L’armée américaine a publié un audit reconnaissant certaines lacunes dans le suivi de transferts d’armes et d’autres équipements militaires en Irak et au Koweït. La valeur de cet équipement s’élève à plus d’un milliard de dollars.
1 milliard de dollars d’armes hors de vue des radars
En septembre 2016, le gouvernement américain a réalisé un audit révélant le manque d’informations concernant le nombre et la localisation d’une grande quantité d’équipements militaires. Ces équipements semblent avoir été récupérés au niveau du Koweït et de l’Irak afin d’approvisionner l’armée irakienne ainsi que des groupes armés tels que l’Etat Islamique. Des lacunes ont été identifiées à différents niveaux de la chaîne de transfert :
« La mauvaise tenue des registres dans les dépôts d’armes au Koweït et en Irak. Des informations enregistrées sur de multiples tableaux, bases de données et même des reçus écrits à la main. De grandes quantités d’équipements saisies manuellement dans de multiples tableaux, ce qui accroît le risque d’erreur humaine.Des registres incomplets, ne permettant pas aux personnes responsables des équipements de vérifier avec certitude leur emplacement ni leur statut. »
Ces révélations soulignent une nouvelle fois les lacunes des systèmes de contrôle des armes. Leur prolifération et leur surproduction déclenche des guerres, des répressions armées et augmente le taux global de criminalité. Chaque année, ce ne sont pas moins de 500 000 personnes qui sont tuées par armes sans compter les milliers de personnes n’ayant pas accès aux soins, à la nourriture ou à l’eau et souffrant d’atrophie à cause des occupations armées. Toutes les minutes une personne meurt à cause d’une arme, c’est aussi toutes les minutes que 15 nouvelles armes sont fabriquées pour être mises sur le marché international. Les Etats, principaux acteurs de la production et du commerce d’armes n’appliquent pas une réglementation assez stricte et le laxisme de certains maillons de la chaîne amène les armes à se retrouver entre des mains mal intentionnées.

De l’importance des définitions légales
Les armes de destruction massive telles que les armes chimiques, biologiques ou nucléaires sont contrôlées. Seulement, les armes classiques dites conventionnelles comprennent seulement les systèmes d’artillerie de gros calibre, les avions de combat, les chars de combat, les hélicoptères d’attaque, les véhicules blindés de combat, les navires de guerre, les missiles et les lanceurs. Vous l’aurez compris, la liste d’armes régulées ne comprend pas les armes légères et de petits calibres qui s’avèrent finalement être les plus meurtrières tant leur accessibilité est facilitée.
Ces armes ont plus de morts au compteur que les bombes Hiroshima et Nagasaki. Depuis les années 1990, la Commission Internationale a pris des mesures restrictives en raison des dégâts causés. Il semblerait que près de 100 millions d’AK-47 non contrôlés circuleraient dans le monde, c’est notamment le type d’armes utilisé par les enfants guerriers. Les victimes des armes légères sont aujourd’hui composées à 80 % de civils !
L’ONU a donc décidé de retravailler la définition d’armes afin de renforcer le contrôle des armes de petit calibre, les armes légères, des munitions et des outils de contrôle populaire telles que les menottes, le gaz lacrymogène, le tazer (qui a pourtant causé de nombreux décès), les matraques ou les camions anti-émeutes. L’approximation de la définition légale des armes et leurs utilisations variées ont rendu leur contrôle compliqué. Le droit international des droits humains et le droit international humanitaire stipule notamment que le recours aux armes dans l’intention de nuire n’est pas autorisé sur des zones dénuées de conflits. L’ignorance et le bafouement de ces droits provoquent des milliers de morts et de blessés chaque année. L’abondance des armes et leur disponibilité croissante font perdurer des conflits et y incluent les civils. L’arme est sans aucun doute le pire ennemi de la paix.

L’histoire de la prolifération du cancer des armes
La Guerre froide a déclenché une vague d’armement massif des deux blocs et de leurs alliés ; à cette époque, le manque de régulation a stimulé la croissance de la production d’armes et de leur commerce. Quelques années plus tard, les armes inutiles et en surproduction ont dû être liquidées et de nombreux courtiers ont ignoré les embargos, captivés par l’objectif de rentabilité de leurs stocks. La lutte contre le terrorisme déclenchée par le 11 septembre a fini de justifier l’augmentation du budget militaire de nombreux pays et les armes se sont répandues à travers le monde tel un cancer malin. Le manque d’homogénéité dans la régulation des armes permet à des transferts d’armes d’être autorisés sans qu’ils soient légaux, cette brèche est largement utilisée par des trafiquants d’armes peu regardants sur le respect des droits humains des pays importateurs tels que le Soudan du Sud, l’Irak, la République démocratique du Congo et la Lybie, pourtant soumis à un embargo international mis en place par l’ONU.
Un marché gangrené par la corruption et l’hypocrisie
50 % de la corruption mondiale s’articule autour des contrats de l’industrie de la défense, donc en plus d’une législation légère, elle est tout simplement contournée. C’est ainsi que des tonnes d’armes ont également tout bonnement disparu des radars, le service après-vente et le respect de la loi ne semblant pas être de rigueur pour le commerce d’armes. De plus, le manque de transparence et de visibilité du public qui n’est pas un consommateur final permet de nombreux tours de passe-passe en toute quiétude ; une ironie lorsque l’on sait que les premiers exportateurs d’armes au monde ne sont autres que ceux qui siègent de manière permanente à l’ONU dans le cadre du Conseil de Sécurité (Etats-Unis, Chine, France, Allemagne, Royaume-Uni, Russie).
L’achat des armes aux pays producteurs freine voire empêche le bon développement des pays qui y allouent un budget conséquent au détriment d’infrastructures, de l’éducation ou du système de santé… Par exemple, un arrêt de transfert d’armes a été mis en place envers l’Egypte afin de stopper la répression violente du gouvernement contre les civils. Cet arrêt de transfert d’armes a tout simplement été contourné par 12 pays de l’Union européenne : l’Allemagne, la Bulgarie, Chypre, la France, l’Espagne, la Hongrie, le Royaume-Uni, l’Italie, la Pologne, la République Tchèque, la Roumanie et la Slovaquie. Ces pays qui ont continué d’alimenter la répression du régime en vendant des armes se rendent directement complices des atrocités commises envers les civils.
Cocorico
La France est le 4ème vendeur d’armes au monde. Engagée sur un traité international encadrant le commerce d’armes, le cadre juridique national qu’elle s’impose à elle-même est résolument laxiste. De plus, le manque de transparence évident sur les transferts d’armes permet de museler la société fouineuse et les investigateurs.
Le TCA : la révolution et ses failles
La pression internationale et civile a finalement poussé l’ONU à ouvrir les négociations en faveur d’un traité sur le commerce des armes, le TCA. En 2006, l’ONU adopte la résolution 61-89 qui invite les pays de la Commission à mettre en place des normes sur le commerce international des armes, notamment suite à la campagne menée de front par les ONG Amnesty International, OXFAM et RAIAL (Réseau International sur les armes légères). C’est en 2009 que les processus de négociation et d’adoption sont lancés concernant le premier traité international de l’histoire visant à contrôler le commerce d’armes ; ce traité compte aujourd’hui 90 Etats parties et 130 Etats signataires.
Les droits humains se doivent d’être pris en compte lorsqu’il s’agit de transfert d’armes, le TCA est une véritable avancée et ses effets se mesureront dans les années à venir. Si certains pays tels que les Etats-Unis n’ont toujours pas ratifié le traité malgré sa signature, le TCA ne peut être complètement efficace. Le transfert et le commerce d’armes est une histoire d’Etats, c’est à eux et à eux seuls de s’engager pour réduire la production d’armes et contrôler son commerce.

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