Alors que les flux de migrations ne cessent de s’intensifier, un nouveau drame a coûté la vie à 31 personnes dont une dizaine d’enfants. D’après les témoignages, des centaines de migrants sont tombés d’une embarcation surchargée au large de la Libye, plusieurs dizaines d’entre eux ont succombé alors que les secours venaient d’arriver.
5 900 personnes secourues depuis mardi
Voilà plusieurs semaines que les flux migratoires ne cessent de s’intensifier. Chaque jour, des dizaines d’embarcations prennent le large en quête d’un avenir meilleur, au péril de leur vie. François Beaudonnet, journaliste chez Franceinfo en reportage sur le port de Salerne, explique : « C’est un phénomène général en Méditerranée. […] On est en train de battre des records parce qu’il fait très beau et que les passeurs en Libye en profitent pour mettre à l’eau des petits bateaux qui n’iront pas loin, ce qui explique la multiplication des naufrages ». Alors que de plus en plus de bateaux quittent les côtes libyennes, ceux-ci gagnent en dangerosité ; les embarcations sont vétustes, surchargées, et ne disposent d’aucun système de sécurité. De ce fait, près de 5 900 personnes ont été secourues depuis mardi dont 2 300 dans la seule journée de jeudi et chaque jour le bilan des victimes s’alourdit un peu plus.
Le « Phoenix » ne renaîtra pas de ses cendres
Ce mercredi une nouvelle tragédie s’est déroulée dans cette véritable nécropole qu’est devenue la mer Méditerranée. Des centaines de personnes se trouvaient à bord d’une embarcation en bois au large de Zouara (Lybie) quand sont arrivés les secours. Les équipes du « Phoenix » étaient en train de distribuer des gilets de sauvetage et de transporter les migrants sur leurs propres embarcations, quand une grande partie d’entre eux est tombée à l’eau, probablement sous l’effet d’une vague. Les garde-côtes italiens et l’équipage de plusieurs navires commerciaux sont venus prêter main-forte au Phoenix, un avion militaire a également largué des canots de survie, mais le mal était déjà fait. Chris Catrambone, fondateur de l’ONG maltaise Moas, qui était présent sur les lieux, a fait état de 31 cadavres, « la plupart de très jeunes enfants ».

Les garde-côtes libyens reconduisent de force les migrants
Avec ce nouveau drame, au moins 1 254 migrants (d’après les chiffres de l’Organisation internationale pour les migrations) sont morts ou disparus cette année en tentant de fuir l’enfer dans lequel ils sont plongés. De plus, l’intervention des garde-côtes libyens est très controversée. Alors que ceux-ci sont en train d’être formés par l’Union européenne pour endiguer le phénomène d’accroissement des départs, leurs méthodes ont été dénoncées par l’ONG allemande Jugend Rettet. Un communiqué publié par celle-ci raconte que deux embarcations ont été ramenées de force par les garde-côtes libyens qui n’hésitaient pas à tirer des coups de feu en l’air ou à prendre les migrants en joue pour les forcer à coopérer. On n’image à peine la détresse de ces personnes ramenées de force dans le pays qu’elles ont quitté où elles risquent de subir extorsions, violences, viols, tortures et meurtres.
« L’UE a une obligation morale »
Mais que fait l’Union européenne ? Combien faudra-t-il encore de tragédies avant qu’elle ne prenne enfin la mesure de ces responsabilités ? A l’heure actuelle il n’existe aucune politique d’asile harmonisée et les mesures tendent davantage à chercher à contenir ces milliers de migrants loin des terres européennes qu’à proposer de véritables solutions. A la question « Faut-il ouvrir des couloirs d’immigration légaux avec un système de quotas ? », François Gémenne, spécialiste de la question des migrations répond :
« Oui, pour trois raisons. Un, parce que l’UE en a besoin pour son dynamisme social et économique. Deux, parce que c’est la meilleure manière de lutter contre les passeurs et d’éviter les morts en Méditerranée. Trois, parce que l’UE a une obligation morale – comme continent prospère, de paix et de sécurité – de permettre à d’autres qui n’ont pas eu cette chance de s’y installer. L’UE ne peut accepter que le destin des uns et des autres soit uniquement déterminé par le fait qu’ils sont nés sur la rive nord ou sud de la Méditerranée. »
Plutôt que de chercher à endiguer un phénomène que l’on ne peut empêcher, l’encadrement des flux migratoires semble être la meilleure solution pour mettre un terme à la multiplication de ces vies innocentes brisées.

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