James Shaw, Ministre du Changement Climatique en Nouvelle-Zélande, veut créer un visa pour les déplacés climatiques. La priorité serait donnée aux habitants des îles du Pacifique menacés par la montée des eaux. Selon l’ONU, il y aura 250 millions de réfugiés climatiques en 2050.
Les premiers réfugiés climatiques sont déjà là
Marshall, Tuvalu ou encore Kiribati : si le réchauffement de la planète n’est pas maintenu sous les 1,5°C, ces îles seront englouties par les eaux dans les prochaines années… Des littoraux et de nombreuses villes, telles que New York, Miami, Venise ou Rotterdam, sont également menacées. Cela fait plusieurs années que les États insulaires du Pacifique lancent des appels de détresse aux pays industrialisés. Depuis 2014, cinq îles de l’archipel des Salomon, en Océanie, ont été noyées sous la montée des eaux.
La Nouvelle-Zélande, par sa proximité géographique avec ces îles du Pacifique, veut légiférer sur la question des réfugiés climatiques. Son Ministre du Changement Climatique, James Shaw, a ainsi annoncé travailler avec son cabinet sur la création d’un visa particulier pour les déplacés climatiques. Il souhaite tester ce visa en partenariat avec les Iles du Pacifique.
La décision avait été prise par le Ministre suite à l’expulsion de demandeurs d’asile climatique en Nouvelle-Zélande. Plus d’une douzaine de demandes ont été rejetées ces dernières années, faute de trouver dans le droit actuel les éléments permettant de leur donner le statut de réfugié, l’argument climatique n’étant pas inscrit dans la loi.
La crise des réfugiés est un enjeu majeur dans le monde, que ce soit pour les populations en péril ou les pays recevant les demandes d’asile. Le dernier rapport du World Economic Forum a ainsi identifié la crise migratoire comme l’un des dix facteurs de risque les plus importants pour le monde.
Les réfugiés climatiques, un statut juridique international à construire
Dans notre premier livre-journal, Christel Cournil, spécialiste sur la question des réfugiés, et Benoît Mayer, Coordinateur d’un programme de recherche sur les migrations environnementales expliquent pourquoi migration et changement climatique sont devenues deux préoccupations majeures de notre époque liées. Alors que le statut de réfugié est reconnu par la Convention de Genève de 1951, aucune définition officielle n’a été adoptée pour le statut de réfugié climatique.
Les deux experts précisent notamment que « le scénario migratoire des populations des petites nations insulaires telles que les Maldives, Tuvale et Kiribati est particulier. Des carences sévères en eau douce pourraient mettre en péril la viabilité de ces îles bien avant qu’elles ne soient littéralement englouties par les flots, en l’absence de soutien économique permettant l’adaptation sur place. L’hypothèse de l’évacuation d’un Etat pose un certain nombre de questionnements juridiques, la situation étant absolument inédite en droit international. »

Les Etats insulaires ne sont pas les seuls menacés par le réchauffement climatique. D’autres régions du monde souffrent déjà de ses conséquences : la dégradation des territoires en Asie centrale, les inondations au Bangladesh et dans le delta du Nil, la fonte du pergélisol des terres des Inuits, la sécheresse de la bande sahélienne en Afrique de l’Ouest. Pour les deux chercheurs :
« Ces exemples emblématiques occultent la diversité des formes de migrations environnementales : temporaires, circulaires ou définitives ; à l’intérieur d’un Etat ou en traversant des frontières ; par des individus seuls, des familles, ou des communautés entières ; organisées à l’avance ou déployées en urgence à la suite d’une catastrophe. »
Ce vide juridique avait permis la naissance de quelques initiatives ces dernières années. La Convention de Kampala ratifiée par quarante pays africains, entrée en vigueur en 2012, évoque clairement la question de la protection des personnes déplacées en raison des catastrophes naturelles dans l’article 5.4. En 2011, l’initiative « Nansen » est née lors d’une conférence internationale sur les migrations environnementales. Elle a été lancée sous la direction de la Norvège, de la Suisse et le volontarisme de Walter Kalin, ancien représentant du Secrétaire général des Nations Unies pour les droits de l’homme des personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays.
Elle est unique dans le sens où c’est la toute première initiative intergouvernementale relative à la protection des migrants environnementaux. A la veille de la COP21, elle a été transformée en un agenda pour la protection des personnes déplacées en contexte de catastrophes et du changement climatique. Il a été adopté par 110 Etats le 13 octobre 2015. Cependant, cet agenda n’est pas un traité et n’a aucune valeur contraignante, l’objectif étant d’adopter des déclarations de principe communes avant que ne soit défini le statut de la Cour pénale internationale.
Face à l’urgence du réchauffement climatique, un visa spécial octroyé par la Nouvelle-Zélande serait donc une vraie première dans la définition du statut de réfugié climatique. Souhaitons que ce visa soit mis en place à temps pour les Iles du Pacifique.

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