Ce mardi 27 février, les eurodéputés ont adopté de justesse la loi de restauration de la nature dans le cadre du Pacte vert (« Green deal ») européen, avec 329 voix « pour » et 275 voix « contre ». Le texte représente, malgré des concessions, une avancée dans la politique environnementale européenne à mener dans les prochaines décennies, avec l’objectif majeur de restaurer 90% des espaces dégradés d’ici à 2050.
L’importance de la loi de restauration de la nature
En 2030, déjà, 20% des terres et mers européennes en mauvaises conditions devront être restaurées, en donnant la priorité aux zones Natura 2000. Voilà l’une des finalités les plus représentatives de la loi de restauration de la nature, notamment lorsqu’on sait qu’aujourd’hui, plus de 80% des habitats européens sont dégradés.
Parmi les autres objectifs à retenir, l’amélioration de la biodiversité dans les écosystèmes agricoles avec la nécessité, pour les pays de l’UE, de progresser sur (seulement) deux des trois indicateurs qui suivent : « l’indice des papillons des prairies », ainsi que « la part des terres agricoles présentant des caractéristiques de paysage de grande diversité » et « le stock de carbone organique dans les sols minéraux des terres cultivées ».
Aussi, les États membres devront restaurer au moins 25 000 km de rivières à écoulement libre mais aussi « au moins 30 % des tourbières drainées d’ici 2030, 40 % d’ici 2040 et 50 % d’ici 2050 », ainsi que planter 3 milliards d’arbres supplémentaires.
France Nature Environnement (FNE) qualifie le texte adopté du « plus important pour la biodiversité européenne depuis 30 ans », allant même jusqu’à prêter à l’UE le titre de « leader » de la « protection et de la restauration de la biodiversité ».
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Une victoire nuancée par les concessions et les polémiques
Bien que l’adoption de la loi ait été indispensable, les modifications apportées au texte voté en juillet 2023 sur fond de récupération et pression politique sont autant de concessions faites qui ne profiteront pas aux écosystèmes eux-mêmes.
En effet, les partis conservateurs, de droite et d’extrême-droite européens ont depuis un an mis à mal bon nombre de propositions, arguant notamment du fait que certaines d’entre elles seraient néfastes à l’agriculture et la pêche en Europe, le Parti populaire européen (PPE) en appelant même à rejeter le texte aux côtés des partis extrémistes.
Des milliers de scientifiques sont à ce titre intervenus dans une tribune en soutien au Pacte vert européen pour tenter d’enrayer cette course aux fausses informations. « Ces affirmations manquent de preuves scientifiques, et elles les contredisent même », pouvait-on lire en préambule avant de voir défiler, point par point, les arguments en faveur de la biodiversité.
Concernant la supposée menace que la loi pourrait avoir sur la sécurité alimentaire, toujours avancée par ces mêmes partis, la communauté scientifique répondait à juste titre que « la protection et la restauration de la nature, ainsi que la réduction de l’utilisation des pesticides, sont essentielles pour maintenir la production à long terme et renforcer la sécurité alimentaire ».
Cette résistance n’aura cependant eu que peu d’incidences, le texte voté l’an passé ne faisant notamment aucune mention d’une utilisation moindre des pesticides, et faisant fi, par exemple, d’une possible extension des zones « à haute diversité » dans les champs.
Malgré ces revers, pour France Nature Environnement, « cette victoire témoigne de l’attente forte des citoyen·nes pour des mesures environnementales ambitieuses. À l’approche des élections européennes du 9 juin 2024, cette attente doit être entendue ».
Par ailleurs, l’association rappelle que, selon le Forum économique mondial, 50% du PIB planétaire « dépend de la nature et de ses services ». C’est donc pour cette dernière une nécessité « d’assurer la bonne santé des écosystèmes » mais aussi celle de l’économie, pour « la préservation des capacités productives de l’UE ».
Sources : « European Farmers’ Deal EPP Vision for Agriculture in Europe », Parti populaire européen, 05/05/2023 / « Les scientifiques soutiennent le Pacte Vert européen et rejettent l’argumentation injustifiée contre le règlement sur l’utilisation durable des pesticides et la loi sur la restauration de la nature », conbio.org / « Restauration de la nature : le Parlement adopte une loi pour restaurer 20 % de la terre et de la mer de l’UE », Parlement européen, 27/02/2024 / « La loi européenne sur la restauration de la nature a été votée, mais des obligations et des objectifs chiffrés ont été supprimés », Le Monde, 13/07/2023