Les réformes combinées de l’Impôt de Solidarité sur la Fortune (ISF) et du Prélèvement Forfaitaire Unique (PFU) prévues par Emmanuel Macron et Edouard Philippe vont essentiellement profiter aux foyers les plus riches, révèle une étude de l’OFCE. En remplaçant l’ISF par un Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI), l’ex-banquier veut favoriser les investissements dans « l’économie réelle » tout en donnant un petit coup de pouce aux fortunes françaises pour les ramener à la maison. En revanche, les « inactifs » qui ne participent pas au développement du « Grand Capital » verront leurs impôts stagner si ce n’est augmenter.
Emmanuel Macron avait annoncé des réformes majeures pendant la campagne concernant l’Impôt sur la fortune et la fiscalité du capital. Après le grand rendez-vous des investisseurs, économistes libéraux et représentants des hauts patrimoines à Aix, le président – sans doute pressé par ses camarades libéraux rencontrés là-bas – a annoncé le 9 juillet que les mesures prendraient (partiellement) effet dès 2018. Ces mesures concernent d’une part une simplification – apparemment neutre budgétairement – du prélèvement sur les revenus des valeurs mobilières, le Prélèvement tarifaire unique à 30% sur les revenus des valeurs mobilières, et une modification de l’Impôt sur la fortune qui deviendrait cantonnée seulement aux biens immobiliers.
Une étude de l’OFCE a étudié à qui profiteraient ces mesures qui coûteront 7 milliards d’euros en tout. Le résultat est clair : ce sont les 0,01% des ménages les plus riches qui vont le plus profiter de ces réformes. Macron avait bien souligné qu’il n’y aurait pas de perdants à ces mesures (ce qui serait d’ailleurs plutôt faux). Mais il semble avoir omis de dire qu’il y aurait de grands gagnants. L’OFCE remarque ainsi que « seuls les ménages appartenant au dernier centile de niveau de vie, les 1% les plus aisés, devraient voir leur niveau de vie s’accroître en moyenne de 4 225 euros, soit un gain de pouvoir d’achat de 3,1% alors que le gain moyen pour les ménages appartenant aux 9 premiers déciles de niveau de vie serait de 0,3%, soit un gain moyen par ménage de l’ordre de 55 euros (133 euros en moyenne si l’on ne considère que les bénéficiaires de la réforme). »
« On comprend déjà mieux l’empressement de Macron à appliquer cette mesure qui, concrètement, permettra à ces 2 830 ménages les plus riches de capter environ 1,3 milliard d’euros sur les 4 milliards que coûtera la réforme. »
En effet, il semblerait que la part de l’immobilier diminue à mesure que le patrimoine augmente. Un article de Marianne, se basant sur un rapport du Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), explique : « en moyenne les assujettis à l’ISF disposent de 50% de patrimoine dans la pierre. Mais plus on est riche, plus cette part décroît, et de plus en plus rapidement. Elle tombe à 14% pour les 1% les plus riches. Les foyers les plus riches ayant une très forte proportion d’épargne mobilière, comme des actions, verront leur impôt baisser énormément. » On comprend déjà mieux l’empressement de Macron à appliquer cette mesure qui, concrètement, permettra à ces 2 830 ménages les plus riches de capter environ 1,3 milliard d’euros sur les 4 milliards que coûtera la réforme (toujours d’après Marianne).
A l’inverse, la seconde grande mesure fiscale prévue par l’Elysée, le passage au Prélèvement tarifaire unique sur les revenus de l’épargne de l’ordre de 30%, devrait défavoriser les petits épargnants. Pour éviter le découragement des investisseurs qui connaissent parfois « des impositions marginales excessives (jusqu’à 62%) » sur les intérêts, dividendes et plus-values, Macron souhaite mettre tout le monde au régime 30%. Or ces impôts étaient aussi destinés à financer certaines aides sociales (notamment la CSG). Autant dire que si tout ne se déroule pas comme prévu, et qu’il y a un manque à gagner qui se creuse, ce ne sont certainement pas les investisseurs qui vont devoir se serrer la ceinture.
« Seuls les ménages appartenant au dernier centile de niveau de vie, les 1% les plus aisés, devraient voir leur niveau de vie s’accroître en moyenne de 4 225 euros, soit un gain de pouvoir d’achat de 3,1% alors que le gain moyen pour les ménages appartenant aux 9 premiers déciles de niveau de vie serait de 0,3%, soit un gain moyen par ménage de l’ordre de 55 euros. »
L’objectif, sans doute louable de Macron avec la transformation de l’ISF en impôt seulement sur les propriétés immobilières, est de réinciter les grandes fortunes à payer leurs impôts en France tout en encourageant les investissements dans l’économie dite « réelle ». En revanche, on peut craindre que ces ménages concernés décident de « transférer leurs actifs immobiliers dans une société et ainsi échapper intégralement à cet impôt sur le patrimoine », comme le souligne cet article de La Tribune.
Ce qui est troublant avec Macron c’est qu’il promet l’amélioration de la situation économique de tous, au détriment de personne (il prévoit par ailleurs la fin de la taxe d’habitation qui touche essentiellement les foyers les plus pauvres ou aux revenus intermédiaires). Mais les premières enquêtes tendent à montrer qu’en réalité, on tend plutôt vers une dégradation ou une stagnation de la situation des ménages les moins aisés au profit des ménages les plus aisés…
Crédits photo : Ales Beno / ANADOLU AGENCY / AFP

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