Ce vendredi, dans un entretien accordé à BFM TV, le ministre de la Transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot, a annoncé vouloir « interdire toute nouvelle exploration d’hydrocarbures » en France. Un projet de loi va être élaboré cet été au gouvernement et devrait être présenté aux Assemblées à l’automne prochain. Les activités de production et d’exploration d’hydrocarbures sont régies en France par le code minier et le code de l’environnement.
Les hydrocarbures en France : une question ancienne
L’exploitation des hydrocarbures sur le territoire national est ancienne puisqu’elle remonte au XVIIIe siècle pour les plus anciens gisements comme celui de Péchelbronn en Alsace. Depuis la réforme du code minier de 1956, plus de 600 titres d’exploration ont été accordés à des entreprises qui ont ainsi obtenu le droit de prospecter afin de trouver d’éventuels gisements. Selon le ministère de la Transition écologique et solidaire, cela a donné lieu à 77 titres d’exploitation, à la production d’environ 100 millions de tonnes de pétrole et 300 milliards de m3 de gaz, et au forage d’environ 4 000 puits d’exploration ou de production. Aujourd’hui 64 de ces puits pétroliers et gaziers sont encore en activité.
Les principales zones du territoire métropolitain et outremer potentiellement riches en hydrocarbures sont à la fois maritimes (200 000 km2) et terrestres (70 000 km2). Parmi les plus exploitées on peut citer le Bassin parisien et aquitain ainsi que les eaux territoriales de Guyane. L’exploitation de gisements nationaux produit des revenus de 500 millions à 1 milliard d’euros par an, mais elle est loin d’être sans danger.
Les risques des forages

Un dossier de synthèse rédigé par Bernard Sampité, responsable de veille au CNRS, expose les risques liés au forage de puits d’exploration et de production d’hydrocarbures. Outre l’altération du paysage que constituent les puits dans leur dimension industrielle, on compte aussi des dangers environnementaux dont le principal est la pollution de l’eau potable et des nappes phréatiques à cause des liquides de fracturation utilisés afin d’atteindre les gisements ou tout simplement d’infiltrations de gaz ou de pétrole. Ce sont également les fuites de gaz naturel (principalement du méthane) dans l’air qui inquiètent puisqu’elles y augmentent la concentration en gaz à effet de serre. De plus, la quantité d’eau nécessaire au forage est considérable puisqu’elle représente de 9 000 à 20 000 m3 par forage selon le ministère de la Transition écologique et solidaire. La loi du 13 juillet 2011 permet de limiter les risques liés à la fracturation des roches pour atteindre les gisements, en interdisant en France le procédé de fracturation hydraulique.
Il s’agit d’une technologie qui consiste à injecter de l’eau sous haute pression afin de fissurer et de micro-fissurer des roches peu perméables qui empêchent l’exploitation des gisements d’hydrocarbures. Elle était pratiquée avec tous les risques que l’on imagine quant à la contamination de l’eau potable, des sols et de l’air. Le 26 février 2011, le New York Times publie des données de l’EPA (Environnemental Protection Agency) sur les risques encourus dans le cadre de forage pour extraire du gaz de schiste et évalue que les eaux rejetées après le forage ont un taux de radioactivité 1 000 fois supérieur aux taux autorisés dans la législation sur l’eau de boisson.

Une interdiction visant l’exploration et non l’exploitation
La mesure de Nicolas Hulot vise « toute nouvelle exploration », ce qui est une manière de stopper d’abord le problème à la source puisque juridiquement, il existe un droit de suite à tout permis d’exploration, qui permet en cas de découverte de gisement, l’obtention d’un permis d’exploitation. Il explique cependant dans l’entrevue accordée à BFM TV qu’ « un certain nombre de permis ont été autorisés », c’est-à-dire que la réforme ne vise pas les permis déjà accordés afin d’éviter d’éventuels litiges avec les entreprises en question. Il sera donc à partir de 2018 impossible de prospecter en vue de l’exploitation de nouveaux gisements mais les 64 qui se trouvent encore en exploitation ne seront pas abandonnés.
Il ne s’agit visiblement que de la première étape d’un programme écologique qui vise également un alignement de la fiscalité du diesel sur celle de l’essence étant donné les controverses autour du caractère prétendument moins polluant de ce premier carburant. Pour reprendre la métaphore de la source : Nicolas Hulot ferme le robinet des hydrocarbures français qui, à terme, arrêtera de couler étant donné que les permis d’exploitation sont accordés au maximum pour une durée de 50 ans renouvelables pour une ou plusieurs périodes de 25 ans au plus. Reste à espérer que la suite des réformes empêchera le renouvellement des permis d’exploitations valides à ce jour !

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