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L’UE labellise le nucléaire et gaz comme « énergies renouvelables » : un cadeau de plusieurs milliards à la Russie

« La Russie pourrait ainsi toucher 4 milliards d’euros supplémentaires par an via de nouveaux projets gaziers financés grâce à la taxonomie européenne, pour un total de 32 milliards d’euros d’ici 2030 » détaillait ainsi l’ONG.

C’est un « échec historique » pour les parlementaires européens et les écologistes qui combattaient ce projet. Ce mercredi 6 juillet, les eurodéputés ont tranché : ils ont introduit le gaz et le nucléaire dans la taxonomie verte européenne, ce qui permettra aux producteurs de ces énergies d’avoir un meilleur accès aux financements. Les ONGs opposées à ce classement dénoncent un cadeau de plusieurs milliards d’euros par an faits à la Russie.

La taxonomie plus si verte

Ce mercredi, une majorité de députés (328 contre, 278 pour et 33 abstentions) a rejeté une résolution qui s’opposait à l’introduction du nucléaire et du gaz dans la « taxonomie verte » européenne. 

A l’origine, cet outil doit permettre d’accélérer la transition énergétique en validant une liste d’activités jugées aptes à faire face à l’urgence climatique tout en protégeant l’environnement et la population. Cette taxonomie verte constitue ainsi un genre de catalogue à destination des financeurs privés qui veulent investir leur argent dans des infrastructures énergétiques au service de l’intérêt général.

Depuis plusieurs mois, la bataille faisait rage entre les parlementaires et ONGs opposées à l’introduction du gaz et du nucléaire dans cette taxonomie, et les lobbies de l’énergie favorables à ce label vert. En mai 2022, une enquête de Greenpeace dévoilait notamment comment les industries gazière et nucléaire russes pourraient voir leurs bénéfices augmenter de plusieurs milliards grâce à la taxonomie.

« La Russie pourrait ainsi toucher 4 milliards d’euros supplémentaires par an via de nouveaux projets gaziers financés grâce à la taxonomie européenne, pour un total de 32 milliards d’euros d’ici 2030 » détaillait ainsi l’ONG.

En effet, la Russie fournit actuellement 45% du gaz et 20% de l’uranium enrichi de l’Europe. Elle pourvoit aussi ses services de maintenance technique à 18 centrales nucléaires de conception russe dans l’UE, et stocke de grandes quantités de déchets radioactifs produits dans différents pays européens, notamment la France.

Pétitions, lettres ouvertes, actions partout en Europe et plaidoyer politique n’auront pas suffi : les eurodéputés ont décidé hier de voter en faveur de l’inclusion du nucléaire et du gaz fossile dans la taxonomie, le label vert européen.

« Les industries fossiles et nucléaires ont gagné une bataille aujourd’hui. Nous allons désormais mener le combat devant les tribunaux. Nous y dénoncerons les tractations honteuses menées en coulisses par la Commission européenne et les pays pro-gaz et pro-nucléaires, dont la France avec le soutien des lobbies russes.  Nous ferons tout pour que les tribunaux mettent un terme à ce greenwashing éhonté”» a réagi Pauline Boyer, chargée de campagne transition énergétique pour Greenpeace France

Le président français Emmanuel Macron avait ainsi été vivement critiqué pour ses « alliances toxiques » avec les industries du gaz et du nucléaire russe.

Les liens étroits entre la France et la Russie

Pour cause, l’industrie nucléaire française dépend énormément de Rosatom, le géant russe du nucléaire, à tous les niveaux de la chaîne de production, de l’exploitation de l’uranium au traitement des déchets, de la construction des centrales à leur exploitation.

Partenaires privilégiés depuis un accord intergouvernemental de 1996, la France, qui produit 70 % de son électricité à partir du nucléaire, est ainsi le principal client de l’entreprise publique russe Rosatom en Europe de lʼOuest. Un partenariat qui interroge en pleine guerre sur le sol européen.

« Rosatom exploite à la fois les technologies nucléaires civile et militaire, contrôle le “bouton nucléaire” du Kremlin et tient la plume en matière de réglementation sectorielle. Rosatom est un bras armé de l’État russe » précise Greenpeace

Exemple concret de ce partenariat, d’après les données du site comtrade, de 2000 à 2020, 19 245 tonnes d’uranium naturel ont été importées par la France en provenance de Russie, et 14 613 tonnes ont été exportées par la France vers la Russie dont 1747 tonnes entre 2017 et 2019. Et ce partenariat pourrait bientôt se renforcer : l’État français envisage de céder à Rosatom 20% du capital de GEAST, fabricant des turbines Arabelle pour centrales nucléaires.

Si le Conseil de l’Union européenne suit le vote du Parlement Européen d’ici le 11 juillet, le gaz et le nucléaire seront bien classés, à compter du 1er janvier 2023, dans la « taxonomie verte » européenne. 

Les parlementaires européens et ONGs opposés au projet n’ont pas encore tout à fait dit leur dernier mot concernant cette bataille. Elle aura désormais lieu dans les tribunaux. Le ministre de l’Énergie du Luxembourg a notamment déclaré qu’il contesterait la décision devant la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE).

Lire aussi : L’UE va financer une compagnie gazière impliquée dans le meurtre d’une journaliste lanceuse d’alerte

Laurie Debove

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