Air chargé de particules fines à Marseille, traces de plomb à Lyon, hydrocarbures chlorés à Paris, pesticides dans les campagnes, déchets de guerre sur les littoraux… À chaque région sa pollution. L’Atlas de la France toxique procure une vision d’ensemble des conséquences de l’activité humaine et industrielle.
Marseille
Avec une concentration moyenne de particules fines de 31,8 µg/m3, Marseille occupe le haut du podium, devant Lyon (29,5 µ/m3) et Paris (27 µ/m3). Cet air très pollué — l’OMS recommande un maximum de 20 µg/m3 en moyenne annuelle — est dû en grande partie aux autoroutes, qui entrent jusque dans la ville.
Les méga-navires de croisière — le port en accueille plus de 500 chaque année — ont également une part de responsabilité. Une fois amarrés, ils laissent leurs moteurs tourner à plein régime. Si le confort des passagers s’en trouve augmenté, c’est aussi le cas de la pollution aux particules microscopiques.
Dès le XIXe siècle, fonderies de plomb et usines d’acide sulfurique s’étaient établies sur le littoral de la cité phocéenne. Deux siècles plus tard, « les résidus de plomb dépassent les seuils d’alerte dans les sols et les coquillages ». Les vases du port de la Lave et de l’anse de l’Estaque sont pour leur part teintées d’arsenic et de mercure. L’entreprise Metaleurop y produisait du trioxyde d’arsenic jusqu’en 2001.

Quant au Vieux-Port et aux îles du Frioul, ils sont reconnus comme de « véritables pièges à déchets », rassemblant sur leurs bords bouteilles, mégots ou cotons-tiges. La plage de l’Huveaune, envahie par les germes fécaux lors des pluies d’orage est surnommée « Épluchures Beach ».
Lyon
Capitale française de la pétrochimie, Lyon comprend deux millions de mètres carrés de friches industrielles. Avec comme conséquence d’importantes traces de chrome, de plomb et d’hydrocarbures.
Paris
À Paris, ce sont les peintures au plomb qui expliquent que presque un tiers des cas de saturnisme français y soient recensés.
L’amiante est également un problème : entre 1970 et 1995, les chaussées pavées ont été recouvertes d’enrobés amiantés, pour prolonger leur durée de vie. Il y aurait aujourd’hui près de 836 000 m² de voiries amiantées dans la capitale.
La Seine est polluée aux PCB, ces hydrocarbures chlorés connus sont le nom de pyralène, répandus en masse par Monsanto dès les années 1930. Se présentant sous la forme d’une huile visqueuse et jaunâtre, ils sont reconnus par l’ONU comme des polluants majeurs et persistants, et comme cancérogènes certains par le CIRC (Centre international de Recherche sur le Cancer).

Enfin, Paris compte le plus de sites d’entreposage de déchets radioactifs, puisqu’elle abrite de nombreux lieux dédiés à la médecine, à la recherche et à l’industrie.
Zones rurales
Les zones rurales connaissent d’autres types de pollution, notamment à cause des pesticides. Gironde, Somme, Pas-de-Calais… « Les départements producteurs de champagne et de sauternes, de pommes de terre et de betteraves sont les plus gros utilisateurs de pesticides cancérogènes. », souligne l’atlas. Or, les échantillons de poussière collectés dans les habitations proches des cultures contiennent quasi systématiquement des résidus de pesticides.
Littoraux
Concernant les littoraux, l’ouvrage évoque une pollution oubliée, celle des trois grandes guerres qu’a connue la France (1870 et les deux guerres mondiales). Des munitions non explosées dorment encore dans la nature et les côtes hébergent plusieurs millions d’armes chimiques et conventionnelles. Immergée dans l’océan à la fin des conflits, leur vitesse de corrosion est d’environ 1 mm par an, de quoi contaminer la faune et la flore marine pendant longtemps.
« Notre but n’est absolument pas de faire un hit-parade des villes les plus polluées ou des zones les plus toxiques, mais plutôt d’informer les lecteurs des risques qu’ils encourent », explique Jacky Bonnemains, président de Robin des bois, l’association à l’origine de l’Atlas. « Afin qu’ils fassent pression sur les politiques et s’opposent aux industriels. »