Une étude choquante révèle comment les sécheresses et les vagues de chaleur entraînent des températures de l'eau à 41 ° dans les lacs amazoniens, décimant poissons et dauphins en voie d’extinction. Ces pièges thermiques mortels ont des conséquences dramatiques sur les écosystèmes et les communautés locales.
Des eaux à 41°C en Amazonie
Du jamais vu en plus d’un siècle. Les eaux des lacs amazoniens atteignent désormais des températures à plus de 40 °C, un seuil bien supérieur à celui recommandé pour les spas !
Les eaux peu profondes du lac Tefé, d’à peine deux mètres, sont devenues tellement brûlants que les chercheurs pouvaient « à peine y tremper les doigts », rapporte Ayan Fleischmann, chercheur principal à l’Institut Mamirauá for Sustainable Development, pour TheGuardian.
Il est le co-auteur de l’étude publiée dans la revue Science, qui révèle cette situation critique. Ce bouleversement brutal résulte d’une combinaison de sécheresses historiques, de niveaux d’eau dramatiquement bas, et de conditions atmosphériques extrêmes. Cinq lacs amazoniens ont franchi le seuil critique de 37 °C en journée.
Un niveau exceptionnel pour des plans d’eau de cette taille en zone tropicale. En moyenne, le lac Tefé atteint 30°C pendant les mois les plus chauds, mais en 2024, il a atteint 40°C.
« Une augmentation de 10 °C de la température de l’eau est sans précédent », a déclaré Adrian Barnett, maître de conférences en écologie comportementale à l’Université de Greenwich. « La quantité d’énergie nécessaire pour y parvenir dans de tels volumes d’eau est tout simplement ahurissante. »
Une hécatombe massive
En cause, la faible vitesse des vents, des ciels constamment dégagés et une turbidité élevée (eaux très chargées en matières organiques) qui ont entraîné une accumulation thermique massive en profondeur. Résultat : les écosystèmes aquatiques sont ravagés, les espèces n’ayant plus de zone de refuge dans les fonds lacustres.
À Tefé, plus de 200 cadavres de dauphins ont été retrouvés flottant à la surface du lac entre fin septembre et octobre 2023. Les deux espèces concernées –Inia geoffrensis (dauphin rose de l’Amazone, ou boto) et Sotalia fluviatilis (tucuxi) – sont toutes deux classées comme en danger sur la liste rouge de l’UICN.
Cruauté du sort, le stress thermique aurait provoqué chez les cétacés des défaillances neurologiques et physiologiques. « Il est possible que la chaleur ait affecté leur cerveau, les empêchant de fuir vers le fleuve Amazone », indique Fleischmann à CNN.
Les poissons ont aussi subi l’hécatombe. Au sein d’un seul étang, plus de 3000 d’entre eux ont péri en quelques jours. Cette tragédie a frappé en pleine période de reproduction pour de nombreuses espèces aquatiques, une catastrophe pour le renouvellement des populations.
Cette hécatombe massive a des effets sur l’ensemble de la chaîne alimentaire : oiseaux piscivores, reptiles, mammifères, et les communautés humaines qui dépendent de la pêche. Ce réchauffement s’accompagne d’un rétrécissement des lacs. Durant la sécheresse de 2024, consécutive à celle de 2023, le lac Tefé a perdu 75 % de sa surface, tandis que le lac Badajós s’est contracté de 90 %.
Cette raréfaction de l’eau a des impacts néfastes sur les processus biogéochimiques locaux, comme le stockage du carbone, la concentration d’oxygène dissous, ou encore la propagation de maladies liées à l’eau stagnante. Elle isole aussi les populations, en coupant les voies navigables habituelles.
Alors que la COP30 s’ouvre au Brésil, cette tragédie rappelle la fragilité des grands écosystèmes tropicaux.
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