Face à la situation préoccupante dans laquelle se trouve le secteur du bois, la Fédération Nationale du Bois (FNB) a décidé de s’adresser directement au Président Macron, en lui demandant de passer de la parole aux actes. Lors de la campagne présidentielle, ce dernier parlait alors de « situation ubuesque, une aberration complète, un des plus grands scandales économiques que je connaisse« .
Alors que les forêts françaises représentent le troisième stock de bois sur pied et la première production de chêne en Europe, les scieries françaises manquent de matière première et ne fonctionnent aujourd’hui qu’à 60% de leur capacité. Les volumes de chêne disponibles pour la filière nationale ont été divisés par deux en dix ans : on est passé de 2,45 millions de m3 en 2007 à 1,25 millions de m3 en 2017. Constat d’autant plus paradoxal que 25 à 30% de la production nationale de grumes est exportée vers des pays tiers. Parmi ceux-ci, on retrouve la Chine, qui en dix ans a multiplié par dix les volumes de bois importés depuis le sol français. Le but étant de préserver ses forêts en réponse aux avancées du désert dans le nord du pays et à la surexploitation de ses ressources. Face à ce changement dans la demande du bois français, l’Etat n’a étrangement pas suivi l’exemple d’autres pays européens comme la Croatie ou l’Ukraine en mettant en place des régulations ciblées pour protéger le marché national, comme des quotas ou des taxes aux frontières par exemple. Ceci fait le plaisir des traders qui peuvent sans cesse surenchérir, ce qui a pour conséquence d’augmenter le prix du bois.
Cette situation est d’autant plus troublante qu’elle relève d’un non sens écologique et économique. En effet, en vendant nos matières premières à des pays tiers pour acheter ensuite leur production, on augmente considérablement l’empreinte carbone de la chaine de production. Dans le cas de la Chine, en comparaison avec une chaine de production intégralement française, l’empreinte carbone pourrait être 17 fois plus élevée ! De plus, « les interventions successives sur les grumes induisent de l’emploi en France, des recettes fiscales à chaque stade, comme la TVA, les charges sociales et patronales, la fiscalité locale… » souligne justement la FNB, qui a vu presque 40% des entreprises de transformation du bois disparaitre depuis 2009…

Si l’apparition de pays étrangers dans le marché national du bois n’est pas une bonne nouvelle pour l’industrie française, le Centre National de la Propriété Forestière, qui rassemble les propriétaires privés de forêts (70% des terres forestières) met quant à lui l’accent sur le manque d’investissement criant subi par la filière, des débouchés pour le bois d’oeuvre en baisse constante (plus de 50% de la transformation du bois) qui ne sont pas remplacés, et une concurrence internationale importante depuis 20 ans pour expliquer la disparition croissante de scieries, plus importante en France que dans les autres pays européens.
Pour tenter de redonner un avenir à la filière du bois en France, la FNB compte sur la mise en place d’un label transformation UE, lequel récompenserait les produits transformés en Europe à partir de matières premières européennes ; la mise en place de quotas par essence et d’une politique favorisant les forêts de production de bois. La forêt française est aujourd’hui sous-exploitée et augmenter sa production ne mettrait pas en danger son équilibre environnemental, bien au contraire, d’après France Bois Industrie Entreprise, dont fait partie la FNB. Enfin, cette dernière demande aussi à ce que le bois français soit favorisé dans tous les projets financés par le secteur public.
La balle est désormais dans le camp du Président Macron et de son gouvernement, qui, s’ils souhaitent mener à bien leurs objectifs de transition vers une économie bas carbone, ne peuvent se permettre d’ignorer cet appel du pied de la FNB et de laisser l’industrie du bois avancer seule dans ce chemin sans issue.

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