La demande d’un visa pour les États-Unis inclut pour certaines nationalités l’obligation de renseigner ses identifiants de réseaux sociaux. 15 millions de visiteurs par an sont concernés.
Un onglet « médias sociaux »
En juin 2016, aux États-Unis, le département de la Sécurité intérieure avait proposé un ajout sur les formulaires de demande de visa : un onglet « médias sociaux ». Autrement dit, demander aux voyageurs de renseigner leurs identifiants utilisés sur des réseaux comme Facebook, Instagram, Twitter, Google, YouTube. À cette époque, plusieurs associations s’étaient insurgées contre cette idée, dénonçant des risques de ciblage pouvant servir une politique d’immigration discriminatoire. Malgré tout, l’administration Obama avait approuvé cette mesure le 19 décembre de la même année.

Une proposition de loi fut formulée en 2017, avant d’être entérinée par le département d’État en mars 2018. En 2019, c’est devenu une obligation. À présent, les demandeurs de visa peuvent lire sur leur formulaire « Veuillez indiquer les renseignements relatifs à votre présence en ligne. »
Exemption pour les bénéficiaires de l’ ESTA
38 nationalités, dont les Français, se trouvent encore épargnées par cette mesure. Il s’agit des voyageurs concernés par l’ ESTA (Electronic System for Travel Authorization, ou « Système électronique d’autorisation de voyage), qui permet une exemption de visa obligatoire pour les voyages de tourisme inférieurs à 90 jours.
Cette mesure concerne cependant près de 15 millions de demandeurs de visas par an, qui doivent fournir leurs identifiants de réseaux sociaux, leurs adresses email, leurs numéros de téléphone anciens et actuels.
Inquiétudes
« Identifier des menaces potentielles ». Voilà tout naturellement la justification avancée par le gouvernement américain. Mais l’American Civil Liberties Union s’inquiète de ce qu’aucun garde-fou ne semble avoir été mis en place pour contrôler l’utilisation des données récoltées.
« Il existe très peu de règles sur la façon dont cette information est collectée, conservée et disséminée vers d’autres agences, et aucune ligne directrice pour limiter l’utilisation que fera le gouvernement de ces informations. »
Venant s’ajouter à la discrimination au faciès ou envers les noms à consonance arabe, une discrimination des opposants politiques, des journalistes, de ceux dont les opinions ou préférences culturelles se trouveraient en désaccord avec le gouvernement pourrait voir le jour. Déterminer les opinions politiques, les loisirs, les goûts d’une personne s’avère en effet d’une extrême facilité avec un accès à son profil sur les réseaux sociaux.
Enfin, cette nouvelle mesure constitue la porte ouverte vers un état de suspicion permanente. Une personne refuse d’indiquer son identifiant ? Elle a certainement quelque chose à cacher…