides quant aux femelles gestantes, l’équipe continue donc son étude.
Néanmoins ces recherches ne sont qu’une partie du défi de Sabrina Krief qui souhaiterait une meilleure cohabitation entre humains et faune sauvage. « Nous aimerions convaincre les sociétés de thé de créer une filière plus équitable, avec moins d’intrants chimiques, qui permettrait aussi d’améliorer les revenus des ouvriers agricoles », explique la chercheuse.
Pour encourager les riverains du parc à changer de comportement, l’équipe de Sabrina, organise des projections. « Je peux vous assurer que quand on montre un chimpanzé à qui il manque deux pieds et qui se hisse péniblement sur une branche, ou un autre qui porte son pied amputé dans ses bras, la réaction est universelle : les riverains sont aussi touchés que nous ! ». Il est ainsi nécessaire de sensibiliser les populations afin de changer durablement les habitudes pour le bien-être de tous.

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